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Les Journées de l'ECF #07

Jacques-Alain Miller: Un nouveau concept (suite)

Étonnante, l´Ecole, je trouve ! Réactive, vibrante, démarrant au quart de tour ! Comme si elle n´attendait que ça !

On la cueille au débotté ; on lui parle gentiment, sur un ton pas trop compassé ; on fait cliqueter quelques formules coruscantes ; dans la grande tradition des « impostures intellectuelles », on mobilise des équations météorologiques auxquelles personne, ici, ne connaît rien ; on active le désir de l´Autre, toute la gomme, toute la gamme ; bref, on lui montre qu´on l´aime, et qu´on s´amuse à l´aimer… et elle s´enflamme !

71 projets… en quatre jours… On se dit que cela finira bien par ranimer notre pauvre passe… qu´on dit trépassée… et qui n´est que flagada.

Dimanche, Collège de la passe. Ça va chauffer !

On me félicite de mon « enthousiasme ».

On me dit qu´il est « contagieux »

Ça me fait bien plaisir.

Tous ne sont pas sur cette longueur d´onde.

Heureusement.

Je ne veux pas voir qu´une seule tête dans les rangs…

Des moues ponctuent le paysage.

Des sensibilités se froissent.

Des réticences s´insinuent.

« Alors, comme ça, tout le monde devient analyste, maintenant ? »

De qui est-il, ce sarcasme ? D´où vient-il, ce couac ? Qui se décompte, avec ce mauvais esprit ? Mais c´est moi, bien sûr !

Croit-on un instant que je m´emballe ? que j´aie perdu le nord ? Il est arrivé, par le passé, qu´on me l´impute… Les Forums ne plaisaient pas à tout le monde dans cette École, on ne se gênait pour me le faire savoir… Mais j´ai ma pascalienne boussole : « Quand tous vont vers le débordement, nul ne semble y aller. Celui qui s´arrête fait remarquer l´emportement des autres, comme un point fixe. « 

En l´occurrence, ma doctrine est simple et réfléchie. Les Journées, c´est la fête.

L´inconscient comme discours de l´Autre a eu l´obligeance de nous adresser, par le canal de La Sagna, un rêve sensationnel pour nous le dire.

Discernant que le message nous était à tous destiné, notre collègue s´est empressé de nous le faire parvenir. Ce purloined dream est là pour nous confirmer de nos Journées, qu´elles sont un Carnaval, comme la vie elle-même.

Ah ! je n´y tiens pas, il faut que je le commente, ce rêve, c´est de la gourmandise…

J´ouvre une parenthèse.

Et relis le texte du rêve, et associations – Journal des Journées, numéro 5.

Le Carnaval des Animaux-sinthomes, on ne saurait mieux dire…

Animaux en peluche, et baignant dans leurs déjections… ils viennent de naître…

Des aïeuls bienveillants, qui sont tous La Sagna… récemment grand-père pour la seconde fois, m´a-t-il dit… il est aux petits soins, mais n´en pense (rêve) pas moins…

Les quatre bestioles sont von unheimlicher, à faire peur, et on le serait à moins, les pauvres…

Elles vont par deux… ion et yen, comme ying et yang, les deux sexes… et puis, les deux blancs…

Le grand vautour… nécrophage, charognard… attendant que le vivant défaille et meurt pour en faire sa proie… la hyène aussi mange les animaux morts… le second couple redouble le premier… si hyène=vautour, alors lion=singe… le vautour a-t-il des vues sur le singe ?… des vues forcément pas bienveillantes, pas bienveillantes du tout…

Le singe ? non, le syngeThe Playboy of the Western World… le playboy, incarnant Philippe jeune homme, homme jeune… le singe est albinos… maladie génétique, l´albinisme… il est médecin, il doit savoir ça… la mort aussi est une maladie génétique… on les persécute, les albinos, en Afrique, on les tue, on fait commerce de leurs organes… il doit savoir ça, il sait tout… ça fait bien la paire avec le vautour…

En somme, les trois âges de la vie sont représentés… bébé, playboy, papy… la naissance, la vie, la mort… c´est à se demander si la résurrection de la chair est si désirable que ça… quand on voit ce que c´est, La Surrection de la chair… ou de la peluche

Grotesques ornant Le Jugement dernier de  Signorelli à Orvieto
Grotesques ornant Le Jugement dernier de Signorelli à Orvieto

Fresque onirique… réplique à Signorelli… par Signor La Sagna… filiation italienne, sans doute… il y a du Nom-du-Père là-dedans, a-t-il pensé… oui, il y a du père, bien sûr… ça a du faire point d´appel… appel des trompettes du Jugement dernier… Sienne de vie !

Pas mal, pas mal.

Mais il y a autre chose, je le sens. Il y a toujours autre chose…

Il y a qu´il a communiqué son rêve, le Philippe… à tous, par mon canal… il l´a livré… il a bien du penser que ça ferait jaser, qu´on allait l´équarrir, l´analyser… faire comme si on pouvait…

Cela a été rêvé pour ça… pour être communiqué à tous… pour qu´on l´analyse… moi d´abord… pour qu´on s´y trompe… j´ai marché, j´ai couru… il connaît mon faible… je marche au désir de l´Autre…

Le vautour, c´est moi… il m´a appâté… je me suis jeté sur ce rêve avec gourmandise, ai-je dit… je dépèce l´albinos…

Je démontre ce que je sais faire… pour du semblant… puisque l´analyste manque-à-être, tout le monde qui veut devenir est condamné au semblant… à jouer le rôle, bien ou mal… surtout ne pas s´y croire…

Vautour et singe sont de la même couleur… comme le disque des prisonniers… tous les deux, Philippe et moi, analystes… mais les prisonniers sont trois… oui, c´est ça, je sens qu´entre nous, il y a Lacan… son premier analyste… Lacan, le Grand Vautour… l´adjectif est dans le texte du rêve…

La Sagna n´a pas seulement rêvé pour l´École, mais pour Lacan… l´École de Lacan… par mon canal, ai-je dit… c.a.n.a.l. de L.a.c.a.n… c´était hier, le 9 septembre… date de sa mort… inoublié de moi, de Judith, de ses analysants… le vautour et le singe sont blancs parce qu´ils sont en noir, portent le deuil…

Ah ! voilà pourquoi j´ai choisi la fresque de Signorelli… La Résurrection… de Lacan

Mais oui ! puisque j´ai attendu septembre pour me bouger, pour faire l´affiche… en hommage… regrets éternels…

Là, c´est jam qui s´analyse… avec pls, au sens instrumental… pourquoi pas… anch’io son pittore !

Rideau.

……. A suivre

[NB: j´ai demandé son feu vert à Philippe La Sagna avant de diffuser ce commentaire.]