Yayoi Kusama

Yayoi Kusama – la belle perplexité

J’ai placé Ley dans la chambre rouge, œuvre de Yayoi, faudrait vérifier qu’elle n’y soit pas toujours!

«Un souvenir d’enfance fonde la légende de Yayoi Kusama et associe le commencement de sa vie d’artiste à une hallucination, une inquiétante étrangeté qui s’est manifestée autour de la table familiale : les fleurs rouges de la nappe se multiplient sur le plafond, les murs, le sol, sur elle-même. Âme sans corps, l’artiste fait de son insupportable auto-anéantissement (Self-Obliteration) le défi et la quête même d’une oeuvre radicale et atypique : inscrire son corps, s’inventer un corps à corps selon des procédures formelles toujours réinventées..

L’exil à New York en 1958 libérera Kusama, peintre, sculpteure, performeuse, écrivaine et chanteuse. En traversant les frontières, elle se défait de tout lien, sauf de la mémoire d’une immense culture.

[…]
« C’était la période de l’engouement pour l’Action painting. J’avais l’idée qu’il était important pour moi d’élaborer un art original, issu uniquement de mon monde intérieur […]. En 1959, j’exposais mes Infinity Nets, blancs sur fond noir. La monotonie engendrée par une répétition due à une action constante, l’absence d’un centre, et l’indifférence témoignée à la composition, plongèrent le public dans la perplexité […] J’avais en moi le désir de mesurer de façon prophétique l’infini de l’univers incommensurable à partir de ma position, en montrant l’accumulation de particules dans mes mailles d’un filet où les pois seraient traités comme autant de négatifs. […] C’est en pressentant cela que je puis me rendre compte de ce qu’est ma vie, qui est un pois. Ma vie, c’est-à-dire un point au milieu de ces millions de particules qui sont les pois. […] »

Un jour, après avoir vu, sur la table, la nappe au motif de fleurettes rouges, j’ai porté mon regard vers le plafond. Là, partout, sur la surface de la vitre comme sur celle de la poutre, s’étendaient les formes des fleurettes rouges. Toute la pièce, tout mon corps, tout l’univers en seront pleins ; moi-même je m’acheminerai vers l’autoanéantissement, vers un retour, vers une réduction, dans l’absolu de l’espace et dans l’infini d’un temps éternel. […] Je fus saisie de stupeur. […] Peindre était la seule façon de me garder en vie, ou à l’inverse était une fièvre qui m’acculait moi-même. […] »

UN POIS, C’EST TOUT, Chantal Béret, Conservatrice au musée national d’art moderne. Texte publié dans le magazine programme Code Couleur

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