tableau synoptique autour des artistes

en réponse à V :

> nb : je voudrais faire un tableau synoptique autour des artistes (des dates, des dates, événements historiques, scientifiques, œuvres marquantes… tout ça mis en page de la façon la plus parlante possible) que nous avons vus ensemble : gros projet, sur lequel je ne détesterais pas avoir de l’aide…

malik a écrit :

Bonjour Véronique, bonjour le groupe,

Je n’ai pas participé à vos escapades, je ne peux donc pas aider directement à la création de ce tableau. Mais j’ai pensé à un outil-support qui pourrait vous être utile: un pad collaboratif (désolé pour le pléonasme) très facile d’utilisation. Chacun écrit peut écrire quelque chose, faire des modification, ajouter des éléments au texte. L’adresse:

http://framapad.org/

mode d’emploi:

« La première chose à faire est d’entrer votre nom ou votre pseudo dans le champ en haut à droite, afin que les futurs collaborateurs puissent facilement vous identifier. Vous pouvez également modifier votre couleur en cliquant sur le carré à gauche du nom.

Vous voici donc prêt à saisir ou copier du texte dans cette même fenêtre. Vous pouvez le mettre en forme en cliquant sur les icônes de la barre d’outils (gras, italique, etc.).

Pour inviter d’autres utilisateurs à se joindre à vous sur ce pad. Il suffit de leur donner l’adresse du pad (qui se situe dans la barre d’adresse de votre navigateur). Vous pouvez également cliquer sur « Inviter » (en haut à droite) et remplir un formulaire à envoyer directement à vos collaborateurs.

Le texte saisi s’enregistre et se synchronise alors automatiquement avec tous les utilisateurs, identifiés par leur couleur.

Un espace de discussion se trouve en bas de la colonne de droite et vous permet d’échanger avec les utilisateurs connectés sans modifier le texte lui-même. »

Bon dimanche
malik

Shame de Steve McQueen et Les nus de Degas – note 0

Edgard Degas, Intérieur (appelé aussi « Le viol »)
Shame, Steve Mc Queen

0/ Partir de la honte ( relire la « Note sur la honte » de Miller)

D’instinct, aller d’abord vers l’ontologie, parce que concernant cette « science de l’être », Lacan préconisait  de plutôt l’écrire avec un H :  « Hontologie« . Quand Miller nous apprit l’année dernière à l’opposer à l’hénologie.

Hénologie opposée à ontologie.
L’un opposé à l’être,
L’existence à l’essence. 

La honte, celle que vous éprouvez à vous être approché au plus près du noyau de votre être (ai-je retenu de ce que me dit, il y a bien longtemps, mon analyste, peu avant que je n’arrive à Paris (( en ce qui me concerne, la honte d’écrire…))). (( Il y a plus longtemps encore, arrivant juste en analyse, pour ma part je lui dis: « Je ne suis pas venue ici pour demander pardon. Ici, je veux être sans pardon. »))

Déjà, reconnaître dans ce « noyau de l’être », ce qui fait la marque du sujet, sa brulure, dont, s’il convient qu’il se détache de la passion,  il ne convient pas qu’il ne l’assume, ne s’en tienne responsable. Ce que je peux en dire. Du symptôme au sinthome ( ?) (( Et l’Hontologie avec un H de Lacan se ferait précurseur de l’hénologie de Miller. L’hontologie lacanienne extime à l’ ontologie. Ce noyau de l’être extime à l’être.)) 

« J’aimerais au moins être arrivé à vous faire honte » – Lacan J., citation approximative.

 

 

Vous envoie mes notes, et encore, de façon fragmentée. Un texte en effet traîne sur mon bureau, qui n’est pourtant pas long, et que je n’ai même pas eu (pris) le temps de finir de retaper ; il traite de l’exposition sur les Nus de Degas, du  film Shame et de la salle de bain…

Ne s’agit-il pas également avec Escapades d’un laboratoire d’écriture, aussi bien que d’e-lecture…..

Bien à vous,

Véronique

 

Daniel Buren, Monumenta 2012 // hors espace, hors temps : juste où il faut, au bon moment

Chère Dominique,

J’ai été tout d’abord surprise par Buren, je trouvais que ces ronds de plastiques de toutes les couleurs coupaient en 2 le grand espace du grand palais, et que c’était bien dommage … mais ensuite quand je me suis promenée et que j’ai vu à travers ces ronds de couleur le toit du grand palais changer du vert au jaune ou au rouge et les miroirs du milieu qui nous mettent sens dessus dessous tant et si bien que l’on ne sait plus où est le haut où est le bas et qui sont comme hors espace et hors temps, et au final … la montée des marches et la vision d’en haut , de cette forêt de toutes les couleurs…

Je crois que je suis entrée dans l’œuvre, avec une impression d’être là où il fallait être juste un moment!

Je t’embrasse

Isabelle

voir : http://www.gillesvidal.com/blogpano/monumentaburen.htm

sur la question du négationnisme

Chers escapadeurs,

Je vous envoie un texte que j’avais écrit à Louise Lambrichs sur Facebook, en commentaire d’un article d’elle publié dans Le Monde qui dénonce le rejet par le Conseil Constitutionnel d’une loi pénalisant la négation des génocides reconnus par la loi et s’inquiète de l’abrogation possible dès lors de la loi Gayssot (condamnant le négationnisme du génocide juif). 

J’aurais pour ma part l’idée que chacun doit pouvoir exprimer son opinion que de toutes façons rien ne l’empêchera d’avoir, mais je m’intéresse aux causes de Louise. Sa lecture m’a une fois de plus ramenée à un article de Rivka Warshawski lu en 1996 (et qui décidément me poursuit)

S’il n’est pas évident, le lien de ce texte au négationnisme, existe. Et il s’appuie entre-autres sur le livre de JF Lyotard, Le différend,  accusé d’ailleurs par certains de servir la cause du négationnisme. 

 —-

Chère Louise, je suis bien mal placée pour penser ces questions qui malheureusement m’échappent ayant bien des difficultés avec l’histoire, avec le temps.

Je crois que je suis phénoménalement trop inconsciente. Je n’arrive pas à intégrer les coups de hache de l’histoire, le temps dans sa durée ne cesse de m’échapper, malgré mes efforts répétés pour l’étudier. Ma mémoire s’acharne à contracter la ligne du temps en quelques points, voire à un seul. Je vivrais hors temps, hors lieu, pourtant toujours bien là, présente. // ceci n’a rien à voir avec le négationnisme mais interroge au moins la nature de l’histoire.

 Ces difficultés de mémoire que je suis tentée de traiter en symptôme (plutôt qu’en manque d’intellignece, j’ai ma fierté….) me conduisent en tout cas à avoir la plus grande difficulté à croire à une quelconque objectivité possible des faits, à une vérité historique (à moins que cette  vérité n’assume tout ce que Lacan peut en dire : qu’elle ne soit que mi-dite, qu’elle soit fiction (mais qu’elle attienne au réel (du sujet qui l’élabore)), et qu’elle soit soeur de l’impuissance).

 Ce qui m’avait rendue très sensible au texte de Rivka Warshawsky dont je vous ai déjà parlé : « Israël et l’holocauste – Du zéro au septième million »

 RW y parle d’une jeune femme en analyse chez elle et de son accès, son accession à l’histoire (c’est ma lecture). Elle y parle de ce qu’elle repère comme un phénomène d’identification à un signifiant unique « survivant de l’holocauste », un S1, un signifiant-maître, signifiant m’être, qui domine la vie de cette analysante et lui impose une vie « toute d’inhibitions et de souffrances inexpliquées » sur laquelle elle tient à rester mutique. Mutisme du sujet qui tient à préserver son (m)’être (« holocauste »). // on nage donc ici en pleine (h)ontologie (voire même avec la honte d’être survivant)

 L’holocauste lui, est silencieux. 

 Les chambres à gaz sont silencieuses, souligne RW, se rapportant à ce livre de Lyotard,  « Le différend »,  qui souligne qu’aucune chambre à gaz n’apportera jamais la preuve de son œuvre de mort puisque qu’aucun n’en n’est sorti, ne peut en témoigner. Peut-être à cet endroit me direz-vous que c’est tiré par les cheveux, que l’on sait, que l’on connaît la vérité des faits, que l’on ne peut les ignorer. C’est là l’intérêt de cet article (enfin l’un des intérêts), c’est qu’il souligne qu’il est très important de reconnaître ce silence, ce trou dans le symbolique que constitue les chambres à gaz, ce réel. 

(D’un côté il y a le mutisme du sujet, mutisme qui signe aussi la présence même du sujet, de l’autre il y a le silence du réel. Entre les deux : pas de rapport.)

C’est ce réel qui est l’œuvre dans le symptôme qui s’élabore de cette analysante. Il y a un trou, un impensable, un impensé. Lui, est antérieur. 

 Le signifiant qui vient le barrer, le marquer, l’indicer, c’est cet un-signifiant « survivant de l’holocauste » avec lequel l’analysante cherche à faire corps (dans le déni du sien // on n’est pas un signifiant, on a un corps). Cet Un est sans mémoire. et ne peut que se répéter, hors sens (le sens est celui du temps, de l’histoire). « Répétition et mémoire s’excluent », insiste RW. Cet Un auquel cette analysante cherche à s’identifier fait barre sur le trou. Son être se réduit à cette barre qu’elle doit faire sur le trou. 

 Cette identification ne peut être qu’inhibitoire, puisqu’elle ne permet, n’autorise que la répétition. Itérer. Faire marque. Faire barre (aussi bien barre à soi-même, puisqu’on est dans l’obligation de la redresser encore et toujours cette barre, cette marque cette croix, dirais-je suivant là mes origines chrétiennes. Obligé de retracer cet Un qui disparaît dans les limbes aussitôt aussitôt tracé.) C’est là un autre apport de ce texte que de souligner le lien de l’inhibition et de la nécessaire répétition du Un.

 Et c’est quand l’analysante comprend, lors d’une interprétation de l’analyste, qu’elle a son histoire et que cette histoire ne va pas sans dire, qu’elle vient poser ce que RW appelle la question du zéro : « Si je suis de la deuxième génération mes parents de la première (les survivants), qu’est-ce qu’il y avait avant. Est-ce que c’était la génération zéro? Et qu’est-ce qu’il y avait avant le zéro? »(citation de mémoire)

Voilà donc que le zéro (un nombre) vient se poser sur le réel de l’origine, de l’holocauste, le faisant exister. Le conte, le compte devient possible. A la place de ce zéro, c’est l’analysante bien-sûr qui va devoir venir se positionner comme sujet, sujet du verbe. Mais, au départ de ce zéro-nombre, on quitte le domaine de la cardinalité du Un et sa simple répétition pour rentrer dans l’ordinalité, le compte, la succession. Accession donc à l’histoire.

 Voilà ce que je peux vous dire pour le moment.  C’est que de toute façon, au départ, c’est pas les faits, c’est le réel. Après-coup, les faits ne seront jamais ce qu’on peut en dire. // En regard au négationnisme, la question est alors de savoir si on peut dire tout ce qu’on veut ou s’il y a un interdire. 

 Bien cordialement à vous,

 Véronique 

RE: sur la question du négationnisme

Chère Véronique,
très intéressant ce que tu as écrit, mais effectivement, j’aimerais bien lire aussi l’article qui t’as inspiré cette réflexion… le problème: je n’ai pas accès à Facebook. Tu as un autre lien pour les allergiques au bouc?
Malik

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Cher Malik,

Le texte que je commente, de Rivka Warshawski, se trouve là : https://disparates.org/lun/2011/03/du-zero-au-septieme-million/

Quant à celui de Louise L., le voici :

Le Conseil constitutionnel a décidé de rendre le négationnisme licite (titre donné par Le Monde du 6 mars 2012)

par Louise L. Lambrichs, jeudi 5 juillet 2012, 19:38 ·

La récente décision du Conseil constitutionnel de rejeter la loi pénalisant la négation des génocides reconnus par la loi et documentés par l’Histoire est un événement historique qui confronte chaque sujet à sa conscience, voire à son inconscience (pour ne pas dire son inconscient). Cet événement, dont le sens me paraît devoir être pensé autant que possible, devrait inviter en effet chacun à se situer et à choisir son camp, au-delà de ses opinions personnelles puisqu’il s’agit d’une question d’intérêt public.

Quant à moi, cette décision me paraît gravissime au sens où, au nom de la liberté d’expression dont j’use ici publiquement, elle soulève la question des rapports qu’entretient le Conseil constitutionnel français avec les décisions prises par les cours pénales internationales, tout en portant atteinte à la vérité historique dont héritent les jeunes générations actuelles et en entérinant légalement toutes les formes de négationnisme au nom de la liberté.

En effet, si le Conseil constitutionnel est logique, cette décision, qui est aussi un acte symbolique, devrait l’amener à remettre en cause la loi Gayssot. Car il ne peut pas à la fois rejeter ce projet de loi et maintenir une loi qui condamne le négationnisme sans s’exposer à être inconsistant, voire incohérent. C’est là une contradiction à laquelle la raison législative va bien devoir se confronter – sauf à soutenir la liberté comme étant d’abord la liberté de ne pas penser (qui existe, bien entendu, mais dont on souhaiterait, si possible, qu’elle ne fasse pas la loi dans un pays qui s’honore de grands penseurs).

En ce sens, quels qu’aient été les études publiées depuis des décennies et les débats soulevés par ces études, on ne peut pas dire jusqu’ici que les hommes aient réussi à penser le génocide comme réel, sa spécificité, et la différence radicale qui le distingue de la guerre ordinaire. Ce dont témoignent bien, sur un autre terrain européen où la France a aussi été engagée, les discours actuels et passés sur la guerre de Yougoslavie, discours portés par d’innombrables experts en effet très libres, et c’est heureux, mais qui semblent jusqu’ici n’avoir pas saisi la relation entre le négationnisme des nationalistes serbes, et la répétition génocidaire qui s’est produite, sous nos yeux, dans les Balkans.

De mon point de vue, et c’est là un événement dont je me demande qui il pourra réjouir, la décision du Conseil constitutionnel consacre la victoire de Robert Faurisson et de Noam Chomsky qui, si le législateur a bonne mémoire, avaient pris la défense de cet historien négationniste  » au nom de la liberté d’expression « . Que je sache, les historiens ne sont pas libres de nier les faits, dont chacun sait qu’ils sont têtus. Ils sont au contraire invités à les penser aussi rigoureusement que possible et à les documenter tout en en reconstruisant la logique. Or si la destruction des juifs d’Europe a changé quelque chose dans l’histoire occidentale, c’est bien dans cette question-là, à savoir penser ce qu’est un sujet humain confronté à l’horreur génocidaire – horreur qui s’organise dans la langue elle-même qui lève, sans en avoir l’air et parfois en falsifiant l’Histoire et en entraînant les foules, l’interdit de tuer en laissant libre cours aux pulsions destructrices qui habitent l’être humain.

Il faut croire que cette question ne s’est pas inscrite, psychiquement, dans l’esprit des membres du Conseil constitutionnel, supposés faire valoir nos valeurs universelles – valeurs qui supposent elles aussi de penser le réel en tant qu’il est spécifiquement humain. Il faut croire qu’ils n’ont pas mesuré l’effet probable de leur décision, qui autorisera désormais les jeunes générations qui seraient tentées de nier l’existence des chambres à gaz à proclamer haut et fort, comme le font déjà certains, que les juifs ont tout inventé et qu’il s’agirait là, finalement, d’un  » mythe « . Façon commode, bien entendu, de se débarrasser de la question.

Il me paraît clair que si l’Allemagne avait osé prendre une telle décision, de nombreux Français, toujours prêts à donner des leçons, auraient crié au scandale. La loi Gayssot n’étant pas encore abrogée, j’espère que l’indignation, aujourd’hui bien portée, soulèvera la masse des Français qui refusent de vivre dans une France négationniste, désormais autorisée par le Conseil constitutionnel, au nom de la liberté, à considérer les génocides comme des détails de l’Histoire. Une France autorisée à faire librement et constitutionnellement injure aux juifs, aux Arméniens, aux Bosniaques, aux Croates, aux Serbes qui ont eule courage de combattre Milosevic, et qui vivent sur notre sol.

Le choix, bien entendu, est délicat. Rejeter ce projet de loi et conserver la loi Gayssot serait laisser entendre qu’aux juifs, un sort particulier serait fait – il est vrai qu’ils en ont tristement l’habitude -, ce qui ne peut qu’aiguiser l’antisémitisme. La décision qui m’eût paru raisonnable aurait été d’entériner ce projet de loi, pour tenter de penser ce qui, manifestement, reste pour la plupart difficile à penser, à savoir le sens, dans l’Histoire, de la destruction des juifs d’Europe, et en quoi d’autres politiques postérieures, sans être semblables, sont néanmoins comparables, idéologiquement et pratiquement, à la politique menée par l’Allemagne nazie avec la collaboration, parmi d’autres, de l’Etat français.

Louise L. Lambrichs

Ecrivain

Chargée d’enseignement à Sciences Po

N.B. Cet article a été publié par Le Monde, mais n’est plus accessible par le lien initialement donné. Vu ses enjeux actuels, je me permets de le publier ici, de façon à lutter contre le négationnisme actuel. Le titre que j’avais proposé était : » Libres d’être négationnistes ? » Le titre donné ici est celui donné par la rédaction du Monde.

on a vu, on a aimé (holy motors)

guy et moi, on a vu, on a aimé : holy motors, de leos carax

Leos Carax
« Plus précisément, pourquoi cette impuissance à tourner ?*

Longtemps, j’ai été incapable d’imaginer un projet en me fixant à l’avance des règles (« pas trop cher », « pas trop compliqué », etc.). Ce qui rendait tout impossible, à une époque où je n’avais presque plus d’alliés (morts ou fâchés) et où les douaniers du milieu, toujours plus nombreux, me barraient le passage. Ma participation au film
Tokyo ! m’a libéré. Il s’agissait d’une commande, quarante minutes dans un film à trois cinéastes, loin de France. Il m’a fallu l’imaginer et le tourner très vite. J’ai compris que j’en étais capable, que cette vitesse de trait ouvrait même mon cinéma vers d’autres dimensions. Mais aussi que cela avait un prix : l’abandon de la pellicule pour le numérique. Or ma passion du cinéma était – est toujours – terriblement liée au défilement de la pellicule, au moteur dans la caméra. D’où la bizarrerie quant à Holy Motors : c’est une célébration des moteurs et de l’action, tournée sans ­caméra (les caméras numériques sont des ordinateurs, pas des caméras).
Continuer la lecture de on a vu, on a aimé (holy motors)

holy motors // longueur d’un road-movie-égo-trip

Bonjour!

c’est quand même sacrément long ce road-movie-égo-trip non?

Je reconnais que c’est le meilleur Carax – à mon goût.

La scène d’intro (avec mister Carax en personne!) dans le ciné, très réussie, rappelle un peu un tableau d’Hopper; l’épisode de la mendiante rien à dire, éloquente (et courte!); l’épisode SM futuriste, là le Léo commence à se faire plaisir, c’est son droit, mais on (je) commence à se (me) méfier; l’épisode de la reprise du rôle de Monsieur Merde (inventé pour un moyen-métrage il y a quelques années) avec la prestation d’Eva Mendes et cette magnifique pose tableau dans les égouts, assez jubilatoire; la scène de la fille et du père, j’ai tout de suite pensé au groupe en la voyant et me suis dit, tiens elles (pas d’offense Guy, la plupart du temps ce sont elles qui parlent des films) auraient des choses à dire!, moi cela m’a laissé perplexe; l’énergie de l’entracte dans l’église, excellente, pour moi c’est la seule chose qui aurait pu durer plus longtemps: l’entracte!; la sixième scène sans intérêt si ce n’est encore et toujours la référence au dédoublement/miroir entre Carax et Lavant, cela fait plus de 20 ans que cela dure, c’est gavant à la fin, bon la fin de l’épisode qui se passe dans la limo avec l’apparition de Piccoli, admettons, même si c’est un peu convenu et facile comme si Carax avait pour une fois peur qu’on ne le comprenne pas et se décide à faire de la pédagogie… or pour une fois que l’on comprend où il veut en venir, c’est dommage si ce n’est pour se faire encore plaisir avec Piccoli; les deux scènes suivantes devant le Fouquet’s et dans l’hôtel, aucun intérêt; le sommet du creux que prend la fin du film c’est cette interminable scène (star oblige) avec Kylie Minogue en hôtesse de l’air et cette chanson horrible à la Michel Legrand, là on se met à rêver du bon vieux temps où que je n’ai pas connu où l’on pouvait commander une glace pendant le film histoire de passer le temps agréablement; la fin quand il rentre chez lui, bof, ouais ok, y a du Max mon amour là-dedans, mais bon, il faut aimer les films anthropomorphisme; l’épilogue du film avec l’extraordinaire Edith Scob est excellent et les limos dans le garage (qui moi me font plutôt penser à « Cars » ce qui a ravi l’ado attardé en moi) me confortent (si j’en avais besoin, mais non je n’en ai pas besoin, cependant je pourrais encore rajouter à ma panoplie de films un exemple à donner à des critiques ciné qui quittent les salles) dans l’idée qu’il ne faut jamais quitté un film avant sa fin, on ne sait jamais, une scène de fin peut sauver un film.

En résumé, si on a les références cinématographiques que le réalisateur nous ressert à sa sauce, c’est un peu fastidieux, sinon cela doit être déroutant, c’est le cas de le dire, il ne faut donc pas résister à l’envie de faire sa pause autoroute réglementaire, si le besoin se fait sentir, car la route est longue…

Carax se fait plaisir, cela se voit, cela fait plaisir pour lui, on est presque soulagé de voir qu’il n’est plus/ne se sent plus maudit … mais Dieu des artistes soi-disant incompris que cela a pris du temps pour lui, et Dieu du cinéma que ce film est long pour les témoins de sa renaissance!

Bonne séance à ceux qui ne l’ont pas encore vu

Malik

Holy Motors // ce paris que j’aime et l’obscur désir

ha ha ha, MERCI MALIK !

Bonjour!

>  bonjour !

c’est quand même sacrément long ce road-movie-égo-trip non?

>  pas assez long

La scène d’intro (avec mister Carax en personne!) dans le ciné, très réussie, rappelle un peu un tableau d’Hopper;

>  magnifique tu veux dire (le tangage, ce mur en trompe l’œil, rappelle les meilleurs Lynch aussi, le corps sous le pyjama, le chien en chien de fusil sur le lit)

l’épisode de la mandiante rien à dire, éloquente (et courte!);

>   magnifique et mystérieuse et parisienne – image de notre quotidien souci, énigme et douleur

l’épisode SM futuriste là le Léo commence à se faire plaisir, c’est son droit, mais on (je) commence à se (me) méfier;

>  extraordinaire ! inventive, jubilatoire et qui débouche sur ces animaux fantastiques… et ce faire-l’amour dans des combinaisons en plastique ! ce mixte de laideur de lumière de yayoi (elle s’appelait comment encore l’artiste japonaise) de chair et de caoutchouc

l’épisode de la reprise du rôle de Monsieur Merde (inventé pour un moyen-métrage il y a quelques années) avec la prestation d’Eva Mendes et cette maginifique pose tableau dans les égoûts, assez jubilatoire;

>  sublime, là encore, paris, paris, le corps extrême de ces laissés pour compte de la ville et eva mendès accueillante, voilée, nouvelle vierge et pièta réinventée avec un christ au plus étrange corps et qui bande !

la scène de la fille et du père, j’ai tout de suite pensé au groupe en la voyant et me suis dit, tiens elles (pas d’offense Guy, la plupart du temps ce sont elles qui parlent des films) auraient des choses à dire! , moi cela m’a laissé perplexe;

>   dur dur. dur. dur. là aussi, leur laideur, apaisante, juste

l’énergie de l’entracte dans l’église, excellente, pour moi c’est la seule chose qui aurait pu durer plus longtemps: l’entracte!;

>   il paraît que toute l’équipe s’est laissée envoutée. et encore paris ! un paris d’accordéon, manouche et punk, dans une église qu’on reconnaît sans l’avoir jamais vue

la sixième scène sans intérêt si ce n’est encore et toujours la référence au dédoublement/miroir entre Carax et Lavant, cela fait plus de 20 ans que cela dure, c’est gavant à la fin,

>    peut-être pas la meilleure scène, mais heureusement bizarre, pour moi. j’aime ce meurtre, ce désir de plus de meurtres encore, j’aime ces nouvelles incarnations, et puis, cette grande salle, ces ouvriers… (tiens,  tu as oublié l’homme d’affaire du début)

bon la fin de l’épisode qui se passe dans la limo avec l’apparation de Piccoli, admettons, même si c’est un peu convenu et facile comme si Carax avait pour une fois peur qu’on ne le comprenne pas et se décide à faire de la pédagogie… or pour une fois que l’on comprend où il veut en venir, c’est dommage si ce n’est pour se faire encore plaisir avec Piccoli;

>   Piccoli n’avait pas trop envie de le faire. moi j’ai aimé. j’ai aimé comprendre. même si par la suite, j’ai moins aimé le film, avec encore de belles surprises. mais il dit un truc essentiel, Piccoli, mais j’ai oublié quoi. ah oui, sur les machines ? non, c’est Lavand qui répond sur les machines.

les deux scènes suivanest devant le Fouquet’s et dans l’hôtel, aucun intérêt;

>   fouquet’s : très grand intérêt pour le désir de révolution

>   hôtel : j’ai beaucoup aimé, beaucoup, la douceur de ce dialogue, cet amour, cet homme qui meurt

le sommet du creux que prend la fin du film c’est cette interminable scène (star oblige) avec Kylie Minogue en hôtesse de l’air et cette chanson horrible à la Michel Legrand, là on se met à rêver du bon vieux temps où que je n’ai pas connu où l’on pouvait commander une glace pendant le film histoire de passer le temps agréablement;

>   pas aimé non plus, mais beaucoup aimé la samaritaine (paris !), le souvenir des ouvrières, la mort d’un certain paris des galeries marchandes, walter benjamin, le XIXème siècle, la beauté de ces bâtiments

la fin quand il rentre chez lui, bof, ouais ok, y a du Max mon amour là-dedans, mais bon, il faut aimer les films anthropomorphisme;

>    magnifique, émouvant / rien à voir avec l’anthropomorphisme.et la cigarette avant de rentrer dans la maison. et la chanson !!! oh, cette chanson !!!

l’épilogue du film avec l’extraordinaire Edith Scob est excellent et les limos dans le garage (qui moi me font plutôt penser à « cars » ce qui a ravi l’ado attardé en moi) me confortent (si j’en avais besoin, mais non je n’en ai pas besoin, cependant je pourrais encore rajouter à ma panoplie de films un exemple à donner à des critiques ciné qui quittent les salles) dans l’idée qu’il ne faut jamais quitté un film avant sa fin, on ne sait jamais, une scène de fin peut sauver un film.

>   oui, c’est vrai, CarsCosmopolis, « où elles vont dormir les limos » ? hollywood, un rêve, une époque, et les moteurs dits ici saints !

Carax se fait plaisir, cela se voit, cela fait plaisir pour lui, on est presque soulagé de voir qu’il n’est plus/ne se sent plus maudit …

>    Malix se fait plaisir, ça fait plaisir pour lui !!! le mythe du carax maudit : un mythe de journalistes… si ça leur fait plaisir. cela dit, il en a bavé.

mais Dieu des artistes soi-disant incompris que cela a pris du temps pour lui, et Dieu du cinéma que ce film est long pour les témoins de sa renaissance!

>   ben, maintenant qu’il s’est mis au numérique, il va peut-être trouver son nouveau rythme : la vitesse ! et rattraper le temps perdu…

Bonne séance à ceux qui ne l’ont pas encore vu

> Allez-y et BIIIIIIIIses à toi

Malik

>    Véronik

Re : holy motors // pendant ce temps-là, sur facebook

  • Guy Mercier oui qu’est ce qui ne vous a pas plu, les gars ?
  • Fabrice Larcade qu’on en parle, c’est déjà trop !
  • Fabrice Larcade En gros, ça fait 30 que ce type peut faire des films révérencieux, mièvres et mauvais en nous rebalançant ses citations à la mode structuraliste (yeurk) parce qu’il a eu le douteux mérite de plaire aux petits pontes du cinéma français de Daney à Godard en passant par les scribouillards, conférenciers, directeurs d’institutions, et programmateurs encore éberlués par ce miracle bien français qu’est l’inepte Nouvelle Vague et donc très complaisants envers ses zélateurs tandis qu’il y a des cinéastes réellement intéressants qui galèrent financièrement pour faire des bons films et qui obtiennent une difficile reconnaissance quand (Allelujah) ça arrive.
  • Fabrice Larcade Alors le plan du poète maudit génial et iconoclaste, franchement…

holy motors // moins péri-périssable souvenir

Content d’avoir (après hésitationS) vu ce film: j’en garderai un souvenir moins périssable grâce à ce face à face enlevé d’impressions contrastées. Et ta critique me met de bonne humeur pour le reste de la journée...  si un jour j’avais imaginé que grâce à un film de Carax je sois de bonne humeur, je me serais quand même inquiété…
Bonne journée in Paris by day!
malik
PS. « cela dit, il en a bavé »: et nous aussi!!! 😉

Re : Re : holy motors // visitez son site!

J’ai écrit ailleurs:

http://homme-moderne.org/musique/carnet2/?p=4428

« visitez mon site »,

j’en meurs

Vôtre,

Guy.

—————————————

avant que mes yeux n’en meurent – mais que fait la police des polices, j’ai réussi à lire.
Touché!

malik

FORMAT FAUST « Grau, teurer Freund, ist alle Theorie / Und grün des Lebens goldner Baum »

veronik

Hier, Catherine et moi : Faust d’Alexander Sokurov
Vraiment bien aimé.
Véronique

NB : malik, j’ai rêvé ou le format de Faust est différent, nous n’étions pas très bien assises, au premier rang, mais il me semble que l’image était presque carrée.

dominik

Tu as raison, Véronique, pour le format de Faust. Pourquoi, tu sais ça, Malik ? ça situe d’emblée les choses dans un lointain passé, qui pourrait bien être notre avenir… Terre dévastée, solitude. Mais encore, sur un plan plus technique, que peut-on dire de l’effet recherché en adoptant ce format ?

Au premier rang, ça devait être quelque chose ! En particulier les dernières images. Cela mérite d’être tenté. Irai-je le voir une troisième fois ? J’aime beaucoup Sokourov – ce film un peu moins que d’autres (L’arche russe, Mère et fils, les trois premiers films de ladite « quadrilogie », et certaines Elégies, qui ne font pas partie de la rétrospective, hélas). Tellement dense à tous points de vue que je ne sais par quel bout l’aborder… Ce monument nous laissera-t-il sans voix ?
Dominique.

malik

Oui, le format de Faust est un format « normal », dans le sens de l’histoire du cinéma, quasi carré(1:1,33 pour le ciné ou 4:3 pour la télé), c’est le format des films muets jusqu’aux films dans les années 60, moment à partir duquel le format à commencer à se « rectangulariser ». D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez regarder ARTE le mois passé, les diffusions des films de Fassbinder, et remarqué que le format était aussi carré.

Le parti pris de Sokurov semble procédé ici d’un tout: il recolorie à la western-spaghetti la pellicule, il utilise des filtres et des lentilles spéciales un peu déformantes, ainsi le rendu des couleurs et du format ressemble à un vieil album photo (d’ailleurs les coins de l’écran semblent comme arrondis, genre super8), le but étant de mettre autant de distance que possible entre l’action du film et le présent, s’éloigner autant que faire se peut du réalisme sans altérer la réalité. Je dis cela d’un ton un peu péremptoire, il va de soi que ceci n’est que mon interprétation.

Le 2ème parti pris selon moi est d’encadrer la thématique de l’exiguïté dans laquelle vit Faust, les lieux comme son monde.

Il y a aussi une théorie qui court selon laquelle il rendrait ainsi hommage au Faust de Murnau qu’il considère comme un grand maître (certains disent même modèle…), mais comme je n’ai pas pour habitude de répandre des rumeurs, je donne donc cette théorie juste pour être complet.

Ceci dit, cette forme très apprêtée du film peut en agacer plus d’un-e. Moi j’adore: je suis un adepte de expressionnisme classique (dans tous les domaines artistiques et culturels) des années 20 principalement en Allemagne… et là, on peut s’y noyer à volonté, voire avec volupté…

Malik

PS. c’est cool d’avoir des retours sur Faust… je désespérais presque!

« Grau, teurer Freund, ist alle Theorie / Und grün des Lebens goldner Baum. »
(2038; Mephistopheles zu dem Studenten)

je n’ai pas la traduction officielle en français sous la main, donc en gros:

« Grise est toute théorie, cher ami / Et vert l’arbre étincelant de la vie »]

l’enfer : un désert de solitude, sans salut

Cher Malik,
J’ai pu voir Faust, sur tes conseils, avec Véronique, et en ai été ravie, sans trop savoir pourquoi. Très belles images, mais aussi cette phrase, si j’ai bien compris, concernant ce qu’est l’enfer, si on a  » vendu son âme » ( en a-t-on vraiment une ? enfin, on le croit) : l’enfer c’est …. » un désert de solitude, sans salut »!
Je suis bien d’accord avec ça.
Merci
Bise
Catherine
————————-

Je suis bien d’accord également chère Catherine!
Au creux de la nuit, et pour l’accompagner, un enfer plus épicurien:

Au delà de la Terre, au delà de l’Infini,
Je cherchais à voir le Ciel et l’Enfer.
Une voix solennelle m’a dit :
« Le Ciel et l’Enfer sont en toi. »

Rubayat, Omar Khayyâm, quatrain XV

Holy Carax // la beauté du geste

Dominique

 

Ce que Piccoli a dit d’important, ne serait-ce pas : « Peut-être n’aimez-vous plus assez ce que vous faites » ?
Dominique.

 Véronique

 

Oui, cette phrase est intriguante. Dans une interview Lavant explique qu’il a trouvée cruelle. Il l’a prise pour lui, Carax devant d’ailleurs, ajoute-t-il, au départ interpréter ce rôle. Mais, ce que j’ai surtout aimé c’est l’idée de continuer pour « la beauté du geste » :

Dans le film, Oscar dit continuer « pour la beauté du geste ». Est-ce  la clé du film pour vous ? Oui, cette phrase marche avec une autre : « La beauté est dans l’oeil de celui qui regarde. » Le film parle non seulement de l’art, mais aussi et surtout de la vie. La scène avec Michel Piccoli donne du concret à cette succession de personnages, on peut comprendre qu’il s’agit d’un cinéma sans caméra ou alors avec des caméras cachées. Et il y a aussi de la cruauté parce que Piccoli me fait comprendre que je suis peut-être un comédien fatigué. Surtout que Leos devait jouer le rôle de Piccoli au départ. Forcément, ça me touche personnellement. « La beauté du geste », pour moi, elle est très concrète : j’ai commencé par la danse, ma première expression, c’est le mouvement, la recherche de la grâce, de l’harmonie. Je me reconnais dans cette nécessité de créer du beau et de le donner à voir.

 Dominique

 

Ah oui, j’aime beaucoup ça, « la beauté du geste » ! Est-ce la clé du film pour moi ? Je n’en sais rien. Il faudrait que je le revoie pour trouver peut-être un début de réponse, et je n’en ai pas trop envie. Mais je te suis bien quand tu parles de la nécessité de créer du beau. Et tu en crées. Une de mes amies a aussi beaucoup aimé. Elle, c’est à cause du rapport de Carax à l’espace. Elle se sentait au bord du vertige (pas seulement à la fin), et cette sensation lui plaît.  
Bises,
D

cahun, corps – reine du neutre?

« Le visage, de profil et en miroir, de Claude Cahun», disait Alain.

N’est-ce pas qu’elle se voit ici, se voit et se montre, Autre pour elle-même ?

Cette réflexion m’est inspirée par un article très éclairant de Angelina Harari, AE en exercice, publié dans le dernier Quarto :

« Chercher l’Un du côté du parlêtre et non du partenaire a été ma réponse singulière : devenir cette Autre pour moi-même à chaque couple formé, sur le trait de la diversité des langues. » (( « Parler de manière vivante de la praxis lacanienne de la passe comme je me suis proposée de l’envisager, inclut nécessairement l’outrepasse, ainsi nommée par J-A. Miller. Celle-ci a affaire avec l’événement de corps, c’est-à-dire plus précisément avec la jouissance qui se maintient au-delà de la résolution du désir (Miller J-A, « L’Orientation lacanienne. L’Être et l’Un », enseignement prononcé dans le cadre du département de psychanalyse de l’université de Paris VIII, leçon du 18 mai 2011, inédit.) Les restes symptomatiques issus de l’assomption de l’interdit sont de l’ordre de l’existence, à la différence du désir qui est au niveau de l’être.
Chercher l’Un du côté du parlêtre et non du partenaire a été ma réponse singulière : devenir cette Autre pour moi-même à chaque couple formé, sur le trait de la diversité des langues. Être Autre pour soi-même, selon la proposition de Lacan dans « Propos directifs pour un Congrès sur la sexualité féminine » » (Lacan J. « Propos… », Écrits, Paris, Seuil, 1996, pp. 725-735.), devient dans mon parcours un savoir y faire avec l’Autre dont la racine est l’Un. Ce devenir cette « Autre pour elle-même » a un rapport avec le ça, c’est une façon de réduire la question de l’Autre du désir. »
Angelina Harari, « ‘L’effet de sens, il faut qu’il soit réel' »,  Quarto n° 101-102, L’art est une chose rare))

Autre pour elle-même, dans une nudité fœtale marquée par l’absence de cheveux et de poils par où elle rejoint l’embryon du Tao :

« Le yin naît naturellement dans le yang, le yang naît dans l’extrême yin ; chaque humain possède des énergies masculines et féminines et l’on doit viser au féminin, et à redevenir Embryon, c’est-à-dire un être à la fois doué de toute potentialité et Immortel ».  (( «La jouissance correspond au Chaos, lieu de la création et du renouvellement. […] Le yin naît naturellement dans le yang, le yang naît dans l’extrême yin ; chaque humain possède des énergies masculines et féminines et l’on doit viser au féminin, et à redevenir Embryon, c’est-à-dire un être à la fois doué de toute potentialité et Immortel. […]
‘Comment saurai-je que c’est là où se trouvent les germes de tous les êtres ? Par ceci’. Ceci, c’est-à-dire l’immédiat, le présent, le plus proche, notre corps, le ventre, l’embryon, la chose que ‘son nom ne quitte jamais’, ‘le nom permanent’, en réalité ‘l’Innommable’ représenté par le souffle originel. Parvenir à retrouver cet état originel correspond à une régression dans le temps jusqu’à ce temps mythique où tout est encore possible, qui correspond aussi à un point du corps où quelque chose de l’Embryon est encore là, qui serait notre vrai Moi, à la fois la Mère et son enfançon. Ce serait ‘obtenir le Tao’, passage obligé du Maître taoïste.» « Les amants célestes – Quelques remarques sur la sexualité taoïste au regard de la psychanalyse » par Nathalie Charraud )) 

Ne parle-t-elle pas de ce qui la lie encore à « la jouissance qui se maintient au-delà de la résolution du désir » ?

« Brouiller les cartes, dit-elle.  Masculin ? Féminin ? Mais ça dépend des cas. Neutre est le seul genre qui me convienne toujours. S’il existait dans notre langue on n’observerait pas ce flottement de ma pensée. Je serais pour de bon l’abeille ouvrière. » (( « La solution bouddhiste serait celle qui ne s’inscrit pas dans la volonté de castration de l’Autre, et qui en conséquence ne cherche pas refuge dans le narcissisme, elle assume un être-pour-la-mort (momie) qui ne court plus après le désir. Et effectivement, la sérénité corrélative à l’expérience de contemplation du Bouddha laisse penser que « cette figure prend le point d’angoisse à sa charge et suspend, annule apparemment le mystère de la castration » [Séminaire X, p. 278.]. S’il n’en est rien, c’est que l’objet a ne peut se réduire à un degré zéro du désir. Il y aura toujours un reste, quelque chose de réel, un bout de jouissance qui restera inassimilable par le signifiant, et qui dérangera tout sentiment de quiétude. « C’est ce qui nous empêche de trouver dans la formule du désir-illusion le dernier terme de l’expérience » [ibid p. 279.] dit Lacan. » Nathalie Charraud, « Lacan et le bouddhisme chan »  ))

Et quelle serait la nature de l’horreur, de mon horreur face à ses images ? L’horreur de la nature en répondrait-elle, en tant qu’ horreur du réel ? (cf l’horreur du fond de la gorge aperçu d’Irma), horreur dont ses photos sont l’aveu du goût ?

Et cet objet d’horreur ou d’angoisse, est-il le même que celui au genre neutre dont elle dit qu’il qu’il lui convient toujours – tiens, comme Barthes. Son éternel retour. Carte Cahun ? Reine du neutre.

«Me voici pure, vierge sans emploi, reine en grève, chômeuse volontaire, en marge et comme on dit au ban de l’humanité. Faites comme moi : Restez à la maison et mangez de la laine.»

Claude Cahun, Autoportrait, 1927
Tirage gélatino-argentique
19,5 x 14 cm
Musée des Beaux-Arts de Nantes

La voilà là, telle un nouveau-né d’un autre âge posé sur des coussins, apprêté, pris en photo et qui vous observe. Boudha sans sourire dont les mains nous indique la voie. Juxtaposition, assemblage du neutre et du semblant (discord et dissonance).

Et quel lien tracer de cet objet neutre auquel elle travaille et qui la travaille, objet donc qu’elle apprête pour en rendre la vision possible, soutenable, apprêt dont elle souligne le trait avec clairvoyance et ironie, à ce « ban de l’humanité » où elle se situe?  À ces images, celles-là sans le moindre attrait ni apprêt, qui reviennent à nombre de ses spectateurs, des rescapés des camps de la mort – dont on ne se risquera pas à dire qu’elle en fit un portrait prémonitoire.

cahun // et le boudha // la question de l’objet dans sa dimension asexuée

« Ce qui frappe d’emblée dans ces pages du séminaire X, c’est l’absence de tout exotisme : Lacan parle de ses interlocuteurs japonais sans aucune complaisance ni sentiment d’étrangeté. Ce sont des prêtres, des amoureux de la littérature, des professeurs semblables aux nôtres. Cependant, le fait que la scène relatée se déroule dans un monastère bouddhique, à Kamakura, devant une statue aux dix mille répliques qui se profilent dans un dédale de couloirs, donne au récit une certaine dimension onirique. La structure de ces pages n’est pas sans rappeler celle que Lacan met en évidence dans son commentaire du rêve de Freud intitulé L’injection faite à Irma. (( Séminaire II, chapitres XIII et XIV.))  Je rappelle que dans ce rêve, Freud fait appel à trois éminents confrères qui viennent tour à tour examiner Irma et confirmer le diagnostic d’infection dans la gorge, suite probablement à une injection faite peu de temps auparavant par l’un d’entre eux. Comme dans le rêve de Freud, trois hommes de savoir sont successivement mis en scène dans le temple japonais : un abbé du monastère qui lui énonce une phrase jugée pertinente concernant le rapport du sujet au signifiant (rapport qui passe par les pleurs et les gémissements, cf. séminaire X, p. 261 à propos de kwan), puis le guide japonais fort cultivé avec lequel on se penche sur le sexe de cette statue : homme ou femme ? homme et femme à la fois, ou plutôt ni l’un ni l’autre ! Et enfin le professeur qui donne la solution, non pas du sexe de l’être en question, mais de la raison du poli du bois de la statue, en particulier au niveau de la paupière : c’est le résultat de l’effusion des nonnes adoratrices de la divinité qui ont eu le droit de la toucher à travers les siècles. Le rêve de Freud converge vers la formule de la triméthylamine, formule énigmatique qui démontre, pour Lacan à ce moment-là de son enseignement, le rôle primordial de la lettre au sein du symbolique comme représentation condensée du désir, enchâssant un point de réel inassimilable, celui du refoulement originaire. La rencontre avec la statue bouddhique, avec sa capacité de susciter une émotion esthétique, conduit à une autre approche de la question du désir, qui met en valeur la figure du double et du miroir où la place de l’objet est renvoyée à l’infini, autre manière de marquer son inaccessibilité foncière. Un quatrième personnage en effet est là présent, un fidèle qui manifeste sa piété avec une ferveur qui retient Lacan, lui présentant ce que l’on peut ressentir comme émotion à la vue d’une telle statue, quand absorbé dans une contemplation apaisée. « Il l’a regardée ainsi pendant un temps que je ne saurais pas compter, je n’en ai pas vu la fin, car à vrai dire, ce temps s’est superposé avec celui de mon propre regard. C’était évidemment un regard d’effusion, d’un caractère d’autant plus extraordinaire qu’il s’agissait là, non pas d’un homme du commun, car un homme qui se comporte ainsi ne saurait l’être, mais de quelqu’un que rien ne semblait prédestiner, ne fût-ce qu’en raison du fardeau évident qu’il portait de ses travaux sur ses épaules, à cette sorte de communion artistique. » (( Séminaire X, op. cité, p. 262. ))
Comme Freud à propos d’Irma, Lacan nous livre ici un moment d’une expérience personnelle remarquable face à une statue, par l’intermédiaire non pas d’un rêve mais de la présence d’un double, un homme qui n’est pas un homme ordinaire. L’objet du désir file dans le dédale courbe des couloirs du temple, en une multiplicité qui n’est autre qu’itération du Un du même Bouddha, et dans les reflets à l’infini du miroir du double, pour revenir et s’arrêter l’espace d’un instant sur la figure de la statue de Guanyin. Même si l’ambiguïté du genre de la statue est évoquée, et si la fascination du fidèle fait penser à Dora devant le portrait de la Madone au musée de Dresde, ce n’est pas le mystère de la féminité qui est ici mis en avant, mais la question de l’objet dans sa dimension asexuée se glissant dans la confrontation du double au miroir où l’on reconnaît son propre désir. »

 « Lacan et le bouddhisme chan » par Nathalie Charraud

L’art est une chose rare

Sommaire

éditorial

L’art est une chose rare

Alain Géronnez : L’indice pensable
                          Du lit et du divan
Dirk Snauwaert : Indiscipline de l’art contemporain
Gérard Wajcman : All that fall
Pierre Malengreau : Ponge et Braque : « La toile du poète »
Yves Depelsenaire : Conquêtes de Marcel Broodthaers

Table ronde : Translation dans l’art contemporain

Carine Fol : art) & (marges : des oeuvres de vie
Table ronde : Art et institutions
Joost Demuynck : Nous sommes tous Outsider
Dalila Arpin : Marilyn, une femme d’exception
Jean-Claude Encalado : Lisette Model, Photographier avec l’oreille
Jolka Nathanaili : Les voix du réel dans l’oeuvre d’Anri Sala
Philip Metz : Conversation autour d’un objet

Table ronde : Des artistes lacaniens ?

Enseignement de la passe

Patricia Bosquin-Caroz : Trauma et événement de corps
Bernard Seynhaeve : Les avatars du transfert
Angelina Harari : « L’effet de sens, il faut qu’il soit réel »

Travaux

Marga Auré : Le corps du schizophrène
Pierre Malengreau : Du roman familial au réel de la famille
Daniel Voirin : « Le bruit des ciseaux »
Dossia Avdelidi : « Je n’ai jamais été insérée »

Un numéro, un livre

Valérie Loiseau : « Sukkwan Island » de David Vann

Conférences

Marie-Hélène Brousse : Corps sacralisé, corps ouverts : de l’existence, mise en question, de la peau
Catherine Henri : Professeur de l’être
Joseph Attié : Écriture et réel
Sonia Chiriaco : De la porosité entre rêves et hallucinations

ISSN: 0771 67 45 – ISBN : 78-2-930653-02-0
Prix : 25 €
Quarto, revue de psychanalyse, école de la Cause freudienne
éditeur responsable : Bruno de Halleux – 8 Place des Chasseurs Ardennais – 1030 Bruxelles – Belgique

BUY IT

INVITATION : Louis Soutter, mercredi 1er août

Les aoûtiens de Paris ne flanchent pas !

Mercredi 1er, 16h, expo Louis Soutter à la Maison Rouge, avec Alexis + Véronique + Guy (peut-être) + Jules (?) +…

+ Dominique

L’oeuvre de Soutter a été rangée abusivement dans ledit Art brut. Cf. ci-dessous un extrait de l’article de Wikipedia. La controverse à ce sujet est confirmée par un livre sur Soutter que j’ai feuilleté l’autre jour. 

En lien aussi avec « Il n’y a pas, il n’y a jamais eu d’Art brut », dans les archives du blog.

Wikipedia :

« Quand Dubuffet découvrit l’œuvre de Louis Soutter, il intégra aussitôt l’artiste dans l’Art brut et envisagea de lui consacrer le premier numéro des Cahiers de l’Art brut avec un texte de René Auberjonois, mais les réticences, le scepticisme de ce dernier quant à la place de Soutter dans ce mouvement firent que le projet ne se réalisa pas. Après réflexion, Dubuffet retira Louis Soutter de l’Art brut — il avait cependant suffi de l’intérêt porté en Suisse à l’Art brut (par tous ceux qui n’avaient pas de formation artistique et pouvaient « faire » de l’Art brut en toute liberté), de l’intérêt porté à celui des malades mentaux et des « fous », inconnus jusque-là, pour que Louis Soutter devînt un « fou » aux yeux du grand public.

Louis Soutter « dans » l’Art brut, à ce sujet aujourd’hui encore les avis sont partagés. Parmi ceux qui l’avaient rangé dans l’Art Brut, parmi les malades mentaux, tels Adolf Wölfli ou Aloïse Corbaz, certains voient toujours en Louis Soutter un « fou », d’autres l’ont rangé dans « un no man’s land unique, entre Art brut et art traditionnel », selon les termes de Dubuffet lui-même30. » Fin de citation.

 

Dominique

 

en parlant d’Adolf Wölfi, si vous passez un jour par Berne, une visite à la Fondation Adolf Wölfi,

Bonsoir,

en parlant d’Adolf Wölfi, si vous passez un jour par Berne, une visite à la Fondation Adolf Wölfi, logée au Musée des Beaux-Arts de la ville, pourrait vous intéresser: http://www.adolfwoelfli.ch/

Malik

fermeture

à la réflexion, dans l’après-coup, je constate que tout cela devient ingérable pour moi qui suis effectivement la seule à décider ce qui doit être publié ou pas, et à le faire, je décide donc de fermer le blog.

cordialement

véronique

 

De la part de Alain Gentes
Envoyé : mardi 24 juillet 2012 22:23
À : escapadesculturelles@yahoogroupes.fr
Objet : Re: [escapadesculturelles] Quarto 101-102

 Mouais ! Ça ne peut pas se passer comme cela! Si quelque chose plaît à l’un d’entre nous, il en parle, mais pas de commande ! D’autant que l’art ne me paraît pas une chose aussi rare! Il y a souvent quelque chose de l’art dans chaque existence .

Alain.

Envoyé de mon iPhone