J’aime prendre le temps de la découverte… et des retrouvailles

Je vais surement aller mercredi en début d’après midi, disons entre 14 et 15H30 au centre Pompidou pour une première visite de l’exposition de Munch.

Les impatients et les curieux, sont les bienvenus!!!

J’aime prendre le temps de la découverte… et des retrouvailles avec une exposition. Quelquefois il m’arrive de faire un premier tour, pour une vision d’ensemble… Et de revenir, quelques temps plus tard, voire plusieurs fois pour apprécier plus particulièrement certaines œuvres… me poser, dessiner, souffler après une longue journée… etc…

Quant à une rencontre de groupe, il semble que les dimanches d’octobre sont assez chargés…
Est-ce que chacun peut énoncer ses moments plus disponibles? Le samedi convient mieux à tout le monde?

Bonne soirée à vous!

Vanessa

derniers jours d’Instants critiques

Chers amis,

Encore deux jours pour voir « Instants critiques » au Théâtre 71 de Malakoff (métro ligne 13).

Mise en scène de François Morel, d’après Jean-Louis Bory et Georges Charensol, les deux compères de l’émission « Le masque et la plume » dans les années 70.

C’est très amusant et intelligent à la fois, chose rarissime, et on a le plaisir de retrouver des critiques de films de cette époque. Très bien joué aussi.

D

[dailymotion id=xj5p24]

http://www.dailymotion.com/embed/video/xj5p24_instants-critiques_creation
INSTANTS CRITIQUES par THEATRE71

l’art non plus que la femme, que le rapport dit sexuel

Chers tous,

L’appel du réveil a sonné. Mon iPhone, tel un enfant, me supplie de le prendre dans ses bras. Je n’y résiste point. Il me suffit d’une raison menteuse – nos échanges escapatoires ( échappatoires?) – pour dire oui, sans malaise, mais jubilation.

Qu’est-ce donc qui prime? Manipuler l’objet pour donner du plaisir au doigt?

Parler au mur de l’autre? Un alliage instable des deux, d’eux?

Qu’importe après tout, pourvu que ça ait lieu!

Alors y a- t-il de l’acte dans l’art? Probablement, à condition de poser que l’art n’existe pas plus que la femme, que le rapport dit sexuel? Il n’y a que des artistes! Mais qu’est-ce qu’un artiste? Je propose: est artiste d’aujourd’hui celui ou celle qui montre l’objet, non sous du beau, mais par la pudeur de l’énigme. Le regard est toujours impliqué, qu’en pensez-vous?

Mes pieds en ont marre de penser, ils demandent à aller se dégourdir les jambes, je leur obéis !

Bye bye,
Alain

Comment se repère l’Acte dans le livre de BHL

CONVERSATION AVEC BERNARD-HENRI LEVY, « DES GUERRES DU XXIe SIÈCLE », le 23 novembre 2011, à l’occasion de la sortie de son livre La guerre sans l’aimer

A la demande de Géraldine, je partage avec vous quelques notes prises lors de cette soirée. Au risque d’inexactitudes, car il s’agit de notes très lacunaires. Les interventions seront certainement publiées bientôt.

Dans son intervention, Anaëlle Lebovits repère un acte au sens psychanalytique dans le récit que fait BHL de la part qu’il a prise aux événements de Libye.

Anaëlle Lebovits montre en cinq points qu’il s’agit bien d’un acte :

  1. L’acte n’a de sens que quand manque la certitude. Ce qui est le cas ici. BHL fait part de ses nombreux doutes.
  2. Le choix est dicté par un impossible à supporter : devant l’impossibilité pour lui de laisser « l’ordre ancien » se maintenir, il prend le risque de la mort.
  3. L’opposition optimisme / pessimisme [qui partage l’opinion] a pour fonction d’inhiber l’acte. Il s’agissait d’opérer un dépassement dialectique, en prenant la juste position dans l’infime espace temporel qu’il avait pour le faire en emportant l’aval du Conseil de sécurité, ce qui était essentiel [avant que la Russie et la Chine ne mettent leur veto].
  4. Qui dit acte dit engager une livre de chair, ce qu’il appelle « l’emportement corps et âme » [p. 10]. Cela suppose d’engager ce qu’on n’a pas. Au-delà de ses biens (qu’il a engagés aussi), au-delà du risque encouru par le corps : en Libye, sa tête est mise à prix, en France, il suscite haine et méfiance, et le retour d’un « antisémitisme d’un autre âge ». Il reçoit des menaces de mort. Il lui faut se battre, ruser et gagner, pour rester en vie.
  5. Pour poser un acte, il faut s’en savoir responsable, soit s’en faire responsable. Il faut avoir cerné le mal en soi, ce qui évite de chercher un responsable en dehors de soi et d’éprouver de la haine.
    La solitude est la condition de possibilité de l’acte. Que BHL ait été accompagné de quelques « camarades » n’y change rien.

Réponse de BHL à Anaëlle Lebovits :

Cela va encore plus loin que l’opposition optimisme / pessimisme que vous relevez. Tout est fait pour inhiber l’acte, que ce soit par les administrations, par l’opinion… Comment déjouer cet empêchement acharné de faire, de décider et de dire ?

« L’engagement » des intellectuels est très galvaudé. Qu’est-ce qu’on met en gage ? Dans cette affaire, j’ai mis au clou des choses plus précieuses que ma vie : mon nom, ce que mon nom dit. Mes valeurs aussi, bien sûr. C’est un calcul + un pari.

Qu’est-ce qu’on met en gage, c’est la question qu’il faudrait se poser à propos de tous les intellectuels « engagés ». Cf. la préface de Sartre au Portrait de l’aventurier de Roger Stéphane. Sartre y oscille tout au long, il cherche le point de l’esprit où les deux positions peuvent se conjoindre. Il cherche la « révolte logique » [terme emprunté à ???]. C’est peut-être ce après quoi nous courons tous, nous qui sommes ici.

//

MISE à JOUR du 30 nov. 2011 : le texte d’annaëlle lebovits-quenehen est publié sur le site de la règle du jeu : http://laregledujeu.org/2011/11/26/7950/lacte-dun-ecrivain/

n’importe quoi et de la représentation à la présentation

Cher,
Chers,
Peut-être en réponse à Alain du matin, ce texte, long et vieux, que j’ai récemment retravaillé,
amicalement,
véronique

2 février 2006, 9:10 [8 novembre 2011]

 « Fais n’importe quoi. Point. Sans conditions. Fais absolument n’importe quoi. »*

* Et le « fais n’importe quoi » n’est jamais inconditionné mais il faut qu’il le soit. A l’universalité de l’échange, la loi de la réalité, il faut opposer, muette et incompréhensible, la loi de la nécessité qui est aussi nécessité de la loi. L’impératif « fais n’importe quoi » est un impératif catégorique.
Thierry de Duve,  Au nom de l’art,  “Fais n’importe quoi”, p. 129.

« Si, comme je le soutiens, “fais n’importe quoi” est bien un impératif catégorique, alors il faut aller plus loin et dire que l’universel est impossible, ou que l’impossible est aujourd’hui la modalité de l’universel. La phrase “fais n’importe quoi” ne donne pas le contenu de la loi, seulement le contenu de la maxime. Et encore ce contenu est-il quelconque et ne devient-il déterminé que par l’action qui met la maxime en pratique. Cela ne prescrit qu’une forme conforme à l’universel dans les conditions radicales et finales de la finitude. Et cela signifie : conforme à l’impossible. »
Ibid. pp. 133-134.

Des années que je me coltine ce « n’importe quoi » de Thierry de Duve et que je ne m’en dépatouille pas.

« Fais n’importe quoi » est pour lui l’impératif catégorique de l’art moderne.  C’est au départ de cette maxime qu’il analyse l’art moderne qu’il date, si ma mémoire est bonne,  à Courbet et à ses « Casseurs de pierre » et qu’il appuie sur une analyse fouillée de l’œuvre de Marcel Duchamp.

« Fais n’importe quoi », impératif catégorique, absolument sans condition : conforme à l’impossible. L’impossible, c’est, ce serait, l’impossible de l’universel. Expression-là probablement pour une part de ce qui m’aimante dans la proposition de Thierry de Duve. Le « n’importe quoi » seul permet de rendre compte de l’impossibilité de l’universel.

Quand le fond de l’enjeu de mon attachement à cet enseignement se situe probablement dans le fait qu’il s’agissait pour moi, qu’il s’agit pour moi, de trouver ce qui fait la valeur dans l’art, ce qui fait la valeur de l’art. Mon père étant artiste et n’ayant jamais moi-même eu l’impression d’avoir jamais rien compris à l’art, cet enjeu est certainement très capital. Qu’est-ce qui pourrait faire que l’art ça ne soit justement pas n’importe quoi.

Comment juger ? Juger de l’art ?

Continuer la lecture de n’importe quoi et de la représentation à la présentation

On n’arrête pas le désir!

Chère Dom, Géraldine, et les autres…

Merci pour ces notes précieuses. J’ai eu le sentiment, hier d’assister effectivement à un « évènement », à savoir une rencontre entre les intellectuels de notre temps, provoquée par Jacques-Alain Miller avec BHL, à propos de son livre « La guerre sans l’aimer » , JC Milner, Hubert Védrine, Eric Laurent, Anaëlle Lebovits, et des amis normaliens, donc entre Psychanalystes, Politiques et Philosophes. C’était un peu comme dans cet ancien temps, qui fait rêver, Althusser, Lacan etc. ou encore Sartre et, dont François Régnault nous parle de temps en temps. La question de l’humanisme n’en était pas absente, à travers bien des accroches, les guerres « justes » ou pas, la question de la vérité ou de la croyance, le combat communs contre les S1, les signifiants-maîtres qui nous aliènent en tant qu’ordre établi, la dimension de l’acte pour franchir cela et de ses conséquences.

J’ai été bien intéressée par un point qui a fait accord, c’est que ce n’est pas la victoire qui signe la justesse de la cause. Il y a des causes perdues, des « guerres oubliées » qui furent pourtant justes, et hurler avec les loups n’est pas à hauteur humaine.
Tout cela a été dialectisé d’une façon formidable qui a été filmée et sera sûrement diffusée.

J’en fus ravie. Petit détail amusant: Il nous a fallu forcer la barrière, puisque pourtant bien à l’heure, il n’y avait déjà plus de place dans la salle. J’ai dit que l’on ne pourrait arrêter ce désir d’être là, et me suis sentie suivie par quelques membres de l’École retenus aussi dehors. Alors, j’ai utilisé un subterfuge, faisant semblant d’être connue de BHL, qui était venu chercher un intervenant à l’extérieur, je l’ai interpellé. Étant courtois, il n’a pas dit le contraire, et nous nous sommes tous engouffrés. transgresser, franchir, c’est bon!

On n’arrête pas le désir!
Bises
Catherine Decaudin

l’art, la langue naturelle de l’artiste

Merci, eoik, pour ce texte où tu vas si loin pour tenter de te « dépatouiller » avec des questions aussi difficiles. J’en reste un peu saisie, il me faudra y revenir, et plus d’une fois. Je vais commencer par lire Thierry de Duve ! Et ce fameux catalogue de l’exposition de Bruxelles « 100 ans d’art contemporain », le trouve-t-on encore ?

Quant à la pulsion et au fantasme, ça a été mon sujet de cartels pendant dix ans (quel que soit le séminaire au travail, je mettais « pulsion et fantasme ») et, bien sûr, je ne m’en dépatouille toujours pas ! Les enseignements de l’Ecole en ce moment tournent beaucoup autour de ces questions de plus-de-jouir (que le « s » s’entende ou non) et d’objet a à la fin de l’enseignement de Lacan. Ce qui entraîne forcément la question de l’universel et du particulier (pas plus tard qu’hier soir). Mais toi, tu partages avec nous non seulement ce que tu as retiré de ton expérience analytique mais aussi de ton expérience de « fille d’artiste », et de tes longues réflexions sur l’art (comment peux-tu dire que tu n’y comprends rien ?)

Je reviens à l’un de mes tweets de l’autre jour, que tu avais d’ailleurs souligné, « L’artiste est sujet de l’art en tant qu’il met en jeu une pratique symbolique particulière pour traiter l’impensable de ce réel » (François Ansermet). Si l’on suit ce fil, ce qui ferait la différence (c’est mon hypothèse), ce qui ferait que quelque chose « est de l’art » ne tiendrait peut-être pas non plus tant que ça à l’objet au sens où il serait de l’ordre du visible (d’où il peut bien être « n’importe quoi »), mais à la position de l’artiste, à une certaine façon qu’il a de traiter le trou dans le symbolique qu’est l’objet. Alain Prochiantz disait aussi qu’à son sens les mathématiques étaient peut-être la « langue naturelle » du mathématicien, c’est-à-dire la langue qu’il parle, même si à première vue c’est la science par excellence qui n’a plus rien à voir avec une « langue naturelle ». Ne pourrait-on poser de la même façon que l’art est la « langue naturelle » de l’artiste ? D’autant plus que, souvent, l’artiste n’a rien à dire de plus sur son art.

Je sens que je m’embrouille, je m’arrête là !
Dominique.

Une soirée sur la Chine le 7 décembre à 21h 15

Une soirée sur la Chine le 7 décembre à 21h 15, au local de l’ECF, organisée par l’équipe de la bibliothèque (dont je fais partie). Il y sera question entre autres de l’écriture chinoise. Cette affaire de la calligraphie chinoise rejoint nos interrogations sur l’art et l’acte, si j’en crois les quelques lectures que j’ai faites. Cf. « L’unique trait de pinceau » du moine Citrouille-amère, dont parle Lacan. Bon, j’avoue que nous ne savons pas exactement ce que diront nos quatre invités, nous ne leur avons pas demandé leurs textes. Ce sera une surprise ! Mais je peux vous dire que ce sont des gens passionnants. Quelques précisions dans Babel n° 11, qui se trouve en pièce jointe et sur ECF-Alexandrie.

Dominique

**************************************************************
Babel n°11 – novembre 2011
Bulletin Apériodique de la Bibliothèque de l’École de Lacan-ecf
Sommaire :
– Soirée de la bibliothèque du 7 décembre 2011 : « Lire Lacan en Chine »
– Une offre de la bibliothèque aux responsables des Enseignements à l’ECF
**************************************************************
Vous trouverez le Babel n° 11 en attaché

**************************************************************
Soirée de la Bibliothèque
Mercredi 7 décembre 2011 à 21h15
1, rue Huysmans 75006 Paris

Le symbolique au XXIe siècle
Le signifiant vivant : « Lire Lacan en Chine »

Nathalie Charraud présentera un exemple chinois de pas-tout, tiré d’un commentaire de l’Art de la guerre de Sun-tsu.

Alain Cochard se propose de montrer que les références de Lacan à la culture chinoise et en particulier à Mencius répondent à des problèmes cliniques. Il prendra la courte référence à Mencius à la fin du Séminaire VII pour montrer qu’elle s’inscrit dans la question de Lacan concernant ce qu’on est en droit d’attendre d’une analyse menée à son terme.

Jean-Louis Gault fera le point sur les caractéristiques de l’écriture chinoise, en ce qui la distingue d’une écriture alphabétique et ce pour quoi elle a pu intéresser Lacan, qui était à la recherche d’une théorie de l’écriture, qu’exigeait la nature du symptôme chez le parlêtre.

Catherine Orsot-Cochard traitera des « pouvoirs de la cursive », en référence à la phrase de Lacan dans « Lituraterre », Séminaire XVIII, p. 120 : « Ça me fascine, ces choses qui pendent, kakemono, c’est comme ça que ça se jaspine, les choses qui pendent au mur de tout musée là-bas, portant inscrits des caractères, chinois de formation, que je sais un peu, très peu, mais qui, si peu que je les sache, me permettent de mesurer ce qui s’en élide dans la cursive, où le singulier de la main écrase l’universel, soit ce que je vous apprends ne valoir que du signifiant. »

On trouvera des échos des récents voyages de nos collègues en Chine dans Lacan quotidien n° 10, 27, 40, 42, 59, 73, 84, 90, 91, et dans Babel n°11 une brève bibliographie sur le thème de la soirée, disponibles sur le site : http://ecf.base-alexandrie.fr/
**************************************************************

 

« fais n’importe quoi! »

Eoik, Do, chères,

Admirable, ton texte Vero, je m’y retrouve un peu dans ce que dit Thierry de Duve « au nom de l’art ».

Je brûle d’envie de répondre de suite sur 2 ou 3 choses.

Devant le feu de cheminée, que je viens de réveiller, une fois de plus, c’est mon p’tit plaisir d’hiver, de taquiner la mort: vais-je pouvoir raviver le feu au petit matin à partir des cendres mourantes. Résultat, un nom possible de l’impossible pour moi : la mort ne meurt jamais. Tiens donc?

L’art, une pratique symbolique particulière du réel? En quoi? Et pourquoi pas singulière?

Je ne peux m’empêcher de faire entrer en résonance le « fais n’importe quoi » de l’artiste avec le « dis n’importe quoi » de l’association libre. Dis, fais n’importe quoi, et il n’en sortira pas n’importe quoi!

Donc, la différence n’est pas tant au niveau de la visée que du moyen: le « Bien-faire » pour l’artiste, le « Bien-dire » pour l’analysant. Peut-il y avoir rencontre entre les deux? Oui, comme entre un homme et une femme: ratée.

Je pose: l’art est une pratique du « Bien-faire ». Mais qu’est-ce que le faire? Là, je passe à une navigation à vue, sans GPS, hasardeuse. Je me risque: le faire est une pratique pulsionnelle malgré le fantasme, au-delà de lui! Que devient la pulsion au-delà du fantasme, se demandait Lacan? Provocateur, je réponds: une œuvre d’art!

Ça pourrait bien être une pratique de la pulsion, avec un objet particulier, mentionné une fois par Lacan, 2 ou 3 fois par Miller: la musculature, le mouvement corporel. ( je pense au « penser avec les pieds » de Lacan)

Autre point: pas d’art sans regard! Et

Pas d’œuvre d’art, si elle est « toute seule ». La réitération fait la série, ce qui fait sérieux et crée deux choses énigmatiques: ce qui ne se dit pas dans ce qui se trace; et la naissance du « traceur » dirais-je !

L’art, n’est-il pas une pratique du trait?

Il fait encore nuit, le jour se lève timidement , le feu est à point, et je vais laisser s’endormir mes pensées.

Bises
Alain

Tao : le faire sans nom n’ayant désir et le nom ayant désir

Cher Alain, en début de réponse à ta proposition sur le « faire » de l’artiste, ce merveilleux texte d’Eric Laurent sur le vide-médian où sont confrontés, en Chine, par Cheng et Lacan,  « le faire » et « le parler ».

A ce texte, et un peu paradoxalement, j’ajouterais : y aurait-il un lien à établir entre

.d’une part, l’opposition que découvre Lacan dans le Tao du dire et du fairele faire sans nom n’ayant désir et le nom ayant désir -, « dilemme » avec lequel il se demande « comment vivre?  », à quoi Cheng répond spontanément : « par le vide médian »

.et, d’autre part, le Witz  que préconise Duchamp quand il veut tirer le conséquences de ce que « le faire » n’est plus possible en peinture du fait que ce sont maintenant les machines qui font et que la peinture arrive « ready-made » ? Ce Witz lui ouvre-t-il la voie du Vide médian dont Lacan et Cheng s’attachent à « élucider la réalité »?

Et puis, tu vois, Dominique, moi aussi, on dirait, que je vais vers la Chine….

Bon dimanche à tous,

Véronique

le vide-médian

La Voie qui peut s’énoncer

N’est pas la Voie pour toujours

Le nom qui peut se nommer

N’est pas le nom pour toujours

Sans nom : Ciel-et-Terre en procède

Le nom : Mère-de-toutes-choses

La Voie/voix, en tant qu’elle est avant tout nomination puis l’effet de nomination, qui fait venir quelque chose, mais quoi ?, car c’est là où ça n’est pas grec : il ne s’agit plus de faire venir à l’être, mais à un certain usage. Le chinois n’est pas une langue indo-européenne, il ne connaît pas le verbe être, à la place de la copule il y a cette invention propre au chinois qui est que le mot Tao veut dire tout à la fois faire et dire, énoncer.

Et c’est une des histoires les plus extraordinaires de la pensée que révèle l’histoire de la pensée en Chine, où la pensée chinoise a réussi à accueillir l’être transmis par le bouddhisme sous le mode du vide, parce qu’il parlait le sanskrit, une langue indo-européenne, donc, impliquant l’être et le non-être, et que les Chinois ont mis quand même huit cents ans pour faire se rejoindre le Tao et le vide bouddhique. Ça a pris beaucoup de temps, et causé beaucoup de frictions dans les différentes écoles chinoises, pour ajuster deux notions qui n’avaient rien à voir, et pour en faire une création de discours, qui, elle, sera transmise au Japon, avec le bouddhisme que l’on appelle zen. La secte Chan a mis au point, précisément, une version un peu sophistiquée de cette combinaison entre le vide hindou et le Tao chinois.

Là nous avons la Voie/voix en tant qu’elle est d’avant la nomination, et Cheng dit qu’en lisant ce texte, Lacan dit : c’est merveilleux !, s’arrête, arrête Cheng et lui fait le petit schéma suivant :

Il lui dit : voilà, il y a le Tao, alors faisons deux registres, le faire –  le parler, ce qui est sans nom, ici – et le nom, ce qui est n’ayant désir, et ce qui est ayant désir. Lacan lui fait donc ce petit schéma, mais il dit tout de suite qu’« il s’agit maintenant de savoir comment tenir les deux bouts, ou plutôt ce que Lao-Tseu propose pour vivre avec ce dilemme. »

Et là, ce qui intéressait Lacan parlant avec Cheng, c’était la solution proposée, et, dans le témoignage de Cheng nous lisons ceci : « Sans trop réfléchir, je réponds : « Par le Vide-médian ». Ce terme de Vide-médian une fois prononcé, nous n’avons eu de cesse que nous n’ayons élucidé la réalité de cette notion fondamentale entre toutes ». Après avoir fouillé les sources, vérifié les interprétations, ils ont donc pu établir que le trois, chez Lao-Tseu, n’était autre que le Vide-médian. Or, à suivre Cheng, qui est ici le spécialiste, alors que, jusque-là, le trois n’avait pas beaucoup retenu les spécialistes de la pensée chinoise, qui s’arrêtaient au deux, à l’opposition du Yin et du Yang, cette interprétation est désormais adoptée par tous les sinologues ainsi que par les savants chinois eux-mêmes. (Cf : L’Âne,  p. 53). Ils se sont appliqués à observer les multiples usages du Vide-médian dans le domaine concret à l’intérieur d’une personne – c’est très précieux, le Vide-médian à l’intérieur d’une personne – dans un couple, entre deux tribus, (en se référant à Lévi-Strauss), entre acteur et spectateur au théâtre etc.

Voilà donc, dans le concret, où se situe le vide. Comment articuler le vide, c’est ce qui intéressait Lacan. L’usage correct du vide, de ce Vide-médian qui est une sorte de version du littoral, soit ce qui sépare deux choses qui n’ont entre elles aucun moyen de tenir ensemble, ni aucun moyen de passer de l’une à l’autre.

« Shih-t’ao n’a-t-il pas parlé d’Universelle Circulation ?, poursuivait-il. Cela explique peut-être que les Chinois aient privilégié la notion de sujet/sujet, au détriment de celle de sujet/objet, puisque tout métaphorisé que soit le sujet, ce qui importe à leurs yeux, c’est ce qui se passe entre les sujets, plutôt que le sujet lui même, en tant qu’entité séparée ou isolée. Là intervient encore, sans doute, le Vide-médian » conclut Lacan.

Eric Laurent, « La lettre volée et le vol sur la lettre ». Conférence prononcée au Cours de Jacques-Alain Miller : « L’expérience du réel dans la cure analytique » 1998-1999 (inédit). Publiée dans La Cause freudienne n° 43, « Les paradigmes de la jouissance », p. 22.

l’impossibilité du fer

et à votre sagacité, dans le fil de la proposition d’alain de l’art comme « faire » je propose encore ce court extrait de Duve (et j’en aurai fini pour aujourd’hui!) :

Ainsi, le readymade est de l’art à propos de la peinture avant d’être de l’art à propos de l’art. L’art de peindre, c’est l’art du faire, dit Duchamp, qui répète là une très vieille définition de l’art comme artisanat et habilité manuelle. Mais si l’industrialisation a rendu objectivement inutile l’artisanat, alors l’habilité manuelle est aussi ce que l’artiste sensible à l’époque doit ressentir comme impossible. Ce sentiment est, dans la peinture, même normale, sa « nécessité intérieure », la nécessité qui poussa Kandinsky et les autres pionniers de l’abstraction à abandonner presque toutes les conventions traditionnelle de la peinture, et qui poussa Duchamp à l’abandon du métier lui-même.

Fini le faire, reste le nom. Fini le tour de main, l’habilité, le talent, reste le génie, le Witz. A Denis de Rougemont qui lui demande « Qu’est-ce que le génie? », Duchamp répondit par un calembour : « L’impossibilité du fer ».

Puisque faire signifie choisir, le syllogisme de tout à l’heure conduit à la conclusion, cette fois, que le génie tient à l’impossibilité de choisir. Et puisque l’exemple exemplaire d’un tel choix impossible est un tube de bleu, un tube de rouge, il faudrait imaginer que le génie tient à l’impossibilité de choisir ses couleurs, d’ouvrir un tube, de commencer son tableau, de peindre. Génie de l’impuissance en lieu et place de l’impuissance du talent !

Thierry de Duve, Résonnances du readymade, « Le readymade et le tube de couleur » (1984-1989), Éditions Jacqueline Chambon, 1989, p. 127, 128, 129, 130

art et psychanalyse : la séparation de l’objet

Éric Rondepierre, Le Voyeur (Moires), 1996-1998, Courtesy Gallery RX
Éric Rondepierre, Le Voyeur (Moires), 1996-1998

 

Cher amis escapadants,

voici une proposition de travail pour le cartel « Art et psychanalyse »,  dont j’ai eu l’idée de je ne sais où, probablement dans tout ce que j’ai lu ou ressenti ces temps-ci, mais qui m’a marquée:
Un point commun entre la psychanalyse et l’art serait que cela permet dans les deux cas la séparation de l’objet, d’où l’effet de soulagement produit.

Bien à tous

Catherine Decaudin

Il n’y a pas, il n’y a jamais eu d’Art brut

Ce qui serait de l’Art… (et ce qui n’en serait pas tout à fait !)

Francis Berezné est né en 1946. Il dessine depuis toujours, même dans les moments les plus difficiles d’une vie tourmentée. Adolescent, il voyage, croquant sur nature tout ce qui se présente à lui. Pendant quelques années, il est assistant aux Beaux-Arts. À présent il s’intéresse aux relations du dessin et de l’écriture, et commence à réaliser des films expérimentaux. Après avoir été fou, le voilà qui revient en psychiatrie pour animer des ateliers d’arts plastiques.

Extraits du Dit du brut, de Francis Bérezné, éditions « La chambre d’échos ».

Mon ami Francis Bérezné, peintre et écrivain, est diparu en 2010. Le sous-titre de son livre Le dit du brut est Colère. Colère parce que, si « l’Art des fous et des marginaux » s’est vu reconnaître une place depuis que Dubuffet inventa le terme d’art brut en 1945 et créa une fondation pour l’abriter (devenue la Collection de l’art brut de Lausanne), il continue à être ghettoïsé. Cette colère est née, « un jour de 1967 en voyant les oeuvres de ces artistes [les grands, les reconnus] exposées dans la grande nef du Musée des Arts décoratifs, alors que bien séparée d’eux, dans des salles différentes, était accrochée la donation Dubuffet. » (p. 7).

« J’ai voulu battre en brèche un certain nombre d’idées reçues à ce sujet », continue-t-il. «Certaines dont je crains qu’elles n’aient la vie longue. En particulier que cet art ne peut s’inscrire dans une histoire de l’Art, sinon comme un genre tout à fait à part et bien singulier. Je pense au contraire qu’il fait partie de l’Art du vingtième siècle, au même titre que ses grands créateurs reconnus, et comme eux inspirant fortement la production d’aujourd’hui »

.

Conversation imaginaire entre Francis Bérezné et une amie :

« Je le vois [Dubuffet] dans Son Musée remplissant des cases, des tiroirs, des étages, aménageant Ses Collections, ouvrant des annexes aux Collections, inaugurant des à-côtés des Collections, éliminant les pas tout à fait ci ou pas tout à fait ça, dont Lui seul pouvait juger. Lui et les siens écartant ceux qui n’étaient pas dignes de participer aux grandes festivités de la création.

– Ce ne sont que des affabulations jalouses. Il n’était même pas conservateur du Musée de l’Art brut!

– Mais je me fous de l’Art brut ! Il n’y a pas, il n’y a jamais eu d’Art brut. Ce n’est qu’une de Ses inventions. Et pas des meilleures. Qui, après qu’on eut enfermé les fous, enfermait leurs œuvres dans un concept et un Musée, sinon à double tour et comme sous haute surveillance, du moins à consommer selon un strict mode d’emploi. En vérité, Wölfli créait comme n’importe quel autre artiste. […] Tenez, dites-vous que Wölfli est comme orphelin du reste de la création. » De Miro, en particulier, dont il serait éclairant de le rapprocher. En effet, « Ainsi que Miro et quelques autres il a fabriqué un monde où les signes se combinent comme un langage, se répondent d’un tableau à l’autre, se font écho, et nous tiennent un discours surprenant. » (p. 27-28). Même chose quand il s’agit de rapprocher Francis Palanc, artiste « brut » né en 1928, et Jean-Pierre Raynaud. « Mais avez-vous vu la gymnastique mentale et les détours que j’ai faits pour mettre Palanc et Raynaud en perspective ? les efforts sans compter pour déplacer la barrière que tous après moi se hâteront de remettre en place ? » (p. 29-30).

Or « ne croyez pas que l’asile soit étanche. Il y souffle le vent des grands bouleversements artistiques, sociaux et politiques. » (p. 46). Ledit « art brut » est « une pratique née avec la modernité et avec l’abstraction, avec le renouveau des arts. […] je revendique pour ces artistes le droit d’être regardés avec les mêmes yeux que tout autre […]. Leur spécificité n’est pas de faire l’envers ou le contraire de tout ce qu’ont fait l’art et la culture. Leur spécificité est d’être, comme tout artiste digne de ce nom, un parmi les autres et irréductible aux autres. » (p. 48).

Ah ah ! Qui va dire ce qu’est un « artiste digne de ce nom » ?

Les soulignages sont de moi.

Dominique.

LIENS:

http://www.francis-berezne.net/

http://lesilencequiparle.unblog.fr/2010/10/19/sur-lamitie-dans-la-psychiatrie-francis-berezne/

Peintures de F. Bérezné

Francis Bérezné et moi

Le 30/11/2011 10:55, véronique müller a écrit :

superbe artiste que je découvre, dominique, merci. oui oui finissons-en avec l’art brut, c’est un préalable nécessaire, en effet, finissons-en, ça suffit comme ça !

Le 30/11/2011 10:59, véronique müller a écrit :

enfin, heu, Raynaud / Palanc : il va fort ! sa gymnastique mentale, moi, j’ai un peu du mal à la refaire… (ça résiste dans les synapses)
😉

Le 30/11/2011 17:28, Dominique Chauvin a écrit :

> Je ne connais pas Palanc…
> Francis Bérezné s’explique sur son rapprochement hardi entre Raynaud et Palanc : « Il s’agit de comparer des choses a priori incomparables et d’en tirer quelque idée nouvelle sur un sujet. » (Le dit du brut, p. 29)
> « Au sujet des origines » [puisque, pour lui, il s’agit de ça], il trouve Palanc « bien bavard ».
> « Et au petit matin frais, en attendant que s’ouvrent les portes du Centre Georges Pompidou, voir le pot de Raynaud recouvert de ses feuilles d’or, et être touché précisément par le fait de n’y comprendre rien, un truc tout à fait propre à Raynaud, comme un idiotisme, et que ce soit Palanc qui déclenche le délire associatif qui éclaire le problème d’un jour nouveau, nous offre le début d’une solution, voilà évidemment qui donne à réfléchir.
> Regarder les travaux de Raynaud à la lumière de ceux de Palanc, est-ce en apprendre un peu plus sur cette œuvre, ou est-ce une folie ? (p. 31).
> NB. Je trouve le pot de Raynaud beaucoup plus beau dans son nouvel environnement, ou encore dans le jardin de sa maison (d’après les photos de Daphné), que sur le parvis de Beaubourg.
> Bravo encore, Véronique, pour ton travail d’édition, les liens que tu as été chercher, etc. Je suis touchée pour Francis. Merci.
> Dominique.

Le 30/11/2011 17:57, Dominique Chauvin a écrit :


Une photo récente… 
> Dominique.

 

Aux Arts, Lacaniens !!!!!!

Ah! super, tu seras là. Mais comment fais-tu pour être toutes les semaines à Paris? remarque, moi aussi, j’y étais même mardi pour la soirée des AE, mais je suis vannée, et surtout, je ne sais plus où j’habite?… mais contente! A demain. Bise
Catherine

Le 9 déc. 2011 à 21:34, Alain Gentes a écrit :

> À demain pour Klee Ex vivo In vitro !
>
> Envoyé de mon iPhone

 

Bonjour Chacune, Chacun,

Vous semblez tous aimer Woody Allen, ce qui en soi n’est pas étonnant, donc je ne m’étale pas sur ce fait, mais par contre, ce qui m’intéresserait vraiment beaucoup, c’est de savoir ce qu’il vous plaît dans son cinéma.
Je ne veux pas prendre trop de votre temps, et je ne fais pas une enquête scientifique, c’est juste par curiosité, donc juste quelques qualificatifs me suffiraient.

Bonne journée
Malik

__._,_.___

Activités récentes:

 

Merci pour vos impressions… en trois exemplaires: un hommage aux trois "ça" dont parlent Géraldine et Catherine (je ne sais pas à quoi cela se rapporte, je n’ai pas vu le film)?

Et sinon, vous aimez Woody Allen?
Malik

— Dans escapadesculturelles@yahoogroupes.fr, "gleuzasalomon" <gleuzasalomon@…> a écrit :
>
> Chers collègues d escapades,
> quelques impressions du filme de Woody Allen
> mes compliments et bonnes vacances a vous
> Gleuza Salomon
>
> Woody qui est a "Rome" ou il se fait le maître de la contingence s`y fusse possible!!! Ni parmi les dieux de l Olimpe Ils ont pu y être. Mais, lui fait l` Art de la contingence comme une invention de Kairos . L Amour et ses ailes s en volent parmi les beaux quartiers de la ville eternele, la Fontana de Trevi, ça m a frappé comme c etait un Frederico Felini mais plein de joie et de couleurs, les dialogues sont très perspicaces avec des drôles ponctuations psychanalytiques . C est fait pour rir. Ça m a beacoup amusée!!! et, encore les midias, les celebrités des choses nules, l homme ordinaire comme l’ héros hipermoderne,. Le jeunes de la campagne et le grand ville a la rencontre de l inattendue comme une riviére qui les pousse a des petites aventures. Le double de le l architecte, au dedans et au dehors de la scene, un autre, et aussi, un alterego, les pensées obsessionelles au vif et encore le type qui ne pensait qu a la mort et l autre qu y là- bas travaillait, le Directeur, agent culturel, producteur qui trouve le grand star en jouant avec l imaginaire/ reél de la retraite qui lui remets a la mort et a l art et encore a la débauche de tout le grand monde et de l espectacle.
>

__._,_.___

Activités récentes:

Re: et Re: Spielrein, Jung, Freud et le Néophyte

 

 Malik,

Impossible de ne pas te répondre, je m’y risque.

« biopic de qui ? » Jung, Spielrein (« joue purement ») et Freud à la fois, pourquoi pas, ça gêne qui ?
 
« biopic historique ? »  Mais oui, de tout ce que tu dis, si bien, oui : la tragédie austro-helvétique entre un père et un fils spirituel, la naissance d’une méthode de psychanalyse, la relation défendue et très originale depuis Adam et Eve entre un homme et une femme
 
« poli, léché, récuré… » Comme la Suisse ?
 
« pellicule immaculée remplie de libido » : si elle est remplie de libido, elle n’est certainement pas immaculée,  ou son immaculation est-elle rendue nécessaire du fait même de l’insupportable (pour le coup) en quoi aurait consisté sa présentation de façon « maculée » (drôle de mot)
 
« angles saillants, rentrants, aigus, pourquoi pas obtus ou nuls au lieu de ces angles plats et droits…» bien, ça c’est ton œil de cinéphile qui voit, et peut-être aurons-nous un jour l’occasion de revoir ce film ensemble, en vidéo, et que nous pourrons-nous arrêter, de sorte que tu me montres, car, pour ma part, ces choses-là je ne les vois pas.
 
« néophyte, Keira Knigtley, premières scènes… » : elles m’ont frappées également, et je les ai plutôt trouvées bien faites, je me suis demandée, et j’ai posé la question ici, sur quoi le jeu de l’actrice était basé, et comment, la folie, l’hystérie, ont pu à ce point changer de « comportement ». Je crois que ce qui est montré correspond à une réalité d’époque. Et j’étais frappée de la confrontation de ces corps : la folle, le médecin (tout droit, tout poli, tout léché, d’un machisme palpable). Qu’est-ce qui a changé les symptômes des hystériques ?
 
Bon, je dois filer,
 
V

————————————————————–

Véronique,

merci du retour.

Comme bien précisé dans le titre et tout au long de mon commentaire, je n’y connais rien en psychanalyse. Je vais donc voir un film qui entend me raconter une histoire, au contraire de Bruegel comme nous l’avons tous les deux remarqué dont l’idée n’est justement pas de raconter une histoire. Le problème donc avec ce film est qu’il n’est pas fait par un-e cinéaste sortant d’une école ou faisant son premier film. Si cela était le cas, j’aurais écrit, « comme trop souvent avec un premier film, le réalisateur veut tout raconter, veut tout mettre, et noie son sujet. » Mais Cronenberg n’est pas un néophyte lui. Et cela (me) dérange, non pas en tant que cinéphile (je n’ai jamais particulièrement aimé Cronenberg et ne suis donc pas déçu) mais en tant que simple spectateur. Il a voulu faire un film sous une forme classique, et bien il s’est retrouvé à faire un film qui raconte tout et rien, comme un gamin qui sort de l’école.

Comme je n’ai aucune idée de ce qu’est la talking cure, ni des débuts de la psychanalyse et de ses différentes écoles, comme je ne connaissais pas Spielrein, et ne connaissais que de nom Freud et Jung, je suis bien obligé de prendre ce film sous le seul angle qui fasse que je ne m’endorme pas jusqu’au générique: l’histoire entre un homme et une femme et éventuellement le clash entre un père et un fils spirituel. Soit. Les sujets les plus banals ne font pas de mauvais films, au contraire, mais il faut dans ces cas-là traiter cette chose traiter un million de fois de manière personnelle ou en prenant un angle particulier. De ce point de vue, le film n’est pas mauvais, il est nul. Zéro. Il n’y a rien. Aucune aspérité à laquelle s’accrocher ou réagir (en bien ou en mal peu importe). Rien de rien qu’une pensée pour les gens qui paient leur place pour voir ça.

Pour la « pellicule immaculée remplie de libido » c’est une antithèse oxymorique puisqu’une pellicule pour être visible doit être teintée d’images et (pour moi toujours), je n’y ai vu qu’un débordement de libido. Mais je me trompe certainement, je ne suis que spectateur, alors que toi tu es spécialiste du sujet (? s’il y en a un) du film.

Quant à « la Suisse », elle n’a jamais été polie, léchée et récurée, ceci est un fantasme populaire. La Suisse c’est le pays où les femmes venaient avorter quand cela était interdit dans le reste de l’Europe, c’est le pays où les gens ont le droit de mourir dans la dignité, là où c’est interdit ailleurs, c’est l’endroit qui a débuté en premier en Europe les traitements alternatifs pour les dépendants à la drogue, c’est le pays des montagnes sombres et menaçante de Ramuz, des mondes intérieurs tourmentés de Chessex, des empêcheurs de ronronner en semi-démocratie de Max Frisch et Dürenmatt, des manifestes politiques de Ziegler…et j’en passe.

Les scènes de Keira Knigtley: ta question est intéressante, j’aimerais bien savoir aussi sur quoi elle a basé son jeu. Et ton autre question « Qu’est-ce qui a changé les symptômes des hystériques ?« : en voilà un vrai sujet!

Bon début de semaine
malik

Re: Help! (Message personnel)

El 25 janv. 2012, a las 16:01, « Guy M. » escribió:

Bonjour je suis en réunion mais n’oublie pas d’acheter mes biscottes
Heudebert de préférence
Merci
Ton,
Guy.

—————————————

De la part de mariana alba de luna
Envoyé :mercredi 25 janvier 2012 20:56

Véro, pourrait tu m’acheter aussi mes tortillas? De préférence maiz et pas farine.

Muchas gracias 

Mariana Luna

—————————————

De la part de Guy
Envoyé :mercredi 25 janvier 2012 23:06

Back on topic

http://youtu.be/oqSpPyDuIZw

sorry, it’s in English again

Votre,

Guy.

—————————————

De la part de Véronique
Envoyé :jeudi 26 janvier 2012 00:26

really nice GUY ! thanks !

good night to to you ALL

véronique

Nota bene, pour ce qui est de l’english

Escapade, en anglais:

1 a wild or exciting adventure, esp. one that is mischievous or unlawful; scrape  

2 any lighthearted or carefree episode; prank; romp 
  (C17: from French, from Old Italian scappata, from Vulgar Latin ex-cappare (unattested) to escape)  

adventure, antic, caper, fling, lark    (informal)  mischief, prank, romp, scrape    (informal)  spree, stunt, trick  

et aussi :

Étymologie d’Escapade

Du vieil espagnol escapada, dérivé de escapar (« échapper »), du latin vulgaire excappāre («échapper»).

Définition d’Escapade 

escapade

Nom commun

escapade /ɛs.ka.pad/ féminin

  1. (Équitation) (Vieilli) Action du cheval qui s’emporte.
  2. (Par extension)Action de se dérober, de manquer à son devoir pour aller se divertir.
    • On avait beau le corriger quand les voisins le ramenait en carriole, l’habitude de ces fugues était prise. […]. Si une semaine s’écoulait sans escapade, on le voyait s’ennuyer, dépérir et fureter dans le logis pour trouver une issue. — (Francis Carco, L’Homme de Minuit, 1938)

Si une semaine s’écoulait sans escapade, on le voyait s’ennuyer, dépérir et fureter dans le logis pour trouver une issue

Edward Munch, Galopperende hest [Cheval au galop], 1910-1912 Huile sur toile, 148 x 120 cm

De la part de  Mariana

J’adore cette partie : « Si une semaine s’écoulait sans escapade, on le voyait s’ennuyer, dépérir et fureter dans le logis pour trouver une issue”. — (Francis Carco, L’Homme de Minuit, 1938)

C’est à faire figurer sur le haut du Blog !! Caramba !!!

olé !

~

De la part de Alain

Je suis d’accord avec Mariana, mettons cette phrase comme emblème de notre Blog !

le désir qui sauve de l’hémorragie de libido!

~

De la part de Catherine Decaudin

Oui, « échapper », c’est une façon d’être « Pas-tout », et « Pas-toute » dans la jouissance de l’Autre, en bref, un peu moins bête .

~

De la part de géraldine

Oui!!!! Tout à fait d’accord avec vous, sublime cette phrase!

Le blog Escapade a trouvé sa formule d’invitation!  Je vais voir de plus près de quoi parle ce livre (1938?).

~

De la part de véronique m

j’aime assez aussi l’action du cheval qui s’emporte

~

De la part de mariana

Géniale !!! Arre, arre caballo !!! 

~

De la part de véronique m

«  le désir qui sauve de l’hémorragie de libido! »mais… comment tu définiras la libido, toi ? alain ? que je comprenne bien…

~

De la part de Catherine Decaudin

C’est plutôt la libido qui va au galop!

Elle emmène son cavalier où elle veut aller, comme l’image freudienne du ça et du moi (P 237 Essais); 

mais, à ce train là, galoper vers des escapades, je veux bien, d’autant que, c’est vrai, il s’agit de s’échapper , d’échapper à toute forme de Tout…

Alors à bientôt, pour nos « escapades pas-toutes » .

Cath

~

De la part de véronique m.

… et aussi à “pas-toutes nos escapades pas-toutes” Clignement d'œil

~

De la part de Gentes

[Le 26 janv. 2012 à 19:30, Véronique a écrit : mais… comment tu définiras la libido, toi ? alain ? que je comprenne bien…]

Ah ! Ah!  Je veux faire le malin avec mes formules Un, plus rapides que mon ombre, tel un Lucky Luke sans cheval, eh bien, bien fait pour moi, encore une femme qui ne me laisse pas roupiller !

Libido? Libido? J’ai dit libido, moi? Est-ce que j’ai une tête de libido? Bon, alors, c’est quoi ce machin truc qui s’empare de notre tas de carne pour ne plus le quitter, sauf dans la mort ou la mélancolie? C’est une chose à Freud, présente dès sa correspondance à Fliess, chose sexuelle que s’empressera de désexualiser Jung. Voilà ce que j’ai trouvé en furetant mes livres, au lieu de dormir, ce qui serait évidemment plus raisonnable que de répondre à la fée du logis:  » manifestation dynamique dans la vie psychique de la pulsion sexuelle. »

Inutile de me demander où j’ai trouvé cela chez Freud, je vais vous le dire:  » Pschoanalyse und Libidotheorie », 1922, G.W, XIII, 220: SE, XVIII,244.

Dans le film  » A Dangerous Method  » on voit Freud s’intéresser à l’intuition de Sabina Spielrein sur une possible connexion entre amour et mort, à partir de sa propre expérience. Ce qui annonce la pulsion de mort, pas sans lien avec la libido chez Freud ( cf Au-delà du principe de plaisir , Malaise dans la civilisation ), lien que n’hésitera pas d’établir Lacan:

jouissance = libido + pulsion de mort,
donc
libido = Jouissance – pulsion de mort ! Et vogue le navire.

Je me frotte les yeux de sommeil.

Et là, Chaire Vé, tucon pr’en bi ain? Jes père queue non.

À l’un.

~

De : véronique m

En tous cas, je me suis bien amusée à te lire… merci!
Heu, et “libido = jouissance – pulsion de mort” , c’est dans lacan ça aussi?

Enfin, à vous lire, maintenant, chers Catherine et Alain, je me dis qu’éventuellement s’K’Al1  veut dire avec son « hémorragie de libido », c’est que “si libido (p)fuit,  transfusion de désir sauve?”

Bonjour!

Illu: Edward Munch, Cheval au galop, 1910-1912, Huile sur toile, 148 x 120 cm (photo @alintes)

les tomates au soleil OU ça …K’HommUnique

publication

Date: Thu, 19 Jan 2012 09:24:54 +0000
Subject: [[escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Correspondance d’escapades a publié un nouvel article intitulé :

cultivons ensemble notre autisme

Vous pouvez lire la suite de cet article à l’adresse suivante:

https://disparates.org/escapades/cultivons-ensemble-notre-autisme/

Vous recevez cet email parce que vous avez demandé à être notifié des
nouvelles parutions sur le blog.

Cordialement,
Correspondance d’escapades

—————————————————————————————————————————–alarmation

De la part de Mariana Alba de Luna
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 12:01
Objet : RE: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Chers escapadeurs,

Je ne comprends pas le sens de ce titre, il est trompeur. Comment pouvons nous « cultiver notre autisme ensemble » ?

Invitez-vous à un « autisme à plusieurs » ?

Danger et dérive, me semble-t-il…

Paradoxe…

Il me semble que Catherine a voulu faire référence à la fin de l’analyse, mais cela n’est pas clair de tout pour moi.

Un tel titre m’interpelle.

Mariana

—————————————————————————————————————————–rigolation

De la part de Catherine Decaudin
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 12:13
Objet :Re: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Effectivement, je n’ai jamais dit « ensemble »… C’est rigolo

Catherine

—————————————————————————————————————————–changeation

De la part de Véronique Müller
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 13:12
Objet : RE: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

d’accord, d’accord, mariana, je change le titre, il est de moi, c’était un joke…

quelque chose à proposer en échange ?

—————————————————————————————————————————– 😉

Le 19 janv. 2012 à 13:42, Véronique Müller  a écrit :

mariana,

bien sûr que catherine parlait de la fin de l’analyse, et d’un très jolie façon d’ailleurs…

mais, je dirais pour ma défense,

culture, se cultiver, cultivons, c’est le travail du désir, c’est un travail qui a du mal à s’accorder avec la jouissance, parce que le culturel, le culturé, cela qui demande culture, demande d’en passer par l’Autre, et donc de prendre quelques distances, quelque liberté par rapport à la jouissance (autiste toujours) (catherine dit « l’Un pas sans l’Autre », ça résonne avec « se passer du père à la condition de savoir sans servir ») (se passer de l’Autre, à la condition d’en connaître un bout sur son Un)

n’y a pas à se leurrer sur le rapport sexuel qu’il n’y a pas. le désir le fait être, et c’est tant mieux, et il faut trouver le moyen de le conjuguer aux contemporaines formes de jouissances qui se passent de l’Autre à tout mieux mieux. c’est un pari, qui ne se passe certainement pas de la culture, que je souhaite perçante. ce qui je crois peut se faire par un rappel du corps, un rappel à la vie du corps (un corps qui ne soit pas « photographié », comme disait Alain) et  qui soit désarrimé, désappareillé  de ses nouveaux gadgets. enfin, je blablate et tu sais tout ça.

mais j’ai ajouté un 😉 à la fin du titre : cultivons ensemble notre autisme 😉

alors, deal ? j’en change, de titre, mais vous m’en trouvez un autre, à cet article : https://disparates.org/escapades/cultivons-ensemble-notre-autisme/

—————————————————————————————————————————–adoucissant

De la part de Alain Gentes
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 15:25
Objet :Re: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Véro,

J’aime bien pourtant ton titre, son style provocateur.

Peut-être l’adoucir en mettant autisme entre guillemets ( pour dire qu’on y touche en fin d’analyse, avec le Yadl’Un, pas sans lien à l’Autre), peut-être aussi remplacer ensemble par  » à plusieurs » pour éviter l’ambiance groupe de  » ensemble ». Mais c’est moins beau que ta formule!

Peut-être seulement les guillemets!

Al
Envoyé de mon iPhone

—————————————————————————————————————————–vérité

De la part de Mariana Alba de Luna
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 15:29
À : Escapades Culturelles
Objet :RE: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Véronique,

Les Uns de la fin de l’analyse sont pour moi justement des Uns qui sont sans Autre, qui résonnent avec la destitution de l’Autre comme idéal, adresse et causalité de tout.

Des Uns qui surgissent après avoir passé par un « L’Autre n’existe pas », qui est si difficile d’accepter, lâchant la jouissance que cela implique de toujours être en prise à son ravage.

Ces Uns, ne renvoient plus à L’Autre mais à notre propre responsabilité d’exister.

Donc je ne partage pas ce : « L’Un pas sans l’Autre » qui n’est pas de tout la même chose que « se passer du père à la condition de s’en servir ».

Mais ton expression « se passer de l’Autre à la condition d’en connaître un bout de son Un » racine de son être et choix subjectif, mais paraît intéressante.

Les Uns, le père, autisme, on mélange tout là.

On ne se désappareille pas des bouts de la langue auxquels le corps a été attaché, on desserre le lien, on le subvertit, on lui fait faire une torsion, voilà pour moi l’opération de la fin, ces Uns qui on entend autrement et que nous choisissons d’extraire, encore autrement.

C’est une question complexe, en effet. J’avance sur ce chemin, les Uns qui sont des restes, des lettres asséchées à presque rien et qui ne renvoyant plus à autre chose, ni à l’Autre mais à ma propre existence, jouissance et désir face à l’impossible. Chemin assez solitaire, difficile mais certainement pas autistique et pas d’ensemble face à ça.

Je ne souhaite pas cultiver mon autisme, mais plutôt mes tomates au soleil.

Mariana

—————————————————————————————————————————–anorganisme

De la part de Guy M.
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 16:38
Objet :RE: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

je trouve que l’expression « cultivons ensemble notre autisme » décrit
parfaitement bien l’expérience internet
on n’y est jamais « ensemble » et on multiplie les outils pour ne pas l’être
mais surtout pour se donner l’illusion d’un rapprochement, une pseudo
présence forcée techniquement,
vaine, puisqu’il n’y a pas de corps
ou le corps sans organes comme disaient les duettistes D&G, mais à propos
de la radio je crois
là on n’a même pas la voix, c’est muet
ça communique mais il n’y a personne
je ne suis pas avec vous sur twitter
je ne suis pas avec vous sur facebook
je ne suis avec vous sur le blog
je ne suis pas avec vous sur cette liste de discussion
quand j’écris je suis avant vous, les uns après les autres et jamais
ensemble non plus ce pseudo vous
quand je lis je suis après vous
mais jamais « là »
Votre,
Guy.

—————————————————————————————————————————–privation

El 19 janv. 2012, a las 17:18, Véronique Müller escribió:

catherine me propose d’enlever « ensemble » 😉

mais je crois que je vais plutôt laisser tomber, c’était juste un clin d’œil, prenons comme une private joke escapCult. c’est bien que mariana ait réagi.

enfin, je peux pas le faire maintenant parce que j’ai plus d’accès à mon internet sur mon pc.

—————————————————————————————————————————–moi&moi

De la part de Véronique Müller
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 17:19
Objet : RE: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

 

Véronique,

  • Mariana,

Les Uns de la fin de l’analyse sont pour moi justement des Uns qui sont sans Autre, qui résonnent avec la destitution de l’Autre comme idéal, adresse et causalité de tout.
Des Uns qui surgissent après avoir passé par un « L’Autre n’existe pas », qui est si difficile d’accepter, lâchant la jouissance que cela implique de toujours être en prise à son ravage.
Ces Uns, ne renvoient plus à L’Autre mais à notre propre responsabilité d’exister.

  • OUI. j’essayais de dire aussi quelque chose du désir. mais ça n’est pas clair encore.

Donc je ne partage pas ce : « L’Un pas sans l’Autre » qui n’est pas de tout la même chose que « se passer du père à la condition de s’en servir ».
Mais ton expression « se passer de l’Autre à la condition d’en connaître un bout de son Un » racine de son être et choix subjectif, mais parâit intéressante.

  • mon expression est insuffisante.

Les Uns, le père, autisme, on mélange tout là.

  • non, je ne pense pas. moi-même j’ai parlé d’autisme, à cause de l’autisme de la jouissance, du réel. L’un, c’est ce qu’il y a, c’est l’impossible du père. L’un est sans Autre, sans le père. L’un est holophrastique. Il est répétition du même. Ses reflets, ses doubles dans le signifiant sont repérables, et multiples. Mais l’un est sans double. Il ne s’agit ici que de quelque chose que j’essaie de dire. Je pense que ce qui est à traquer, ce sont les faux-doubles du Un.

    (je dis ceci en pensant à mon « muller et muller », dont j’avais parlé ici autrefois, ce rêve, dont je me réveille en sursaut, horrifiée « muller et muller ! mon nom, celui de mon père ! mais c’est le même ! c’est l’holophrase ! comment séparer le même du même ? » ce que j’essaie de formuler ici, c’est un dit de ma mère, épelant notre nom « M – U – double L – E – R ». Comment j’ai été marquée par ce « double L ». Ce double est une invention de l’Autre. Qui m’a portée à manger les choses en double, à craindre de doubler, à craindre d’être en double, à me percevoir, me jouer comme étant l’enjeu de deux hommes – et si ces deux n’étaient pas ? qu’étais-je moi ? que restait-il ? rien, rien, rien, comme si j’étais hors du compte… plus tard, à poursuivre Miller de mes assiduités : lui : M . I . double L . E . R.  Moi : M . ü (double points) . double L . E .R.) (mais la séparation de l’un et de l’autre éclaire l’existence.  )

On ne se désappareille pas des bouts de la langue auxquels le corps a été attaché, on desserre le lien, on le subvertit, on lui fait faire une torsion, voilà pour moi l’opération de la fin, ces Uns qui on entend autrement et que nous choisissons d’extraire, encore autrement.
C’est une question complexe, en effet. J’avance sur ce chemin, les Uns qui sont des restes, des lettres asséchées à presque rien et qui ne renvoyant plus à autre chose, ni à l’Autre mais à ma propre existence, jouissance et désir face à l’impossible. Chemin assez solitaire, difficile mais certainement pas autistique et pas d’ensemble face à ça.

  • Oui, c’est ça que je voulais dire. Il s’agit d’extraction, de séparation. Et alors, l’existence. 

Je ne souhaite pas cultiver mon autisme, mais plutôt mes tomates au soleil.

  • essentiel 😉

Mariana

    • oui
      (j’ai oublié d’aller chercher mon fils à l’école !!)

—————————————————————————————————————————–LoL

De la part de mariana alba de luna
Envoyé : jeudi 19 janvier 2012 19:53
Objet :Re: [escapadesculturelles] [correspondance d’escapades] cultivons ensemble notre autisme

Magnifico ! Je te dirais plus tard ce q cela m’évoque.

Dans ce redoublement que tu choisit pour fixer ta jouissance dans la nomination, dans ces LL , il y a aussi peut être à entendre une recherche pour cerner ton  : ELLE. 

Zut, faut pas q n’oublie de faire diner mes vampiritos ! 

Mariana
Enviado desde mi iPhone

 

[affaire à suivre…]

Est-ce capadecapable ?
Je rentre de ma solitude lègeoise, où le froid se chamaillait avec le soleil sous quelques larmes du ciel. Je scrutais mon iPad pour quelques trésors d’escapades parisiennes…Qui vinrent finalement sous la plume de Cath.
Décidément, l’écriture de l’Un fait exister à l’Autre ce qui n’a pas eu lieu pour lui. Merci pour cette navigation du Miroir, de l’île du réel au port du symbolique, et retour.
Le programme des 2 semaines suivantes est chargé: les Bonnes de J. Genet, le débat avec Ansermet, les archives avec Benjamin et  le café psychanalyse avec les « Bonnes de J.Genet et MHB.
Clin d’œil à tous !

Alain

Pourquoi « Platonov mais… »?

J’aime ta question Vé! 

Les mystères des choix d’escapades!!! Pourquoi « Platonov mais…« ?

C’est à partir de ce que nous indiquait Marion lors de la soirée Fineggans au théâtre de l’aquarium que j’ai retenu le titre de la pièce, que je ne connaissais pas. J’ai fait quelques recherches sur le net et, le sujet, l’histoire m’ont intéressée. C’est donc à Marion, à son enthousiasme contagieux et à ses yeux pétillants de passion pour cette œuvre que nous devons cette proposition! (le détail du mémoire donné par Dom m’avait échappé.)

Voilà chère Vé, les escapades les plus riches pour moi naissent de ces moments indéfinissables, qui surgissent tout à trac, qui nous animent du désir d’un(e) autre, d’un désir à l’autre, au croisement d’une transmission souvent inconsciente de ce qui nous touche et nous tient à coeur, que nous souhaitons partager et qui fait écho…C’est d’une certaine manière le fruit d’une mise en commun des désirs qui nous tiennent!

Bises

Géraldine. 

‘Title One, The Tasks of the community’

Oui, oui, Mariana, à bien vite pour ton anniversaire à la mexicaine, caramba! J’ai bien noté pour le 24. 

Pour l’heure je me trouve dans une ambiance enneigée mais chaleureuse à Vilnius, en Lituanie! C’est très dépaysant, le centre historique est préservé, et il y a beaucoup d’endroits à visiter qui témoignent des différents moments de l’histoire tourmentée de ce pays de l’est peu connu.

Je suis allée au Contemporary Art Centre où plusieurs artistes étaient exposés.

Une installation dans un grand espace quasiment vide pour laisser toute la place à un film projeté sur un mur et à quelques photos en boucle sur un autre mur, sur un reportage sur Tchernobyl, a retenu mon attention, et traitait de ce drame majeur du nucléaire dans un état tout proche d’ici dont on ne parle plus guère aujourd’hui, à travers une reconstitution minutieuse et fournie à partir de témoignages, dont ceux de reporters morts depuis, dont les films ont été censurés ou ont ‘disparu’. Un rappel à l’ordre du réel qui n’est pas sans rappeler les événements tragiques de Fukushima et les faits de censure qui touchent ceux qui cherchent à en parler.

« Rossella Biscotti is an italian artist based in Amstedam whose artistic oeuvre encompasses performances, videos, photographs and sculptures. Her work is based on a process of layered narratives that involve long periods of research on-site, interviews, and archival findings. In Biscotti’s art, the starting point of a work is always a social or political event that has been removed from the collective memory and she transpose in a subtle interplay within the present and contemporary society. »

L’art comme engagement politique, après Ai Weiwei et la Chine, Rossella Biscotti et son exposition en Lituanie: ‘Title One, The Tasks of the community’, a des choses à dire sur les conséquences de l’usage de l’énergie nucléaire, 26 ans après Tchernobyl. 

 http://www.cac.lt/en/exhibitions/current/5611

A bien vite à Paris.

Bises. 

Géraldine.

De l’art et de l’acte

L’entretien avec Jean-Pierre Raynaud paru dans La cause du désir n° 80, p. 118-130 (revue de l’ECF, nouvelle version) est une mine pour travailler cette question.

« C’est sur ce versant que j’attends les artistes, qu’ils prennent le risque d’aller jusqu’au bout, sans pour autant faire n’importe quoi, ni créer de confusion. L’art peut servir de détonateur et, du coup, la responsabilité de l’artiste est très importante. Il faut s’affranchir de la censure et prendre ses responsabilités, mais on ne peut pas, sous couvert d’art, faire n’importe quoi. Il faut à l’artiste une ligne claire, une intégrité, une éthique. (…). C’est là que se pose la question du but d’une œuvre d’art. On ne le sait pas très bien, on ne sait pas à quoi ça sert ni ce que c’est. La Maison a eu un statut artistique parce qu’on ne lui en a pas trouvé d’autre, et je l’ai assumé comme tel, sachant que ce n’était pas un objet d’art comme les autres. Du reste, je lui ai fait subir un autre destin que de terminer dans un musée comme les momies égyptiennes. » (p. 128-129).

On sait que, cette Maison, après avoir consacré vingt-cinq années de sa vie à la métamorphoser, Jean-Pierre Raynaud l’a détruite lui-même :

« A moi, la beauté ne fait pas peur. Je me dis au contraire que plus la chose sera belle, plus sa disparition sera intéressante, puisque c’est de la disparition de la beauté elle-même qu’il s’agit alors. Plus la chose est parfaite et plus j’ai de jouissance à sa disparition…  » (p. 124).

De l’art et de la fin de l’analyse

Dans le fil de ce que vous disiez à ce propos, je ne peux résister à y aller d’une petite citation de Lacan :

« Disons pourtant la fin de l’analyse du tore névrotique.

[…]

De tout cela il (l’analysant) saura se faire une conduite. Il y en a plus d’une, même des tas, à convenir aux trois dit-mensions de l’impossible : telles qu’elles se déploient dans le sexe, dans le sens, et dans la signification.

S’il est sensible au beau, à quoi rien ne l’oblige, il le situera de l’entre-deux-morts, et si quelqu’une de ces vérités lui parest bonne à faire entendre, ce n’est qu’au mi-dire du tour simple qu’il se fiera. » (« L’étourdit », Autres écrits, p. 487-488.)

Ce qui me renvoie encore à quelques citations de Jean-Pierre Raynaud : 

« ça ne m’a jamais plu de vivre. C’est comme ça. Dans la création, c’est autre chose. La création, pour moi, c’est une ivresse. Quand je remue des mètres cubes de terre, je ne pense à rien. (« L’intime et la matière ». Entretien avec Jean Pierre Raynaud », Revue La cause du désir, n° 80, p. 122.)

« A moi, la beauté ne fait pas peur. Je me dis au contraire que plus la chose sera belle et plus sa disparition sera intéressante, puisque c’est de la disparition de la beauté elle-même qu’il s’agit alors. (…) Je ne fais pas disparaître les choses parce que j’en ai assez, je les fais disparaître pour les protéger de la décrépitude. Un autre raccourci, contrasté, est celui de la vie : naître pour mourir. Il n’y a que le début et la fin qui peuvent être intéressants. » (op.cit., p. 124). 

« L’art est d’abord un moyen de sauver ma peau. » (op. cit., p. 125.)

RE: De l’art et de la fin de l’analyse

Chère Dominique,

« Disons pourtant la fin de l’analyse du tore névrotique.

[…]

De tout cela il (l’analysant) saura se faire une conduite. Il y en a plus d’une, même des tas, à convenir aux trois dit-mensions de l’impossible : telles qu’elles se déploient dans le sexe, dans le sens, et dans la signification.

S’il est sensible au beau, à quoi rien ne l’oblige, il le situera de l’entre-deux-morts, et si quelqu’une de ces vérités lui parest bonne à faire entendre, ce n’est qu’au mi-dire du tour simple qu’il se fiera. » (« L’étourdit », Autres écrits, p. 487-488.)

C’est tout de même curieux cette idée de Lacan sur la fin de l’analyse, la sensibilité au beau et l’entre-deux-morts… Je n’y comprends pas grand-chose. Est-ce du beau qu’il dit que l’analysant le « situera de l’entre-deux-morts » ? Ah, il faut que je relise ce texte de l’Etourdit, de même que ce que Lacan peut dire ailleurs de l’entre-deux-morts.

Si je te comprends bien, le rapport que tu fais à JP Raynaud se situe là : « Un autre raccourci, contrasté, est celui de la vie : naître pour mourir. Il n’y a que le début et la fin qui peuvent être intéressants » ?

Mais, s’agit-il d’une position de fin d’analyse ? (est-ce que ça ne ferait pas plutôt un bon (mais dur) début… 😉 ) Je trouve tellement tristes ces propos de Raynaud. Détruire pour ne pas connaître « la décrépitude » ! L’art certainement le sauve, ainsi qu’il le dit, de même que son idée de la beauté ; cependant ne serait-ce pas par trop restrictif que de situer le beau comme ce qui échappe à la décrépitude ? Et l’entre-deux-morts lacanien se situe-t-il de l’entre « naissance et mort » (faisant équivaloir la naissance à la mort), dans ce « naître pour mourir » qu’il dit ?

Nous serions une fois de plus ramenés à la lecture d’Antigone !. Ainsi qu’à une lecture de la beauté renvoyée aux classiques ! Quand je m’étonne de trouver ce terme de beau dans les propos de cet artiste, alors que la beauté dans l’art s’est tellement vue remise en cause, et par lui aussi me semblait-il, au moins pour le (trop) peu que je connaisse de son œuvre : son gigantesque pot doré dans la cour de Beaubourg, que jamais il ne me serait venu à l’esprit de qualifier de beau. Probablement n’y ai-je jamais vu que la critique par un artiste de l’institution muséale, à laquelle il appartient par ailleurs.

Dans la hâte de te voir et discuter bientôt avec toi « in real life », je t’embrasse,

Véronique

//

Chères Véronique, Dominique et catherine,

1-Je crois que la beauté est de l’ordre de l’hypnose, une sorte de masque de l’objet, de l’abject, c’est-à-dire le moment où I et a sont confondus, c’est le moment amoureux aussi bien. Ce n’est pas pour rien que Lacan indique dans la note sur l’enfant de se maintenir suffisamment éloigné de I et de a.

2- Dans un article intitulé “ désirer s’insérer” paru dans un Feuillet du courtil ( à vérifier ), JAM présente la naissance du sujet comme équivalente à sa mort, soit sa mortification sous un signifiant ( S fixé à S1). Sa renaissance n’est possible qu’à ce qu’il décolle de S1, par l’articulation de ce dernier à un S2: Ouf, sauvé! En devenant un manque, que vient représenter un signifiant pour un autre. L’effacement de l’un apparaît comme origine, et vogue la délicieuse galère entre les deux morts ( la première qui donne naissance au S barré, et la seconde, réelle.)

3- la beauté, par exemple de l’acte, n’est que le masque de son horreur, son refus?

Voilà ce qui me vient à l’esprit, à vous lire sous le crépitement du feu de cheminée.

Bonne soirée, mesdames, et samedi!

Alain

//

ah bien merci alain
pour ces réflexions du coin du feu

ping pong :

en 1- tu ou vous, je m’en rends compte, n’avez crainte de mettre des mots où je refuse, encore. par ailleurs, je crois qu’il est vrai que la beauté a cessé, au moins en certains endroits de l’art, contemporain s’entend, d’être ce qui compte (levée des voiles, du masque justement) (du fait de la chute ( ?est-ce le mot) de I, l’idéal

en 2 – je trouve ça très intéressant ce que tu dis. ça n’enlève rien cependant à la tristesse des propos de raynaud? ou non ? ou la délicieuse galère « La création, pour moi, c’est une ivresse. » a-t-il trouvé à la vivre (la métaphoriser ?) dans son art ?

3 – décidément, à l’acte, de l’acte, je ne connais rien

bonsoir alain, bonsoir à vous tous,

véronique

//

Eh oui, Véronique, la tristesse reste, parce qu’est refusé le comique phallique: il ne veut pas voir faner une fleur, il veut la montée en puissance mais pas la descente ! Plutôt détruire que voir vieillir!

L’acte est du domaine du réel, normal qu’on y comprenne pas grand chose. Par exemple, est-ce un acte de n’être?

Bonne nuit Véronique, bonne nuit aux lecteurs.

Alain

burlesque

Bonjour

Je tombe par hasard sur ceci
http://www.lemonde.fr/culture/article/2012/03/09/la-culture-plus-on-la-consomme-plus-on-a-envie-d-en-consommer_1655773_3246.html

Le genre d’article qui me donne envie de balancer une brique dans mon pc

« ou simplement être plus productif au travail grâce au plaisir que vous avez ressenti. En bref, vous serez un meilleur citoyen et cela va profiter à la société. »

Quelle horreur
Quelle honte

Votre,
Guy.

 

//——————————————————————-

 

 Je préfère :

La culture / C’est comme le riz / D’abord c’est dur / Ensuite c’est cuit… 

(in « – je peux / – oui« , d’ Yves-Noël Genod).

 

Dominique.

 

//——————————————————————-

 

 Eh bien oui, cher Guy, si le capitalisme investit dans la culture ce n’est pas pour nos beaux yeux! Il sait sur quel bouton appuyer pour nous faire jouir et produire comme il veut. Il sait même perfectionner cela en s’appuyant sur Freud ( la sublimation, qui a des effets thérapeutiques), sur Marx ( la plus-value) et maintenant sur Lacan ( le plus-de-jouir). On appelle cela du détournement, de l’exploitation du bien de l’autre.

À nous d’y résister de la bonne manière, à ce pousse-à-jouir sans fin d’objets standardisés venant du marché.

Et la seule résistance qui vaille, c’est ce qui fait référence pour chacun: son petit a ! Ce n’est que par lui qu’on peut faire solidement objection à la standardisation de la jouissance.

L’usage de la culture pour l’obtention d’objets humains équilibrés en vue d’une meilleure exploitation de leur force de travail est vieux comme le monde: bien nourrir ses esclaves! Certaines entreprises offrent aujourd’hui gratuitement des séances de psychothérapie à ses salariés. Le système s’est perfectionné en passant de l’esclavage au salariat, via  » la servitude volontaire » ( cf La Boetie )

À ce titre-là, je serais toujours plutôt Loup que Chien ( cf le Loup et le Chien, fable de Jean de la Fontaine), Plus Lobito (lol)que chiot.

Soyons arteurs de nos vies!

Al

 

 

Envoyé de mon iPhone

 

//——————————————————————-

 

Bonjour

Oui, sans doute!
Bon je relisais ça ce matin:

192

La consommation spectaculaire qui conserve l’ancienne culture congelée, y compris la répétition récupérée de ses manifestations négatives, devient ouvertement dans son secteur culturel ce qu’elle est implicitement dans sa totalité : la communication de l’incommunicable. La destruction extrême du langage peut s’y trouver platement reconnue comme une valeur positive officielle, car il s’agit d’afficher une réconciliation avec l’état dominant des choses, dans lequel toute communication est joyeusement proclamée absente. La vérité critique de cette destruction en tant que vie réelle de la poésie et de l’art modernes est évidemment cachée, car le spectacle, qui a la fonction de faire oublier l’histoire dans la culture, applique dans la pseudo-nouveauté de ses moyens modernistes la stratégie même qui le constitue en profondeur. Ainsi peut se donner pour nouvelle une école de néo-littérature, qui simplement admet qu’elle contemple l’écrit pour lui-même. Par ailleurs, à côté de la simple proclamation de la beauté suffisante de la dissolution du communicable, la tendance la plus moderne de la culture spectaculaire — et la plus liée à la pratique répressive de l’organisation générale de la société — cherche à recomposer, par des « travaux d’ensemble », un milieu néo-artistique complexe à partir des éléments décomposés ; notamment dans les recherches d’intégration des débris artistiques ou d’hybrides esthético-techniques dans l’urbanisme.

Ceci est la traduction, sur le plan de la pseudo-culture spectaculaire, de ce projet général du capitalisme développé qui vise à ressaisir le travailleur parcellaire comme « personnalité bien intégrée au groupe », tendance décrite par les récents sociologues américains (Riesman, Whyte, etc.). C’est partout le même projet d’une restructuration sans communauté.

http://dumauvaiscote.pagesperso-orange.fr/la_societe_du_spectacle/societespectacle.htm

Bonne journée
Guy.

« La culture, plus on la consomme, plus on a envie d’en consommer »

Françoise Benhamou, spécialiste de l’économie de la culture | LEMONDE.FR | 09.03.12 | 18h19   •  Mis à jour le 09.03.12 | 19h17

 Françoise Benhamou est l’une des spécialistes mondiales de l’économie de la culture. Pour Le Monde.fr, elle revient en détails sur les différents concepts économiques évoqués dans la parabole des Tuileries.

Lors d’une intervention en octobre 2010 à Savigny-sur-Orge (Essonne), Nicolas Sarkozy a dit : « Quand on va au théâtre ou au concert étant jeune, on y va toute sa vie. Quand on créé l’habitude, quand on a créé le désir, on le décline sa vie durant. » Est-ce là une remarque qu’un économiste pourrait reprendre à son compte ?

 Tout à fait. Quand les économistes ont commencé à réfléchir sur les consommations culturelles, ils ont fait le parallèle avec la drogue. On n’assouvit pas son désir d’héroïne en la consommant. Au contraire, le désir ne fait qu’augmenter à chaque dose. C’est à peu près la même chose avec la culture : plus on la consomme, plus on aime ça, et plus on a envie d’en consommer. En économie, on dit que l’utilité marginale de l’héroïne, comme celle des biens culturels, est croissante. Mais, de la même façon qu’il faut prendre une première dose d’héroïne pour avoir envie d’en prendre une seconde, il faut recevoir une première « dose » de culture pour, peu à peu, y prendre goût. C’est en partie ce qui justifie l’investissement public dans l’éducation culturelle : l’État cherche à créer chez les citoyens les moyens de développer leur goût pour la culture.

Dans les ouvrages spécialisés, on lit souvent que la consommation de biens culturels génère des « externalités positives » qui justifient les subventions publiques. Qu’entendent par là les économistes ?

L’idée d’externalité positive est assez simple. Prenons l’exemple du théâtre. Lorsque vous allez voir une pièce, vous en retirez une certaine satisfaction, qu’on appelle aussi utilité. Mettons qu’elle soit égale à 100. Les économistes expliquent que l’utilité totale créée par le fait que vous alliez au théâtre est en réalité supérieure à 100. Pourquoi ? Parce que vous allez peut-être parler de cette pièce avec des collègues, ou simplement être plus productif au travail grâce au plaisir que vous avez ressenti. En bref, vous serez un meilleur citoyen et cela va profiter à la société. Cet effet supplémentaire de votre consommation est une externalité positive. Mais en tant que consommateur, vous n’êtes prêt à payer que pour votre propre satisfaction, et non en fonction de la satisfaction que vous apportez à la collectivité. Il revient donc à l’État de subventionner la différence entre l’une et l’autre. Dans le cas contraire, le marché qui, laissé libre, ne peut subvenir qu’à la somme des demandes individuelles, produira moins de pièces de théâtre que ce dont la société a besoin.

Beaucoup d’études économiques justifient l’investissement culturel par l’idée que celui-ci a un effet multiplicateur, c’est à dire qu’il génère des retombées économiques supérieures aux sommes investies. Que pensez-vous de cet argument?

L’effet multiplicateur de l’investissement culturel existe, mais il est souvent grossi, caricaturé et instrumentalisé, en particulier par des porteurs de projets : ils cherchent un financement, et s’adressent aux collectivités territoriales en arguant des retombées économiques de leur projet. Le plus souvent, les retombées sont surtout qualitatives. Personne ne remettra en cause, par exemple, que le musée Guggenheim de Bilbao a donné une excellente image à la ville. Mais ces aspects qualitatifs étant difficiles à mesurer, il arrive que le côté quantitatif soit volontairement exagéré.
L’investissement culturel ne produit donc pas nécessairement que des effets positifs.
Il peut même avoir des effets décevants ou ambivalents. Prenons l’exemple de villes italiennes muséifiées, telles que Rome ou Lucca. Les investissements massifs qui ont servi à les mettre en valeur ont certes profité aux visiteurs – qui peuvent à présent marcher dans des rues interdites à la circulation automobile –, ainsi qu’aux commerçants locaux. Mais ils ont aussi entraîné une hausse systématique des prix. Les populations moins fortunées ont dû quitter les centres villes pour habiter en périphérie, dans de grands ensembles souvent construits à la hâte. Les banlieues se sont enlaidies, et la qualité de vie de leurs habitants s’est dégradée. Donc, ce qu’on a fait de positif pour ces villes, on l’a en quelque sorte fait payer à leurs contours.

Propos recueillis par David Castello-Lopes

le spectacle ; la destruction extrême du langage et la congélation de l’ancienne culture

########## mail 1/4 #######

cher guy,
 
 à propos du texte que tu nous as envoyé, questions :
sais-tu à quoi Debord pense (comment il explique) quand il parle
  .  de « destruction extrême du langage » et
  . de cette fonction du spectacle qui consisterait à « faire oublier l’histoire dans la culture » (de congélation de l’ancienne culture )?

 ça m’intéresserait,

 merci,

 ta,

  v
 
  nb : comme tu sais, comme vous savez, je m’intéresse à « l’oubli de   l’histoire » et j’ai le sentiment d’avoir le langage extrêmement détruit.

########## mail 2/4 #######

 Cher Guy,

A ce propos, tiens, de la « destruction extrême du langage », je tombe sur ces images (de Blutch dans Mish Mash, Éditions Cornelius). les scans sont un peu flou, mais.. l’esprit demeure, je crois…

Véronique

########## mail 3/4 #######

bonjour

bien sûr que je sais
mais je regardais un épisode de x-files, je dormais puis me réveillais,
prenais un café et finalement maintenant que je suis au travail je peux ne
pas m’y livrer
http://i-situationniste.blogspot.com/2007/04/all-kings-men.html
là c’est un peu romantique mais
ça se lit
voilà pour le langage

ah oui l’histoire

142

L’histoire qui est présente dans toute la profondeur de la société tend à se perdre à la surface. Le triomphe du temps irréversible est aussi sa métamorphose en temps des choses, parce que l’arme de sa victoire a été précisément la production en série des objets, selon les lois de la marchandise. Le principal produit que le développement économique a fait passer de la rareté luxueuse à la consommation courante est donc l’histoire, mais seulement en tant qu’histoire du mouvement abstrait des choses qui domine tout usage qualitatif de la vie. Alors que le temps cyclique antérieur avait supporté une part croissante de temps historique vécu par des individus et des groupes, la domination du temps irréversible de la production va tendre à éliminer socialement ce temps vécu.

143

Ainsi la bourgeoisie a fait connaître et a imposé à la société un temps historique irréversible, mais lui en refuse l’usage. « Il y a eu de l’histoire, mais il n’y en a plus », parce que la classe des possesseurs de l’économie, qui ne peut pas rompre avec l’histoire économique, doit aussi
refouler comme une menace immédiate tout autre emploi irréversible du temps. La classe dominante, faite de spécialistes de la possession des choses qui sont eux-mêmes, par là, une possession des choses, doit lier son sort au maintien de cette histoire réifiée, à la permanence d’une nouvelle immobilité dans l’histoire. Pour la première fois le travailleur, à la base de la société, n’est pas matériellement étranger à l’histoire, car c’est maintenant par sa base que la société se meut irréversiblement. Dans la revendication de vivre le temps historique qu’il fait, le prolétariat
trouve le simple centre inoubliable de son projet révolutionnaire ; et chacune des tentatives jusqu’ici brisées d’exécution de ce projet marque un point de départ possible de la vie nouvelle historique.

144

Le temps irréversible de la bourgeoisie maîtresse du pouvoir s’est d’abord présenté sous son propre nom, comme une origine absolue, l’an I de la République. Mais l’idéologie révolutionnaire de la liberté générale qui avait abattu les derniers restes d’organisation mythique des valeurs, et
toute réglementation traditionnelle de la société, laissait déjà voir la volonté réelle qu’elle avait habillée à la romaine : la liberté du commerce généralisée. La société de la marchandise, découvrant alors qu’elle devait reconstruire la passivité qu’il lui avait fallu ébranler fondamentalement pour établir son propre règne pur, « trouve dans le christianisme avec son
culte de l’homme abstrait… le complément religieux le plus convenable » (Le Capital). La bourgeoisie a conclu alors avec cette religion un compromis qui s’exprime aussi dans la présentation du temps : son propre calendrier abandonné, son temps irréversible est revenu se mouler dans l’ère chrétienne dont il continue la succession.

145

Avec le développement du capitalisme, le temps irréversible est unifié mondialement. L’histoire universelle devient une réalité, car le monde entier est rassemblé sous le développement de ce temps. Mais cette histoire qui partout à la fois est la même, n’est encore que le refus intra-historique de l’histoire. C’est le temps de la production économique, découpé en fragments abstraits égaux, qui se manifeste sur toute la planète comme le même jour. Le temps irréversible unifié est celui du marché mondial, et corollairement du spectacle mondial.
——————-

mais je crois qu’il faut tout lire, ce chapitre IV « Temps et Histoire »
etc.

 ########## mail 4/4 #######

si donc, je traduis dans ma langue cette langue un peu lointaine, ça donne :

le temps est passé du temps des hommes au temps des choses

ce temps des choses n’est pas cyclique mais irréversible (sans retour)

autrefois rare, l’histoire est devenue produit de consommation courante mais uniquement en tant qu’elle est « histoire des choses » ( mode)

ce que l’on consomme couramment c’est du temps

la bourgeoisie a imposé un temps irréversible à la société mais dont elle « lui interdit l’usage » – c’est celui des choses, qu’elle ne peut que consommer, et pour le consommer il lui faut le produire, et pour le produire il lui faut vendre son temps

le temps n’a plus d’histoire, ne peut plus avoir d’histoire parce qu’il doit rester lié au temps économique qui lui, je suppose, ne peut être que le temps du mouvement en avant, une chose devant aussi vite que possible être remplacée par une autre ( ?)

temps réifié, puisqu’il s’agit du temps des choses, temps immobile, parce qu’il doit être dans le temps de la chose : l’instant, ce qu’elle comporte de promesse de jouissance (laquelle est hors-temps, dans ma langue)

le temps irréversible de la bourgeoisie a trouvé son départ dans l’an I de la république. la liberté que prônait l’idéologie révolutionnaire s’est vite vue réduite à la liberté économique. et très vite la société de la marchandise s’est aperçue qu’elle devait ramener les hommes à la passivité, et a récupéré le « le christianisme avec son culte de l’homme abstrait » et son calendrier.

le temps est devenu universel, le même pour tous, c’est le temps « irréversible unifié » « du marché mondial, et corollairement du spectacle mondial »

est-ce que cette traduction (premier jet) traduit ou trop trahit ?

Ô solitude, tu te souviens Géraldine?

Dans le film de Benoît Jacquot Villa Amalia, d’après le livre de Pascal Quignard, on peut entendre « Ô solitude, poème écrit par Katherine Philips au dix-septième siècle, mis en musique par Henry Purcell et chanté par Alfred Deller. »

Cf. l’article de Marie-Claude Chauviré, Lettre mensuelle n° 306, p. 7.

Dominique.

O Solitude
O solitude, my sweetest choice!
Places devoted to the night,
Remote from tumult and from noise,
How ye my restless thoughts delight!
O solitude, my sweetest choice!
O heav’ns! what content is mine
To see these trees, which have appear’d
From the nativity of time,
And which all ages have rever’d,
To look today as fresh and green
As when their beauties first were seen.
O, how agreeable a sight
These hanging mountains do appear,
Which th’ unhappy would invite
To finish all their sorrows here,
When their hard fate makes them endure
Such woes as only death can cure.
O, how I solitude adore!
That element of noblest wit,
Where I have learnt Apollo’s lore,
Without the pains to study it.
For thy sake I in love am grown
With what thy fancy does pursue;
But when I think upon my own,
I hate it for that reason too,
Because it needs must hinder me
From seeing and from serving thee.
O solitude, O how I solitude adore!

Katherine Fowler Philips (née le 1er janvier 1631, décédée le 22 juin 1664), dite l’incomparable Orinde (« the matchless Orinda ») est une poétesse anglo-galloise, connue notamment en raison de la reprise de son poème « O solitude » par Henry Purcell

Villa Amalia (2009) – void and solitude (I. Huppert)

Oh merci Dominique! Ce que j’aime ce film, ….

Et je suis bien d’accord avec Lunita, cette interprétation de Purcell par Alfred Deller me donne des frissons!
Merci Vé pour ton lien sur @escapcult! Comme toujours, une correspondance rendue si poétiquement…
Je vous embrasse fort!
Géraldine.

Envoyé de mon iPad

La défectuosité de l’art, de la plus-value au plus-de-jouir et le pot de moutarde

Tout art est défectueux, nous dit Lacan le 13 novembre 1968, à son séminaire qu’il nommera D’un Autre à l’autre. On sortait de mai 68, je rentrais en seconde à l’école normale de Lescar, et j’ignorais de fond en comble la psychanalyse, bien qu’ayant déjà essuyé une dépression, avec son front chaud – peur de mourir – et son front froid – l’ennui. De cette passe à vide, je ne retiens que le triomphe de sa sortie: je guéris dès que j’entendis le docteur dire à ma mère inquiète  » Il n’a rien… C’est juste une dépression nerveuse, comme vous.« 

Ainsi fus-je encombré d’une parole non défectueuse, qui fit mouche et m’hypnotisa longtemps rendant caduque toute interrogation sur son idiote existence.

C’est de tomber, à nouveau mais bien plus tard, sur une défectuosité, celle-ci d’amour, d’a-mur plutôt, que l’inconscient s’imposa à moi comme un compagnon fréquentable.

Je lis cette provocation de Lacan, la page 14 où elle s’inscrit, avec la boussole qui l’oriente:  il y construit a comme la référence du sujet, au-delà de l’Autre. Ce n’est pas sans rapport avec le pot de moutarde de la page suivante, et de ce qu’il dit de son acte, à la page précédente:  » Dans mon acte, je ne vise pas à l’exprimer (ma pensée), mais à la causer. »

L’acte cause? L’acte comme cause du sujet, du « hors-de-sens des propos »? N’est-ce pas d’être vide, défectueux, qu’un mot prend sa valeur de mot, pour représenter cette fois-ci un manque ( soit un sujet) pour un autre mot?

Je ne saurais trop vous recommander cette leçon introductive, qui recèle d’autres perles, par exemple celle-ci: « l’essence de la théorie analytique est un discours sans parole! « 

Son nom est alléchant: de la plus-value au plus-de-jouir.

Bonsoir,

Alain

one more/nevermore

Paul Gauguin, Nervermore, 1897  Huile sur toile signée et datée en haut à gauche Nevermore/P Gauguin 970/O. Tahiti, 60,5 x 116 cm  Londres, Courtault Institute
Paul Gauguin, Nervermore, 1897

Puisque évidemment il y a addiction et addiction. Et que ce serait très intéressant de faire passer à l’addiction tout ce qui pour nous est important. Se servir de l’addiction pour jouer un tour à l’inhibition.

Pressentez-vous, comme moi, qu’il pourrait y avoir un lien entre addiction et  « nécessité » – « ce qui ne cesse pas de s’écrire »?

Amener l’addiction (jouissance de l’un, du one more) au service du désir (absence de l’autre, nevermore)

Le lien entre l’addiction à l’internet, aux ordinateurs, aux écrans, et « ce qui ne cesse pas de s’écrire » :

la prise dans l’écrit, le binaire, le programme, l’image.
« ce qui ne cesse pas de s’écrire » : fantasme du tout écrit (vie=livre)
« y a d’ l’un » opposé à « y a pas de rapport sexuel » (« ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire »)
« y a » opposé à « y a pas »

« Y a ce qui peut ne pas cesser de s’écrire / jouissance hors sens, écriture de l’un, écriture de n’importe quoi, et donc possibilité de l’écriture, et donc question du moment de l’advenue du sens, et donc intérêt de cette écriture, qui est écriture de jouissance, même si jouissance uniquement fantasmatique : tout s’écrirait, obsessionnelle: l’Autre ne manque de rien. »

Là et hors sens, ça s’écrit. 

Paradoxe – à quel moment le sens adviendrait-il ? Au moment où ça cesse de s’écrire. Quel est ce moment? C’est le moment où ça se donne à lire, par l’autre (séparation de l’objet : je te donne ceci, non pas ma chair, mon sang, ma vie, cet écrit, je te le donne, à lire). Dans la contingence. Au moment où ce qui « ne cesse pas de s’écrire » cesse de s’écrire, où le manque apparaît dans la lecture de l’autre, advient la possibilité du sens, pris ici comme moment hors jouissance, pris ici dans sa perte, comme place creusée du désir. Un passage de « l’a-pensée » à « l’a-livrée »..

love,

véronique

Liens :
. sur la peinture de Gauguin, http://www.aidart.fr/galerie-maitres/symbolisme/nevermore-gauguin-1897-1341.html
. le poème de Poe, traduit par Mallarmé et illustré par Manet :  http://fr.wikisource.org/wiki/Le_Corbeau_%28traduit_par_St%C3%A9phane_Mallarm%C3%A9%29

Je crois qu’à la base de l’art, il y a cette idée ou ce sentiment très vif d’une certaine honte d’être un homme

Chers amis, sur la honte voir dans l’abécédaire de Gilles Deleuze la lettre R  (fonction de l’art en rapport avec la honte).

A bientôt
Jean-Luc

 

« Je crois qu’un des motifs de la pensée, c’est une certaine honte d’être un homme. Je crois que l’homme, l’artiste, l’écrivain qui l’a dit le plus profondément, c’est Primo Levi. Il a su parler de cette honte d’être un homme. Ce qui dominait à son retour des camps de concentration, c’était la honte d’être un homme. C’est une phrase… à la fois très splendide, je crois très belle, mais ce n’est pas abstrait, c’est très concret, la honte d’être un homme. Mais elle ne veut pas dire les bêtises qu’on veut lui fait dire, ça ne veut pas dire nous sommes tous des assassins, où nous sommes tous coupables ; par exemple, nous sommes tous coupables devant le nazisme. Primo Levi le dit admirablement, cela ne veut pas dire que les bourreaux et les victimes soient les mêmes. On ne nous fera pas croire cela, on ne nous fera pas confondre le bourreau et la victime. La honte d’être un homme, cela ne veut pas dire : on est tous pareils, on est tous compromis (…), mais ça veut dire plusieurs choses ; c’est un sentiment complexe, ce n’est pas un sentiment unifié. La honte d’être un homme, ça veut dire à la fois : comment des hommes ont-ils pu faire cela ? Des hommes, c’est-à-dire d’autres que moi, comment ils ont pu faire ça ? Et deuxièmement, comment est-ce que moi, j’ai quand même pactisé, je ne suis pas devenu un bourreau, mais j’ai pactisé assez pour survivre,, et puis une certaine honte d’avoir survécu, à la place de certains amis qui n’ont pas survécu. C’est donc un sentiment très complexe. Je crois qu’à la base de l’art, il y a cette idée ou ce sentiment très vif d’une certaine honte d’être un homme qui fait que l’art, ça consiste à libérer la vie que l’homme a emprisonnée. L’homme ne cesse pas d’emprisonner la vie, de tuer la vie, la honte d’être un homme, l’artiste c’est celui qui libère une vie, une vie puissante, une vie plus que personnelle, ce n’est pas sa vie… »

MiaMMiaM ~ les aventures du roi Vikram, le 24 juin

Bonjour , Bonsoir,

Je vous adresse les dernières informations de « MiaMMiaM« , qui  présente bientôt « Les aventures du roi Vikram« , conte d’Inde en musique.

Pour découvrir cette nouvelle création venez le 24 juin pour le festival  de la Frette sur Seine, parmi  une dizaine de conteurs,  à  16h45.

 

http://www.lesbonscontes.com/

Et  sinon, vous  avez toujours les anciens contes en vidéo  en  suivant ce lien .

http://www.youtube.com/user/Blanky93

A bientôt!
Vanessa

lettre d’escapade

La Table Chaïm SOUTINE (1893 – 1943) vers 1919 huile sur toile
La Table
Chaïm SOUTINE (1893 – 1943)
vers 1919
huile sur toile

Beaucoup à dire en écho à votre lettre d’escapade, à quoi s’agirait-il d’échapper, la littérature est-elle escapade ou confrontation, rencontre avec ce qui ne pourrait se présenter qu’en écrit puisque pas spontanément « représentable », il faudrait donc présenter à nouveau et sans fin ce qui refuse d’être su, parce que pas visible et non transposable en images ?

L’inconscient comme réel, bien sûr dirais-je. Et du coup, renversement radical et redistribution des cartes.

Il s’avère – dans mon expérience littéraire – que la mise en évidence du réel, constatable en principe par tous, confronte à des résistances psychiques effroyables (serait-ce, en partie, parce que je suis femme ?).

De quoi « comprendre » que la plupart en tombent à Je-Nous – en prière (ce n’est pas mon cas, mais au point où j’en suis, cela peut s’entendre).

Mystère, tout de même, de cette articulation du singulier à l’universel, qui reste le propre de l’artiste.

Vous pouvez, si cela vous intéresse, consulter la liste de mes travaux publiés sur le site de la MEL. (Maison des écrivains et de la littérature)

Louise L. Lambrichs

 

~~

Chère Louise,

Je vous remercie beaucoup pour cet écho (si singulier). Je vais prendre le temps pour vous répondre et  d’ici là transmets votre message à l’ensemble du groupe Escapades Culturelles,

Bien cordialement,

 Véronique

 

Ce serait bien de parler, un jour.

Merci, chère Véronique, de cet écho.

Le mien, singulier, bien sûr – comme chacun, non ?
Disons, à partir de ce postulat (hérité de Freud et de l’expérience analytique), comment fait-on pour faire lien ?
Sur quelle base que nous accepterions de considérer comme “commune”, et est-ce possible.

Comique irrésistible du politique vaudevillesque actuel, non ?
Le Président “normal” qui soutient son ancienne compagne, la nouvelle qui soutient le candidat qui s’y oppose. Très normal, tout ça, en effet.
Ségolène proposant ensuite d’ “élever le débat”, ce qui serait le minimum.
Mais j’ai pu constater pour ma part que ce minimum était déjà une sorte de maximum…

Alors, où en est-on ?

Ce serait bien de parler, un jour.

Car il y a des questions fortes, aujourd’hui, qui sont occultées par ces jeux vaudevillesques. 
De ce point de vue, mon expérience pourrait être intéressante, peut-être, pour votre groupe. 
En tout cas, je serais contente d’en débattre et de vous la faire partager – pour autant qu’on puisse partager une expérience tout en considérant qu’en effet, chacun est singulier et entièrement responsable de ce qu’il fait (mais que signifie responsable, et devant qui répondre, sinon devant les hommes ?).

Bien à vous,
Louise

Le singulier n’a pas d’avenir

À véronique, à Louise,

Le singulier n’a pas d’avenir, n’advient pas sans Autre. Freud le dit à sa façon,  » toute psychologie individuelle est avant tout psychologie sociale », Lacan, en écho, renchérit:  » le sujet de l’individuel, c’est le collectif ». En est-il autrement avec son Yad’l’Un?

guy se rassure sur la finalité de ces recherches

Bonjour

Merci, Alain, voilà une remarque qui me réconcilie ou me rassure (je n’ai pas décidé) sur la nature, voire la finalité, de ces recherches et qui rejoint ma propre pensée.

Je me faisais cette réflexion (à moi-même et véronique, n’ayant pas eu le temps de l’articuler pour d’autres) à propos des interprétations du film japonais que je n’ai pas encore vu: dans quelle mesure le prisme lacanien (occidentalo-bourgeois, donc, ah ah, n’y voyez pas insulte) est il applicable à ce film ? n’est ce pas une forme d’ethno-centrisme ? c’est une question car je n’en ai pas la réponse

je précise que je ne crois ni à l’universel ni à aucune valeur qui en découle comme « la beauté », par exemple, ou « l’oedipe », ou « les droits de l’homme », le social est bien plus disparate que ça sans toutefois être atomisé dans le singulier

Votre,
Guy.

je vous écris pour vous lire

louise,

à moi, d’abord, la littérature me demande de lire. et
je sais que je ne lis jamais
assez bien. à chaque fois, je pense que
je relirai une deuxième fois, puis, non, je ne
le fais simplement pas. je passe à
autre chose.

écrire, me permet de lire, de lire mieux. plus longuement, plus lentement.
je vous écris pour vous lire.

je lis partout. je m’en rends compte quand j’écris.

je lis dans les musées, aux concerts,
je lis mes amis,
je lis mon fils, mon amant,
je lis. je veux toujours lire.

mais je ne l’entends, que je lis, qu’à partir du moment
où j’écris.
c’est comme ça, je crois.
et je ne sais jamais ce que je vais écrire, et puis j’oublie ce que
j’ai écrit. oui ?

le réel, non, n’est pas constatable par tous. n’est-ce pas, non. c’est quelque chose, ça, constater.

‘skapad,

v

Godard/Matisse/Aragon

Dans un de ses films, Godard compare le magnifique tableau de Matisse « La blouse roumaine » à un poème d’Aragon…

Il n’en dit pas plus. Je ne retrouve pas la citation exacte, mais ça m’avait beaucoup frappée. Il me semble que, depuis, assez mystérieusement, je regarde mieux ce tableau (revu hier encore). Pour moi, le point commun serait une certaine emphase. Les effets de manche(s)…

NB. Godard aimait beaucoup ce tableau, qui occupait une place de choix dans son exposition « Voyage(s) en utopie » (Centre Pompidou 2006).

Dominique.

~~

Derniers jours Matisse
Nocturnes et ouvertures anticipées:

nocturne tous les vendredis, samedis, dimanches, lundis jusqu’à 23h.
ouverture anticipée tous les dimanches de 10h à 11h, réservée aux adhérents et aux détenteurs de billets achetés en ligne.

Bonjour Dominique…..intéressée par ta remarque, je reviens d’une petite escapade sur Google et j’ai trouvé ceci……Concernant Godard commentant le tableau « La blouse roumaine », j’y ai entendu son allusion à Aragon….qu’en penses-tu ?

Brigitte

Détail de l’affiche de l’exposition « Matisse. Paires et séries ». Henri Matisse, « La Blouse Roumaine », 1940, Huile sur toile, 92x73cm, Photo

Louis ARAGON (1897-1982)
Les mains d’Elsa

Donne-moi tes mains pour l’inquiétude
Donne-moi tes mains dont j’ai tant rêvé
Dont j’ai tant rêvé dans ma solitude
Donne-moi tes mains que je sois sauvé

Lorsque je les prends à mon pauvre piège
De paume et de peur de hâte et d’émoi
Lorsque je les prends comme une eau de neige
Qui fond de partout dans mes mains à moi

Sauras-tu jamais ce qui me traverse
Ce qui me bouleverse et qui m’envahit
Sauras-tu jamais ce qui me transperce
Ce que j’ai trahi quand j’ai tressailli

Ce que dit ainsi le profond langage
Ce parler muet de sens animaux
Sans bouche et sans yeux miroir sans image
Ce frémir d’aimer qui n’a pas de mots

Sauras-tu jamais ce que les doigts pensent
D’une proie entre eux un instant tenue
Sauras-tu jamais ce que leur silence
Un éclair aura connu d’inconnu

Donne-moi tes mains que mon coeur s’y forme
S’y taise le monde au moins un moment
Donne-moi tes mains que mon âme y dorme
Que mon âme y dorme éternellement.

Source : http://membres.multimania.fr/donm/citation.htm#aragon

~~

En effet, il y a dans ce poème d’Aragon comme un écho à la notation de Godard dont je me souviens. Merci !

De toute façon, il y a des liens entre Godard et Aragon, dans les deux sens. J’avais trouvé le site ERITA, avec, plutôt en désordre, ce qu’en dit Maryse Vassevière. Un petit paragraphe me semblait cependant corroborer mon souvenir, mais il ne donne pas de détails. 

Il faudrait retrouver le film mais je n’ai aucun indice. Je l’ai vu au cours de la très vaste rétrospective des films de Godard concomitante à l’exposition.

 Dominique.

~~

Là !
http://www.ina.fr/art-et-culture/beaux-arts/video/I04188950/jean-luc-godard-au-musee-d-art-moderme-de-paris.fr.html : Jean Luc GODARD déambule dans les salles du musée d’art moderne de Paris, et nous livre ses commentaires sur la peinture, et en particulier sur un tableau d’Henri Matisse.

Lire/écrire // ce qui pousse à écrire

Depuis quelques années, je fais une petite enquête sur ce qui pousse les gens à écrire (ou pas, d’ailleurs). Je collectionne les citations et, quand l’occasion s’en présente, je pose directement la question. Les réponses sont très très variées, certains écrivent pour se souvenir, d’autres pour oublier…, chaque écrivain a évidemment la sienne. 

Mais c’est la première fois que je tombe sur une réponse comme celle de Véronique : écrire pour mieux lire. C’est peut-être parce qu’ elle n’est pas un écrivain (dit-elle)… A méditer.

Dominique.

Lire/écrire 6

« Écrire pour lire« …

 les deux Inséparables.. comme un envers, un enchevêtrement infini de l’écrire et du lire, bande de Möbius face à l’éternel.

 Lire-écrire (pour ma part), Art-Psychanalyse, mais y a t-il coupure entre les deux ?

 Ça ouvre aussi pour moi sur une équivoque : Écris-tu, Vé,  pour « te » lire, comme dirait l’autre, allant vers un « lis tes ratures » ou/et pour « mieux lire les autres », « autres » au sens large …? 

 Brigitte

Lire/écrire 7

Oui, je suis d’accord avec toi, Alain et j’y travaille d’ailleurs ces temps-ci, pour le Forum sur l’autisme à Metz, sous le titre un peu aventureux que j’ai choisi de  « L’autisme du symptôme »; ….peut-être pour que cela cesse de ne pas s’écrire, c’est à dire pour essayer d’en écrire quelque chose. Même quelque chose de furtif!

Bises
Catherine

 

Lire/écrire 7

j’ai beaucoup apprécié ce qui s’est dit ici autour de lire/écrire (cette lettre/symptôme qui ne se lit qu’à condition de l’écrire).

dans une lecture de soi ou de l’autre ? me demandais-tu Brigitte.

rapidement je répondrais, qu’une certaine dimension du « se faire », « se faire » lire, « se faire » écrire, implique d’avoir à en passer par l’Autre, offrant donc à l’objet, la lettre – hors-sens – de circuler ( fût-ce sous des atours qui ne soient pas les siens…) aussi, probablement, une lecture attentive implique-t-elle de reprendre dans sa langue la langue de l’autre – même si l’acte analytique entend justement rompre avec ces « sympathies de langue » pour isoler plus proprement, chirurgicalement, un objet ou une lettre dont la nature est d’être absolument étrange, sans Autre.) (autrefois je pensais l’objet a comme un diamant à multiples facettes et la rencontre amoureuse, l’énamoration, comme à un moment où deux facettes de deux objets se rencontraient qui se croyaient « mêmes », quand il ne s’agit que d’une facette… évidemment, suffit-il que l’objet bouge un peu ou qu’une autre facette vienne à être mise en lumière et les difficultés peuvent commencer…)

etc.

Bonjour à tous et à toi Géraldine et à toi Vanessa, bon retour parmi nous, j’espère que nous aurons par vous quelques retours sur Tel Aviv et la lecture (du symptôme) où j’aurais tant voulu aller (( « Lire un symptôme », X° Congrès de la New Lacanian School, Tel Aviv, 16 & 17 juin 2012. )) (même si cela peut paraître politiquement incorrect aux yeux de certains d’aller en Israël, je me sens personnellement politiquement engagée et active, même quand cet engagement ne suit pas les grand-routes toutes faites de l’engagement politique – convictions emplies de certitudes, appartenance à un parti ou à un groupe marqué « politique », distribution claire et sans ambigüités de mes sympathies et de mes antipathies – je me sens de part mon éducation religieuse ( !) foncièrement de gauche probablement, mais la psychanalyse m’a appris à me méfier d’un communisme et/ou d’un humanitarisme en son fond chrétien, et j’ai le sentiment qu’il serait bon peut-être de baliser, au moins un peu, de nouvelles façons d’engagements, de voies politiques. je dis ça rapidement, en passant, mais sans vouloir passer dessus, parce que cela m’inquiète et que je souhaite diriger ma réflexion sur ce sujet dont je n’ai à ce jour que l’intuition.)

Ma maman arrive demain matin. Je compte avec elle revoir l’exposition des Nus de Degas ainsi que l’exposition Gerhard Richter. Mais, je ne sais pas encore quand, je sais seulement que je ne souhaite pas voir l’exposition Richter à un moment où il y aurait trop d’affluence. Par contre, nous pourrions très bien, je crois, voir le Faust avec vous, toutes les deux, et avec grand plaisir. Dites-moi seulement quand ? MK2 Beaubourg me convient bien sûr.

Demain soir, je vais avec Guy et Dominique découvrir le dernier spectacle d’Yves-Noël Genod (dont nous vous avons déjà parlé sur la liste) au Rond-Point. Que ceux celles qui le souhaitent n’hésitent pas à se joindre à nous. Vanessa ? C’est peut-être malheureusement trop tôt pour toi ? Mais tu avais aimé le précédent spectacle, non ? De nombreux acteurs qui jouaient dans « Chic by accident »  jouent à nouveau dans celle-ci –  Marlène Saldana (de toujours pour toujours, abominablement talentueuse et sympathique), Valérie Dréville (qui lit des textes de cet étrange auteur, Hélène Bessette, pour qui Duras avait beaucoup l’admiration ) et Dominique Uber (« (mais Dominique a été danseuse chez Maguy Marin, elle sait marcher sur la terre cabossée et meuble tout en portant un enfant, un meuble, je ne sais quoi…) »). Ça s’appelle « Je m’occupe de vous personnellement », voir là : http://2011-2012.theatredurondpoint.fr/saison/fiche_spectacle.cfm/110869-je-m-occupe-de-vous-personnellement.html et sur le blog d’Yves-Noël Genod :  http://ledispariteur.blogspot.fr/

J’aurais aimé également vous inviter à dîner, chez moi, chez nous, pendant que ma mère sera là… mais là aussi, suis un peu débordée un ce moment et vais devoir faire de terribles efforts d’organisation… (à cause de quoi je vais devoir mettre la pédale douce sur les publications sur le blog, désolée. s’il y a quelque chose dont il vous semble qu’il doive absolument être publié, envoyez-moi un petit mail, d’accord?)

tout ceci est un peu alambiqué, voire ampoulé, et je vous prie de bien vouloir m’en excuser,

vous embrasse fort,

 véronique

 

tableau synoptique autour des artistes

en réponse à V :

> nb : je voudrais faire un tableau synoptique autour des artistes (des dates, des dates, événements historiques, scientifiques, œuvres marquantes… tout ça mis en page de la façon la plus parlante possible) que nous avons vus ensemble : gros projet, sur lequel je ne détesterais pas avoir de l’aide…

malik a écrit :

Bonjour Véronique, bonjour le groupe,

Je n’ai pas participé à vos escapades, je ne peux donc pas aider directement à la création de ce tableau. Mais j’ai pensé à un outil-support qui pourrait vous être utile: un pad collaboratif (désolé pour le pléonasme) très facile d’utilisation. Chacun écrit peut écrire quelque chose, faire des modification, ajouter des éléments au texte. L’adresse:

http://framapad.org/

mode d’emploi:

« La première chose à faire est d’entrer votre nom ou votre pseudo dans le champ en haut à droite, afin que les futurs collaborateurs puissent facilement vous identifier. Vous pouvez également modifier votre couleur en cliquant sur le carré à gauche du nom.

Vous voici donc prêt à saisir ou copier du texte dans cette même fenêtre. Vous pouvez le mettre en forme en cliquant sur les icônes de la barre d’outils (gras, italique, etc.).

Pour inviter d’autres utilisateurs à se joindre à vous sur ce pad. Il suffit de leur donner l’adresse du pad (qui se situe dans la barre d’adresse de votre navigateur). Vous pouvez également cliquer sur « Inviter » (en haut à droite) et remplir un formulaire à envoyer directement à vos collaborateurs.

Le texte saisi s’enregistre et se synchronise alors automatiquement avec tous les utilisateurs, identifiés par leur couleur.

Un espace de discussion se trouve en bas de la colonne de droite et vous permet d’échanger avec les utilisateurs connectés sans modifier le texte lui-même. »

Bon dimanche
malik

sur la question du négationnisme

Chers escapadeurs,

Je vous envoie un texte que j’avais écrit à Louise Lambrichs sur Facebook, en commentaire d’un article d’elle publié dans Le Monde qui dénonce le rejet par le Conseil Constitutionnel d’une loi pénalisant la négation des génocides reconnus par la loi et s’inquiète de l’abrogation possible dès lors de la loi Gayssot (condamnant le négationnisme du génocide juif). 

J’aurais pour ma part l’idée que chacun doit pouvoir exprimer son opinion que de toutes façons rien ne l’empêchera d’avoir, mais je m’intéresse aux causes de Louise. Sa lecture m’a une fois de plus ramenée à un article de Rivka Warshawski lu en 1996 (et qui décidément me poursuit)

S’il n’est pas évident, le lien de ce texte au négationnisme, existe. Et il s’appuie entre-autres sur le livre de JF Lyotard, Le différend,  accusé d’ailleurs par certains de servir la cause du négationnisme. 

 —-

Chère Louise, je suis bien mal placée pour penser ces questions qui malheureusement m’échappent ayant bien des difficultés avec l’histoire, avec le temps.

Je crois que je suis phénoménalement trop inconsciente. Je n’arrive pas à intégrer les coups de hache de l’histoire, le temps dans sa durée ne cesse de m’échapper, malgré mes efforts répétés pour l’étudier. Ma mémoire s’acharne à contracter la ligne du temps en quelques points, voire à un seul. Je vivrais hors temps, hors lieu, pourtant toujours bien là, présente. // ceci n’a rien à voir avec le négationnisme mais interroge au moins la nature de l’histoire.

 Ces difficultés de mémoire que je suis tentée de traiter en symptôme (plutôt qu’en manque d’intellignece, j’ai ma fierté….) me conduisent en tout cas à avoir la plus grande difficulté à croire à une quelconque objectivité possible des faits, à une vérité historique (à moins que cette  vérité n’assume tout ce que Lacan peut en dire : qu’elle ne soit que mi-dite, qu’elle soit fiction (mais qu’elle attienne au réel (du sujet qui l’élabore)), et qu’elle soit soeur de l’impuissance).

 Ce qui m’avait rendue très sensible au texte de Rivka Warshawsky dont je vous ai déjà parlé : « Israël et l’holocauste – Du zéro au septième million »

 RW y parle d’une jeune femme en analyse chez elle et de son accès, son accession à l’histoire (c’est ma lecture). Elle y parle de ce qu’elle repère comme un phénomène d’identification à un signifiant unique « survivant de l’holocauste », un S1, un signifiant-maître, signifiant m’être, qui domine la vie de cette analysante et lui impose une vie « toute d’inhibitions et de souffrances inexpliquées » sur laquelle elle tient à rester mutique. Mutisme du sujet qui tient à préserver son (m)’être (« holocauste »). // on nage donc ici en pleine (h)ontologie (voire même avec la honte d’être survivant)

 L’holocauste lui, est silencieux. 

 Les chambres à gaz sont silencieuses, souligne RW, se rapportant à ce livre de Lyotard,  « Le différend »,  qui souligne qu’aucune chambre à gaz n’apportera jamais la preuve de son œuvre de mort puisque qu’aucun n’en n’est sorti, ne peut en témoigner. Peut-être à cet endroit me direz-vous que c’est tiré par les cheveux, que l’on sait, que l’on connaît la vérité des faits, que l’on ne peut les ignorer. C’est là l’intérêt de cet article (enfin l’un des intérêts), c’est qu’il souligne qu’il est très important de reconnaître ce silence, ce trou dans le symbolique que constitue les chambres à gaz, ce réel. 

(D’un côté il y a le mutisme du sujet, mutisme qui signe aussi la présence même du sujet, de l’autre il y a le silence du réel. Entre les deux : pas de rapport.)

C’est ce réel qui est l’œuvre dans le symptôme qui s’élabore de cette analysante. Il y a un trou, un impensable, un impensé. Lui, est antérieur. 

 Le signifiant qui vient le barrer, le marquer, l’indicer, c’est cet un-signifiant « survivant de l’holocauste » avec lequel l’analysante cherche à faire corps (dans le déni du sien // on n’est pas un signifiant, on a un corps). Cet Un est sans mémoire. et ne peut que se répéter, hors sens (le sens est celui du temps, de l’histoire). « Répétition et mémoire s’excluent », insiste RW. Cet Un auquel cette analysante cherche à s’identifier fait barre sur le trou. Son être se réduit à cette barre qu’elle doit faire sur le trou. 

 Cette identification ne peut être qu’inhibitoire, puisqu’elle ne permet, n’autorise que la répétition. Itérer. Faire marque. Faire barre (aussi bien barre à soi-même, puisqu’on est dans l’obligation de la redresser encore et toujours cette barre, cette marque cette croix, dirais-je suivant là mes origines chrétiennes. Obligé de retracer cet Un qui disparaît dans les limbes aussitôt aussitôt tracé.) C’est là un autre apport de ce texte que de souligner le lien de l’inhibition et de la nécessaire répétition du Un.

 Et c’est quand l’analysante comprend, lors d’une interprétation de l’analyste, qu’elle a son histoire et que cette histoire ne va pas sans dire, qu’elle vient poser ce que RW appelle la question du zéro : « Si je suis de la deuxième génération mes parents de la première (les survivants), qu’est-ce qu’il y avait avant. Est-ce que c’était la génération zéro? Et qu’est-ce qu’il y avait avant le zéro? »(citation de mémoire)

Voilà donc que le zéro (un nombre) vient se poser sur le réel de l’origine, de l’holocauste, le faisant exister. Le conte, le compte devient possible. A la place de ce zéro, c’est l’analysante bien-sûr qui va devoir venir se positionner comme sujet, sujet du verbe. Mais, au départ de ce zéro-nombre, on quitte le domaine de la cardinalité du Un et sa simple répétition pour rentrer dans l’ordinalité, le compte, la succession. Accession donc à l’histoire.

 Voilà ce que je peux vous dire pour le moment.  C’est que de toute façon, au départ, c’est pas les faits, c’est le réel. Après-coup, les faits ne seront jamais ce qu’on peut en dire. // En regard au négationnisme, la question est alors de savoir si on peut dire tout ce qu’on veut ou s’il y a un interdire. 

 Bien cordialement à vous,

 Véronique 

RE: sur la question du négationnisme

Chère Véronique,
très intéressant ce que tu as écrit, mais effectivement, j’aimerais bien lire aussi l’article qui t’as inspiré cette réflexion… le problème: je n’ai pas accès à Facebook. Tu as un autre lien pour les allergiques au bouc?
Malik

———————————————————————————————————

Cher Malik,

Le texte que je commente, de Rivka Warshawski, se trouve là : https://disparates.org/lun/2011/03/du-zero-au-septieme-million/

Quant à celui de Louise L., le voici :

Le Conseil constitutionnel a décidé de rendre le négationnisme licite (titre donné par Le Monde du 6 mars 2012)

par Louise L. Lambrichs, jeudi 5 juillet 2012, 19:38 ·

La récente décision du Conseil constitutionnel de rejeter la loi pénalisant la négation des génocides reconnus par la loi et documentés par l’Histoire est un événement historique qui confronte chaque sujet à sa conscience, voire à son inconscience (pour ne pas dire son inconscient). Cet événement, dont le sens me paraît devoir être pensé autant que possible, devrait inviter en effet chacun à se situer et à choisir son camp, au-delà de ses opinions personnelles puisqu’il s’agit d’une question d’intérêt public.

Quant à moi, cette décision me paraît gravissime au sens où, au nom de la liberté d’expression dont j’use ici publiquement, elle soulève la question des rapports qu’entretient le Conseil constitutionnel français avec les décisions prises par les cours pénales internationales, tout en portant atteinte à la vérité historique dont héritent les jeunes générations actuelles et en entérinant légalement toutes les formes de négationnisme au nom de la liberté.

En effet, si le Conseil constitutionnel est logique, cette décision, qui est aussi un acte symbolique, devrait l’amener à remettre en cause la loi Gayssot. Car il ne peut pas à la fois rejeter ce projet de loi et maintenir une loi qui condamne le négationnisme sans s’exposer à être inconsistant, voire incohérent. C’est là une contradiction à laquelle la raison législative va bien devoir se confronter – sauf à soutenir la liberté comme étant d’abord la liberté de ne pas penser (qui existe, bien entendu, mais dont on souhaiterait, si possible, qu’elle ne fasse pas la loi dans un pays qui s’honore de grands penseurs).

En ce sens, quels qu’aient été les études publiées depuis des décennies et les débats soulevés par ces études, on ne peut pas dire jusqu’ici que les hommes aient réussi à penser le génocide comme réel, sa spécificité, et la différence radicale qui le distingue de la guerre ordinaire. Ce dont témoignent bien, sur un autre terrain européen où la France a aussi été engagée, les discours actuels et passés sur la guerre de Yougoslavie, discours portés par d’innombrables experts en effet très libres, et c’est heureux, mais qui semblent jusqu’ici n’avoir pas saisi la relation entre le négationnisme des nationalistes serbes, et la répétition génocidaire qui s’est produite, sous nos yeux, dans les Balkans.

De mon point de vue, et c’est là un événement dont je me demande qui il pourra réjouir, la décision du Conseil constitutionnel consacre la victoire de Robert Faurisson et de Noam Chomsky qui, si le législateur a bonne mémoire, avaient pris la défense de cet historien négationniste  » au nom de la liberté d’expression « . Que je sache, les historiens ne sont pas libres de nier les faits, dont chacun sait qu’ils sont têtus. Ils sont au contraire invités à les penser aussi rigoureusement que possible et à les documenter tout en en reconstruisant la logique. Or si la destruction des juifs d’Europe a changé quelque chose dans l’histoire occidentale, c’est bien dans cette question-là, à savoir penser ce qu’est un sujet humain confronté à l’horreur génocidaire – horreur qui s’organise dans la langue elle-même qui lève, sans en avoir l’air et parfois en falsifiant l’Histoire et en entraînant les foules, l’interdit de tuer en laissant libre cours aux pulsions destructrices qui habitent l’être humain.

Il faut croire que cette question ne s’est pas inscrite, psychiquement, dans l’esprit des membres du Conseil constitutionnel, supposés faire valoir nos valeurs universelles – valeurs qui supposent elles aussi de penser le réel en tant qu’il est spécifiquement humain. Il faut croire qu’ils n’ont pas mesuré l’effet probable de leur décision, qui autorisera désormais les jeunes générations qui seraient tentées de nier l’existence des chambres à gaz à proclamer haut et fort, comme le font déjà certains, que les juifs ont tout inventé et qu’il s’agirait là, finalement, d’un  » mythe « . Façon commode, bien entendu, de se débarrasser de la question.

Il me paraît clair que si l’Allemagne avait osé prendre une telle décision, de nombreux Français, toujours prêts à donner des leçons, auraient crié au scandale. La loi Gayssot n’étant pas encore abrogée, j’espère que l’indignation, aujourd’hui bien portée, soulèvera la masse des Français qui refusent de vivre dans une France négationniste, désormais autorisée par le Conseil constitutionnel, au nom de la liberté, à considérer les génocides comme des détails de l’Histoire. Une France autorisée à faire librement et constitutionnellement injure aux juifs, aux Arméniens, aux Bosniaques, aux Croates, aux Serbes qui ont eule courage de combattre Milosevic, et qui vivent sur notre sol.

Le choix, bien entendu, est délicat. Rejeter ce projet de loi et conserver la loi Gayssot serait laisser entendre qu’aux juifs, un sort particulier serait fait – il est vrai qu’ils en ont tristement l’habitude -, ce qui ne peut qu’aiguiser l’antisémitisme. La décision qui m’eût paru raisonnable aurait été d’entériner ce projet de loi, pour tenter de penser ce qui, manifestement, reste pour la plupart difficile à penser, à savoir le sens, dans l’Histoire, de la destruction des juifs d’Europe, et en quoi d’autres politiques postérieures, sans être semblables, sont néanmoins comparables, idéologiquement et pratiquement, à la politique menée par l’Allemagne nazie avec la collaboration, parmi d’autres, de l’Etat français.

Louise L. Lambrichs

Ecrivain

Chargée d’enseignement à Sciences Po

N.B. Cet article a été publié par Le Monde, mais n’est plus accessible par le lien initialement donné. Vu ses enjeux actuels, je me permets de le publier ici, de façon à lutter contre le négationnisme actuel. Le titre que j’avais proposé était : » Libres d’être négationnistes ? » Le titre donné ici est celui donné par la rédaction du Monde.

L’art est une chose rare

Sommaire

éditorial

L’art est une chose rare

Alain Géronnez : L’indice pensable
                          Du lit et du divan
Dirk Snauwaert : Indiscipline de l’art contemporain
Gérard Wajcman : All that fall
Pierre Malengreau : Ponge et Braque : « La toile du poète »
Yves Depelsenaire : Conquêtes de Marcel Broodthaers

Table ronde : Translation dans l’art contemporain

Carine Fol : art) & (marges : des oeuvres de vie
Table ronde : Art et institutions
Joost Demuynck : Nous sommes tous Outsider
Dalila Arpin : Marilyn, une femme d’exception
Jean-Claude Encalado : Lisette Model, Photographier avec l’oreille
Jolka Nathanaili : Les voix du réel dans l’oeuvre d’Anri Sala
Philip Metz : Conversation autour d’un objet

Table ronde : Des artistes lacaniens ?

Enseignement de la passe

Patricia Bosquin-Caroz : Trauma et événement de corps
Bernard Seynhaeve : Les avatars du transfert
Angelina Harari : « L’effet de sens, il faut qu’il soit réel »

Travaux

Marga Auré : Le corps du schizophrène
Pierre Malengreau : Du roman familial au réel de la famille
Daniel Voirin : « Le bruit des ciseaux »
Dossia Avdelidi : « Je n’ai jamais été insérée »

Un numéro, un livre

Valérie Loiseau : « Sukkwan Island » de David Vann

Conférences

Marie-Hélène Brousse : Corps sacralisé, corps ouverts : de l’existence, mise en question, de la peau
Catherine Henri : Professeur de l’être
Joseph Attié : Écriture et réel
Sonia Chiriaco : De la porosité entre rêves et hallucinations

ISSN: 0771 67 45 – ISBN : 78-2-930653-02-0
Prix : 25 €
Quarto, revue de psychanalyse, école de la Cause freudienne
éditeur responsable : Bruno de Halleux – 8 Place des Chasseurs Ardennais – 1030 Bruxelles – Belgique

BUY IT

Bienvenue sur Correspondance d’escapades. Aujourd’hui fermé, ce blog reprend une partie des échanges qui ont eu lieu sur la liste de diffusion Yahoo! Escapades culturelles, de septembre 2011 à juillet 2012.

NB : Contrairement à ce qui se passe habituellement dans un blog, celui-ci étant fermé, les posts sont publiés dans leur ordre chronologique (et non pas les derniers en premier), ce qui permet de remonter le fil.

En savoir +