De l’art et de la fin de l’analyse // à propos de l’erreur de créon

j’essaie de relire le séminaire 7, y retrouver l’entre-deux-morts et la beauté.

ce passage, entre autres, que je veux vous résumer ici, me semble pouvoir être rattaché à ce que raynaud nous relate de son expérience:

[ voir Jacques Lacan,  L’éthique de la psychanalyse, p.301 – 304]

quelle est l’erreur de créon ? de vouloir imposer sa loi du « bien de tous »  pour tous et pour tout, sans tolérer d’exception (pour tout x phi de x | il n’existe pas de x tel que non phi de x).

ça ne peut avoir lieu sans excès, car il empiète alors dans le domaine du non-écrit, des lois non-écrites, le champ de dieux (ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire), que nous ne connaissons plus, qui a été balayé par le christianisme.

ce qui nous intéresse, c’est ce qui nous reste de ce champ des dieux, ce que nous en avons fait, dont il ne nous reste qu’une limite.

cette limite, c’est celle de la seconde mort.

sade essaie de « traquer la nature dans le principe de sa puissance formatrice, réglant les alternances de la corruption et de la génération ».

pour échapper aux lois de la nature, la libérer de ses chaînes, il faut aller jusqu’au crime, parce que le crime n’appartient pas à l’ordre naturel, n’est pas naturel. ainsi pourra-t-on la forcer, forcer la nature, à partir de rien. lacan utilise ici le terme de créationnisme, et ajoute : « Les frontières du à partir de rien, du ex-nihilo, c’est là vous ai-je dit dans les premiers pas de notre propos de cette année, que se tient nécessairement une pensée qui veut être rigoureusement athée. »

 « pensée sadique se tient dans cette limite »

fantasme d’une souffrance éternelle –> eh bien la région d’outrepasse, de sortie des lois naturelles où se tiennent « les jeux de la douleur », les jeux de la souffrance éternelle, est la « même région que celle où s’ébattent les phénomènes de l’esthétique, un certain espace libre. »

« victimes sont toujours parées, non seulement de toutes les beautés, mais de la grâce même, qui en est la fleur dernière. Comment expliquer cette nécessité, si ce n’est d’abord qu’il nous faut la retrouver cachée, toujours imminente, de quelque côté que nous abordions le phénomène, de côté de l’exposition émouvante de la victime ou du côté aussi bien de toute beauté trop exposée, trop bien produite, qui laisse l’homme interdit devant l’image derrière elle profilée de ce qui la menace. Mais de quoi ? – car ce n’est pas de l’anéantissement. »

(horreur et beauté) (tim burton et les ambassadeurs)

11 mars 2012, 20h10

Tim Burton, à la Cinemathèque, rue de Bercy, c’est extra!

Ne ratez pas son Burtonarium: toutes sortes de créatures, qui sont des monstres qui s’ignorent, qui n’ont nulle conscience de leur étrangeté.

En écho à nos questions de cartel ( magistralement déclaré par notre v ), c’est étrangement – mais pas inquiétant du tout – ni beau, ni laid, c’est ! 

C’est le dessin de la monstruosité comme voile de la monstruosité : il en ressort une certaine humanité. Le crime est toujours au premier plan, celui de la dévoration, maternelle bien sûr chez TB.

Quant à l’acte dans l’art, qui me préoccupe, peut-être y en a t-il une trace chez TB,dans ce qu’il dit: je dessine parce que j’aime ça, sans me soucier si c’est beau ou pas, si on aimera ou pas. Il y a, chez l’artiste, un instant d’acte qui ne se soutient d’aucune référence, sinon son petit a chéri !

Je questionnerai JL là-dessus samedi!

Bises

a.

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12 mars 2012, 00:10

Merci, Alain!

Trop belle cette image sur le couple, au sens de la monstruosité, que nous aurons aussi à travailler dans notre cartel, en en serrant les bords, les bords de la jouissance, pour passer de l’horreur à la beauté -ou moins… et bien nous porter, allégés de cet objet innommable ( je rejoins là mon point: séparation de l’objet).

J’ai vu l’expo sur Matisse aujourd’hui. Un point m’a intéressée, c’est justement le point qu’il repérait dans sa peinture comme faille, comme ce qui ne va pas, à partir duquel il se réintroduisait et reprenait tout son tableau. J’en ai parlé avec Géraldine, lorsque plus tard nous visitions au Jeu de Paume l’œuvre de Ai Wei Wei, et on a repensé à ce point de réel, du tableau de « Ambassadeurs« .

Y a t’il, dans chaque œuvre un point de réel, qui ouvre sur l’horreur ou sur la beauté?

Est-ce cela qui fait l’œuvre d’art?

bises lointaines

Catherine