IV. – 9 février 2011

  • PARTIE I / lire ce qui n’est pas écrit, ce que l’écrit évite
  • PARTIE II / des dits-mensions (possibles) du fantasme
  • PARTIE III / de Saint Jean gratté au sinthome
  • PARTIE IV / Penisneid vs Sträuben, aspiration commune à la virilité, position de l’analyste et aspiration contemporaine à la féminité
  • PARTIE V / comment démontrer que « ça parle » dans la pulsion
  • PARTIE VI (fin) / vers la jouissance féminine

PARTIE I / lire ce qui n’est pas écrit, ce que l’écrit évite

J’avais dû musarder

Le développement que je comptais donner à mes remarques sur la fonction nodale du fantasme sur quoi vient converger selon Lacan toute la pratique de la psychanalyse, j’ai dû comprimer ça la dernière fois, parce que j’avais dû musarder avant, sans doute parce que je frétillais de reprendre avec vous mes anciennes amours de Kant, Fichte, Schelling, … Kant, le livre de Heidegger, Kant et le problème de la métaphysique, sur quoi j’étais au moment de ma rencontre avec Lacan, je ne vais pas reprendre ça tout de suite. Je crois que vous n’avez rien saisi – par ma faute. Il faut que j’y travaille encore pour simplifier. Je reprendrai ici par un autre bout, supposant avec vous pouvoir me promener dans Freud et Lacan, pouvoir vous faire part de mes progrès en lecture – progrès assez lents, pour paraphraser Paulhan.

Ça n’est pas tout de lire Lacan

Ça n’est pas tout de lire Lacan. Le plus intéressant c’est de lire ce qu’il ne dit pas, ce qu’il n’écrit pas, sinon, on se contente de reconstituer l’architectonique conceptuelle [ «Par architectonique j’entends l’art des systèmes. (…) L’architectonique est ce qu’il y a de scientifique dans notre connaissance en général » Kant, Architectonique de la raison pure » (avant dernier chapitre de la Critique de la raison pure).] – pour reprendre le terme que j’utilisais la dernière fois – d’un texte, d’un écrit, de la leçon d’un séminaire. Mais ça ne dit rien du pourquoi, de ce que ça écarte. Ça ne dit rien de ce que l’écrit écarte ou témoigne ne pas apercevoir.

Heidegger dit quelque chose d’approchant de sa lecture de Kant – il ne s’agit pas seulement d’entrer dans la puissante mécanique conceptuelle de la Critique de la raison pure, mais de saisir où porte l’accent et, précisément, ce que cette pensée s’évertue à éviter …

Un bon exemple : de la seconde édition, modifiée, de la Critique de la raison pure, Heidegger va s’évertuer à démontrer qu’elle recule par rapport à la première. Il utilisera la seconde édition pour montrer ce que la première ouvrait, les horizons qu’elle ouvrait. Aussi, de cette Critique, Heidegger privilégie l’Esthétique (Esthétique transcendantale). Et c’est à partir d’elle qu’il jauge les développements des deux autres parties (Analytique transcendantale et Dialectique transcendantale).

Lacan aussi a donné parfois une seconde édition de certains de ses écrits, mais les modifications en étaient légères, les repentirs n’étaient pas son fort; c’est plutôt dans la continuité de sa réflexion qu’il se corrige. Mais son vocabulaire ne change pas, ou peu. Et comme son ton est toujours assertif, on peut croire qu’il développe, alors qu’il modifie, et parfois – il zigzague.

Le recul que me donne la satisfaction d’avoir pratiquement achevé la rédaction du séminaire, me fait bien apercevoir un relief où ce que je traitais auparavant comme des difficultés conceptuelles m’apparaît maintenant relever d’un autre ordre. Ma façon de lire aujourd’hui les écrits canoniques de Lacan a changé, en particulier ce qui m’occupe au titre de  » l’œuvre de Lacan », à savoir : le statut du réel.

II / des dits-mensions (possibles) du fantasme

fonction nodale du fantasme

Si j’ai dit « fonction nodale du fantasme« , c’est parce que Lacan l’a promu comme ce qui conjugue l’imaginaire et le symbolique d’une manière qui fait de lui la fenêtre du sujet sur le réel. C’est, disais-je, la matrice à partir de laquelle le monde, la réalité prend sens et s’ordonne pour le sujet.

nœud, poinçon

Je dis « noeud » – mais on la trouve cette fonction nodale, sous la forme du losange, ◊, qui est une pure forme de relation entre 2 termes – a et b…

a ◊ b

Lacan ne l’a pas inventé : en logique formelle, plus précisément en logique modale, on utilise le ◊ pour désigner le possible. Et le carré pour le nécessaire. Cela nous sert à représenter toutes les relations possibles entre 2 termes – cela indique qu’il y a relation, qu’il y a rapport. Ça n’est pas rien dire. Songez à l' »Il n’y a pas de rapport sexuel » – ça indique bien que là, on ne peut pas l’utiliser, ce ◊. Le ◊, c’est pour le fantasme – l’index d’une relation entre deux « quelque chose » qui n’est pas des éléments mais des ordres.

Lacan l’utilise pour indiquer une imbrication du symbolique et de l’imaginaire

S ◊ I

ordres/dits-mensions

Le terme d’ordre mériterait d’être commenté dans son usage lacanien. Il désigne ces 3 registres, de l’être, R, S, I. La tripartition de ces dimensions, de ce qu’il appellera plus tard les « dits-mensions », ça correspond à différentes façons de loger le dit, des façons qui obéissent à des règles différentes. Celles de l’image, en particulier, étant tout à fait distinctes de celui celles du signifiant (articulé en chaînes et en systèmes). Lacan développe abondamment ce qui se passe dans chacun de ces ordres séparément.

[…]

du fantasme entre symbolique et « représentation imaginaire »…

Ce qui spécifie le fantasme, c’est là l’interpénétration spéciale du signifiant et de l’imaginaire. Il suffit de se référer à « Un enfant est battu ». Il y a la scène (I) et la phrase articulée (S). Lacan a éduqué notre perception à cet égard… Il y a sur le fantasme une convergence de la pratique [à lire le fantasme, Sbarré ◊ a, avec Sbarré au titre du symbolique, et au titre de l’imaginaire l’objet petit a.]

Sbarré ◊ a

D’un côté, le sujet barré relève du signifiant, tel que Lacan l’a construit ce sujet, comme négation, vide, négation de la substance –> à ce titre voué à s’identifier;

Tandis que de l’autre, petit a comme imaginaire, embrasse toutes les formes imaginaires qui peuvent captiver le sujet au titre du désir –> de sa propre image à … tout ce qui est représentation aussi bien. L’imaginaire embrasse tout ce qui est représentation.

Et d’ailleurs, le « Phantasieren » de Freud penche plutôt de ce côté là. Il est plus aristotélicien qu’il n’est lacanien ou français.

J’avais cette semaine une conversation avec l’actuel traducteur de Freud – je peux dire que je l’avais recommandé à cause de sa superbe traduction de « La phénoménologie de l’esprit ». Il s’attend à un scandale à la sortie, parce qu’il a traduit « das Phantasieren » [ ou « die Phantasie »? ] par « représentation imaginaire ». Je lui ai dit que pour moi, c’est tout à fait cohérent avec ce que j’entends. L’imaginaire a l’amplitude de la représentation.

Le dernier enseignement de Lacan liquidera ces constructions.

… au fantasme entre symbolique et réel

Ce qui est formidable, c’est que cette écriture a continué d’être utilisée quand quand Sbarré ◊ R, quand petit a a vire au réel – traumatique, inassimilable, il reste néanmoins présent dans le fantasme.

Dans son séminaire Le transfert, Lacan écrit :

a

(-φ)

C’est la façon la plus élémentaire de comprendre la conjugaison que j’évoquais d’un trou et d’un bouchon. C’est encore cet algèbre que Lacan utilise quand il propose la passe.

Ça donne deux versions :

  1. accéder à la béance de la castration (-φ)
  2. ou à l’objet qui l’obture, pré-génital, a

S’il parle de ça, de pré-génital, c’est qu’il ne peut pas encore dire si c’est imaginaire ou réel. C’est sur ce point précis qu’on s’aperçoit que l’objet a est bien équivoque…

La jouissance est-elle imaginaire ou réelle ?

Étant donné le point de départ choisi, la jouissance repose sur une bi-partition, ou plus exactement repose sur la primauté donnée au champ du langage [qui de son dynamisme conceptuel propre oblige à une partition] :

  • S … wirklich
  • I … repousse le reste dans le statut de la représentation de l’imaginaire

Donc, les arguments ne manquent pas pour dire que la jouissance est imaginaire… Le corps est l’objet de satisfaction, contemplation, d’extrême complaisance, ou se dénote que là est la jouissance est imaginaire. Voir Cas Schreber, où la jouissance s’étale comme imaginaire. Puisque l’idée de lui féminisée est précisément pour lui la source vive de la satisfaction la plus extrême. « Qu’il serait beau d’être une femme » –> ce « beau » même dénote la référence faite à l’imaginaire. [C’est une cause évidemment] beaucoup plus agréable que de patauger dans le déchet, le malaise, le malêtre [quand on parle de jouissance réelle], alors qu’il y a un statut de l’objet a exaltant…

[…]

Freud dit dans Constructions en analyse du Wahrheitskern – on pourrait dire le Lutz Kern – , qu’il est dans le réel. Et c’est une longue trajectoire, ça n’est pas acquis comme un tour de passe.

shrink vers le rien

Au départ, le a est imaginaire, en revanche, φ est déjà le résultat d’une opération symbolique, le moins, le pas, et donc est symbolique.

a

(-φ)
I

S

Il va s’agir de réduire le voile du symbolique, de réduire l’imaginaire, pour arriver à la castration.

Cette réduction, c’est bien ce qu’on a saisi en anglais dans le « shrink ». Ca shrink, et quand ça shrink, c’est ok.

[On assiste alors] à une fin d’analyse sur le rien – le rien qui constitue le Wahrheitskern, à une réconciliation, reconnaissance du rien.

Ce petit a au fond de la bouteille, c’est le manque. Le Wahrheitskern, même quand Lacan dit c’est « Il n’y a pas de rapport sexuel », c’est encore une déclinaison du rien.

III / de Saint Jean gratté au sinthome

Mais quand le schéma change,

R

S

quand l’objet a prend la valeur réelle, c’est pas la même chose. On pense alors qu’il va falloir contrer la jouissance. [ Ici, Miller commence à s’amuser, et ça va devenir difficile, bientôt impossible, de prendre des notes]

Il s’agit d’autre chose – le réel comme reste inéliminable – c’est pas ce qu’on va se mettre à thérapier – c’est supposé fini.

Ce réel, il se présente sous différents angles.

On peut l’approcher au titre de restes, symptomatiques… On peut peut traiter ça comme un défaut… Mais, là, c’est en infraction avec le culte du rien. Hein. On a Saint-Jeau extasié qui regarde en haut, qui se trouve gratté par ses restes symptomatiques [qui montent qui montent qui montent; jam un bras au doigt pointé en l’air, au long duquel monte son autre main aux doigts en restes qui gratouillent]…

On a mangé la pomme, y a des restes, y a le le trognon, on jette ça derrière soi, mais bon, c’est un trognon boomerang et pan…

et puis l’histoire du bouillon, pas notée

Deuxième version – le sinthome. C’est un système. C’est bien au delà du bout de réel, c’est le réel et sa répétition – on verse au crédit du réel la répétition dont il est le ressort.

Alors que Lacan avait éduqué son public à ce que ce soit le symbolique qui [domine….] – c’est le réel qui est le ressort du symbolique.

Si on parle si bien, […] c’est parce qu’il il y a dans les dessous quelque chose qui travaille [et qui tourne] – le sinthome.

On a cru vraiment que le dernier mot c’était : « Il n’y a pas de rapport sexuel ». Puis ça a été : « Il y a le sinthome ». Hegel devant la montagne : « C’est ça ». Il y a la montagne, et les mots, c’est encore en trop.

Là, il faudrait s’attacher au dernier texte de Freud, parce qu’il a à faire avec ce qui se découd dans cette fin d’analyse.

IV / Penisneid vs Sträuben, aspiration commune à la virilité, position de l’analyste et aspiration contemporaine à la féminité

Là, il faudrait s’attacher au tout dernier texte de Freud, parce ce qu’il a à faire avec ce qui se découd dans cette fin d’analyse.

Dans « Analyse finie et infinie« , dans la huitième (partie), Freud indique sur quoi lui semble achopper la terminaison de l’analyse. C’est quelque chose qu’il y a de commun, mais différemment, chez l’homme et chez la femme.

  • chez la femme… Der Penisneid
  • chez l’homme… Das Sträuben La rébellion contre la passivité induite par un autre homme
    sich Sträuben, c’est ce que fait le hérisson, c’est se hérisser. L’homme se hérisse quand il soupçonne l’autre homme de vouloir le féminiser.

Die beiden einander entsprechenden Themen sind für das Weib der Penisneid – das positive Streben nach dem Besitz eines männlichen Genitales –, für den Mann das Sträuben gegen seine passive oder feminine Einstellung zum anderen Mann.

Il y a un facteur commun, c’est l’aspiration (jam signale qu’il n’aime pas ce terme) à la virilité.

Il s’agirait de faire en sorte que pour l’homme, suivre un autre homme n’aie pas la signification de la castration tandis que le Penisneid, source de dépression chez la femme, on n’arrive pas le faire passer.

L’idée de Lacan, c’est que sur la scène du fantasme, cela peut être (résorbé/résolu) ?

Il a l’idée que ce dont il s’agit dans le huitième chapitre de Freud, on peut le surmonter –> le fantasme est ce champ où il s’agit de résoudre cette « aspiration (aspiration, dit-il, ça fait un peu Mme Bovary) à la virilité », par excellence de l’ordre du fantasme : la comblement de la castration fondamentale par un petit a.

a

(φ)

Ca, c’est le mathème de la virilité.

Donc, on a φ : a venant boucher (-φ), c’est l’institution du sujet, l’institution phallique du sujet – le fantasme phallique instituant le sujet.

Penisneid…. où ce que ça se situe dans l’appareil psychique? Pour Lacan, ça se situe sur la scène du fantasme. Et qu’est-ce que ça que ça veut dire guérir les gens? Cela tient à l’élévation fantasmatique du phallus: guérir les gens, réconcilier avec le manque, c’est le « c’est ça » de Hegel.. Lacan a l’idée qu’on peut destituer le sujet de son fantasme, lui faire dire oui à la féminité.

Et d’ailleurs, le meilleur exemple, c’est le psychanalyste lui-même – position féminine. On n’est pas analyste institué par le fantasme phallique. Il y a une affinité spéciale entre position de l’analyste et féminité.

Ça se vérifie.

Au XXIè s., qui peut douter que la psychanalyse sera au main des femmes. Les hommes, ça passe à l’espèce en voie de disparition. Le vent dominant – c’est bien l’aspiration à la féminité. Le phénomène le plus profond, c’est l’aspiration contemporaine à la féminité – voir la rage où ça plonge les tenants de l’ordre androcentrique – ça se déchiffre quand même comme l’ordre viril reculant devant la protestation féminine.

PARTIE V / comment démontrer que « ça parle » dans la pulsion

Alors, l’idée de traversée, elle est quand même très dépendante d’un ordonnancement imaginaire de la question, que cet écran du fantasme puisse être percé en direction du rien :

La relation au phallus, qui est le support de cet écran, ça marche quant au désir : il y a une traversée qui donne accès au noyau de vérité. Mais qu’en est-il, est-ce que ça marche quant à la jouissance?

Quant au désir, ce phallus, c’est un semblant. Ce qui n’est pas un semblant, ce qui est réel, c’est la jouissance. Et avoir crevé le semblant phallique – ça ne résout pas pour autant le problème de la jouissance.

Le niveau du désir, le niveau du « ça parle », ça passe. Reste le réel et ce qui se jouit. La passe, c’est une réponse à la partie 8 d’Analyse finie et infinie, à la réduction de l’enjeu phallique du fantasme.

« Traversée » traduit bien la problématique imaginaire où ça reste pris.

Il faut lire le chapitre X d’Inhibition, Symptôme, angoisse – où Freud dit que la « cause ultime de névrose » de la névrose se situe au niveau du ça – dans l’automaton de répétition dans lequel est prise la pulsion.

Dans l’addenda B, que j’ai déjà pointé, il dit : l’exigence pulsionnelle est quelque chose de réel – etwas Reales.

Lacan en a fait une demande, de l’exigence pulsionnelle, de la Triebanspruch. « La demande de l’amour est inconditionnelle ». Vaudrait beaucoup mieux dire ça de la Triebanspruch. C’est ce qu’il dit d’ailleurs quand il dit que l’angoisse n’est pas sans objet.

Lacan a poussé très loin la domestication de la pulsion.

Dans le graphe, la pulsion est en haut, la parole (?) en bas, les deux vecteurs sont symétriques, ce sont des chaines signifiantes, ils répondent au même modèle. L’idée, c’est de faire de la pulsion un certain type d’énoncé.

Est-ce que le rapport du sujet à la pulsion sur joue sur la scène du fantasme? Lacan a tout essayé pour que oui.

Au-delà du fantasme ordinaire (le petit scenario à support symbolique et à représentation imaginaire), il y le fantasme fondamental, et là, il est question du réel.

Par tout un aspect, l’enseignement de Lacan, c’est une défense contre le réel. En en faisant une demande articulée, il veut démontrer que dans la pulsion, ça parle – que la parole puisse avoir une incidence sur la pulsion.

Cite p. 816 des Écrits – « …d’autant plus loin du parler que plus il parle »…. (« D’où le concept de la pulsion où on le désigne d’un repérage organique, oral, anal, etc. qui satisfait à cette exigence d’être d’autant plus loin du parler que plus il parle. ») [Est-ce que c’est ici, à ce moment-là, ou était-ce déjà avant, que Jacques-Alain Miller dit que Lacan est très intelligent, très très intelligent, beaucoup plus intelligent que nous (les auditeurs) et que lui… et que quand il veut démontrer quelque chose…]

Aussi Lacan va-t-il parler d’ « évanouissement » du sujet dans la pulsion et de « fading » dans le fantasme.

[D’ailleurs, Lacan avait dit : « Je me fais fort de donner n’importe quel sens à n’importe quel mot, si vous m’en laissez le temps« .]

Là, il faut qu’il démontre que « ça parle » dans la pulsion.

« Ca parle »:

  • ça a des caractéristiques grammaticales, les coupures des zones érogènes
  • ce sont des bords –> bord étant éminemment une fonction signifiante
  • ça insiste –> donc ça a une mémoire ( voir Sém. VII : pulsion a une dimension historique)

soit : fait tout ce qu’il faut pour ramener la pulsion à la parole.

La parole se boucle en signification et S de grand A barré, c’est la réponse, le saint des saints à ce qu’il en est de la pulsion comme énoncé, y a pas de répondant dans l’Autre – inconnu au bataillon. Ça répond à ce qu’il y a un manque dans l’Autre. La pulsion est organisée en signifiants, les objets de la pulsion, ce sont des signifiants – jusqu’à la fin où il n’y a pas de signifiant qui réponde. Au niveau de la pulsion, l’Autre barré est donc le lieu d’une grande tension.

Comment faire rentrer la jouissance dans ce système ? Ici, il ramène la jouissance au complexe de castration, il lui fait sa place. Il n’y a pas la jouissance qu’il faudrait.

Comme il n’y a pas le signifiant de la jouissance, il traite la jouissance à partir de l’interdiction, à partir d’un « non » à la jouissance, d’une problématique foncièrement oedipienne.
« Le phallus donne corps à la jouissance dans la dialectique du désir. » ( « … C’est ce qui prédestine le phallus à donner corps à la jouissance, dans la dialectique du désir » – Ecrits, p. 822)

La jouissance n’a pas attendu le phallus pour avoir un corps ! Il [ne lui donne pas corps, il] lui donne une signification de transgression corrélative d’une interdiction : c’est parce qu’on a dit tu ne dois pas jouir de la mère, de la voisine, … qu’elle prend figure de (jouissance de travers)? / Elle prend le symbole de √-1 (et ça, c’est quand même un peu pour rire!), de différentes modalités du négatif, mais la chose analytique résiste. C’est la chose même qui résiste, la chose même cernée par Freud, et comme son abord est précis, on sent que là, il y a quelque chose, il y a une jouissance à qui la négation, ça ne fait rien du tout.

Alors, comment on traite de l’impossible à négativer?

« Tout support qu’il soit du ( -1), [ le (- φ) (petit phi)] y devient Φ (grand phi), le phallus symbolique impossible à négativer, signifiant de la jouissance. » (Écrits, p. 823) On n’y comprend rien: comment accoucher d’un impossible à négativer à partir du négatif? Lacan met tout ça au panier et passe au delà.

PARTIE VI (fin) / vers la jouissance féminine

Deux ans plus tard, la construction de la pulsion est très différente. Dans le séminaire XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, il prend comme point de départ la jouissance.


La pulsion est un vecteur qui vient entourer l’objet a. Il n’est plus question d’interdiction, de négation.

Il terminait « Subversion du sujet » avec « Nous n’irons pas plus loin ici » (Écrits, p. 827) – comme si ça n’était pas toujours de ça qu’il s’agissait à la fin d’un texte, de ne pas aller plus loin, ça indique bien qu’il avait un plus loin en tête.

Alors, comment va-t-il aller plus loin?

Il fait de la clinique, il étudie la jouissance. Il aura traité du désir à partir du désir de l’Autre, de même aura voulu traiter de la jouissance à partir de la jouissance de l’Autre. Il va aller à parler de jouissance du corps plutôt que de l’Autre – « l’Autre c’est le corps« .

Il a essayé de traiter l’Autre dans ce qu’il connaissait : il veut saisir le point où il n’est pas content de ce qu’il a obtenu. Ce point, c’est la jouissance du corps, et non plus la jouissance de l’Autre.

Il ne fallait plus lui parler ensuite de la jouissance de l’Autre, il sortait d’en prendre de ce côté là…

L’interdiction de la jouissance qu’il a mise en fonction, à la façon du complexe de castration, répond au désir de l’Autre. Le sujet pour qui l’Autre serait habité par une volonté de castration – l’Autre qui dit non à la jouissance. Résultat :

–> ou bien on se momifie
–> ou bien on se suicide à la fameuse cause perdue
mais n’envisage pas qu’on puisse dire non à l’aspiration à la virilité.

Il y a une phrase où se concentre alors sa doctrine de la fin d’analyse : « Qu’est-ce que la castration? »

« La jouissance doit être refusée pour être atteinte. » C’est quoi ça? C’est la dialectique! Il a réussi à faire rentrer la jouissance dans la même dialectique que le désir. Il y a une Aufhebung de la jouissance – admirable et permise. Consentir au refus de la jouissance pour l’atteindre à un autre niveau. On prend sur soi la « ruse de la raison« , comme dit Hegel, on interdit une chose, et on la retrouve, exaltée. Ça veut dire quoi « sur l’échelle renversée de la loi du désir« ? C’est Saint Paul et l’épître aux Romains : « Le péché est né avec la loi ». La loi du désir : l’interdit et la négation. Alors, il faut renverser l’échelle et avoir accès à ce qui était refusé autrefois.

Dans les « 4 concepts », on assiste à un décrochage sensible. L’objet a, c’est n’importe quel objet, ce qui compte c’est c’est ce que la pulsion obtient comme satisfaction.

I
Avant : désir interdit –> jouissance

II
Ensuite : la jouissance est pensée au-delà – positivée comme celle d’un corps qui se jouit. C’est un événement de corps – ça s’oppose à l’interdiction, ça n’est pas articulé à la loi du désir.

Le choc, la contingence, le pur hasard, ça n’est pas dialectique, mais objet de fixation, non pris dans la loi du désir.

C’est comme ça, par ce biais, qu’il a pu rencontrer la jouissance féminine – la part qui existe sans subir l’interdiction, qui n’est plus centrée sur le Penisneid, fonction négative, qui n’est pas prise du côté dialectique, de l’Aufhebung – ça efface le « perdre pour retrouver » (un enfant, c’est encore mieux que l’organe qui manque). Ça ne se transmute pas en maternel.

Faut voir comment ça fonctionne du côté homme.

Au 2 mars…

[Applaudissements]

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