Réveillée par le début des journées j’ai failli m’endormir à l’AG… Je suis partie alors que le décompte des comptes poursuivait son travail d’effacement de la question qui s’était à peine ouverte. J’ai eu tort d’être fatiguée, ou du moins de ne pas saisir ce symptôme pour en faire un instant de réveil. Sans doute n’est-ce pas pour rien, et il me faut bien tenter enfin d’interroger ce qui m’a fait sortir…
C’est au fond assez simple : la passe m’a plutôt fait taire, alors même que j’ai tenté de m’y expliquer comment j’étais sortie d’un fort penchant à être tue par l’Autre, un Autre que je voulais sans cesse réveiller et séduire en lui causant. Comment est-ce possible ? Sans doute me sera -t-il répondu que si elle a eu un tel effet, c’est que je me suis trompée en m’y présentant et qu’il fallait bien plutôt poursuivre l’analyse… Je ne crois pas qu’il faille pour autant faire l’économie d’un autre repérage possible.
Je suis allée à la passe sur un « fiat !» soit une confiance dans la procédure et dans l’Ecole, soit aussi bien la hâte d’un enthousiasme qui soutenait le pari…Il y avait l’idée de transmettre une fin d’analyse en pariant sur la possibilité de faire entendre le singulier de la chose. Ce ne fut pas ce qui fut entendu. Malentendu donc. J’en prends ma part de responsabilité au sens ou je n’ai sans doute pas su faire passer la chose.
Mais après tout il n’y a pas de quoi en faire une inhibition ! Or je ne suis pas allée plus loin. Pourquoi ?
Le secrétariat de la passe m’a transmis une réponse du cartel : Le long parcours analytique de la passante a été retracé de manière convaincante par les deux passeurs, mettant en évidence tous les bénéfices de la cure. L’engagement d’AM L M dans la pratique analytique comme le souci professionnel qui l’anime dans son désir de transmission s’articulent logiquement sur une expérience subjective approfondie. Reste un point non élucidé concernant la fin de l’analyse, insaisissable à l’audition des passeurs, qui n’a pas permis la nomination.
Une expression ne passe pas : « le souci professionnel qui l’anime dans son désir de transmission »… Ceci est aux antipodes du désir de transmission qui pousse à la passe… J’ai supposé qu’allusion était faite là à mes engagements dans le CPCT de Rennes et au CEREDA… mais est-ce si sûr puisqu’il est parlé de souci professionnel et pas même de psychanalyse appliquée ? !
Rencontrant un membre du cartel entre deux portes après une matinée de la passe, je lui indique que la réponse me transmettait que mon analyse n’était pas finie… « Ah mais si, elle est finie votre analyse, ce n’est pas le problème »… Eh bien, je n’ai pas pu donner suite, à quoi bon remettre ça ? ! J’ai trouvé trop difficile de faire de nouveau une démarche ! ça n’a pas fait ouverture, je suis donc restée avec ces quelques lignes…
J’en ai bien sûr parlé avec mon analyste qui m’a dit que sans doute je n’étais pas parvenue à faire entendre quelque chose et que rédiger des réponses est très difficile pour le cartel.
Le cartel a fait son travail, il a entendu les passeurs, analysé la passe et tranché : il n’y a pas de nomination.
Mais qu’est-ce qui fait que quelque chose s’arrête ensuite pour la passante ?
Je me suis dit que l’Ecole trouvera des AE, que c’est cela qui compte pour elle et pour la psychanalyse, et que cela ne passera pas par mon témoignage, c’est ainsi, soit ! L’expérience a tout de même eu son intérêt, j’y ai rencontré une surprise que je n’oublierai pas. Je peux dire aussi que j’ai rencontré des passeurs très attentifs. Reste à ma charge la nécessité de repérer ce qui n’a pu se faire entendre. La reprise d’analyse après la passe ne va pas de soi car la passe produit une séparation d’avec ce qui s’est déployé dans l’analyse. Remettre la chose sur le métier ne peut se faire qu’à nouveau frais, sur une autre base. C’est, entre autres, une question de temps logique.
Ce qui est difficile, c’est qu’après cela le lien à l’Ecole n’est pas relancé… L’Ecole veut des AE, pour cela il faut que des passants se décident à lui demander de faire la passe, que les passeurs les entendent et que les cartels travaillent sur les transmissions. Mais au-delà du travail effectué par le cartel de la passe, comment l’Ecole prend-elle en compte la libido qui s’est mobilisée chez les passants et l’expérience qui s’est déposée ? Tout ceci reste sous la chape d’un silence, d’un secret qui risque de tuer le désir d’Ecole chez ceux qui songent à demander d’y entrer ou à se présenter à la passe.
Après la passe, j’ai pu assurer les diverses ou fonctions qui m’étaient jusque-là imparties, et cela m’a beaucoup aidée. J’ai aimé continuer à travailler les textes et la clinique, pour la section clinique par exemple, mais le désir de me porter partante pour d’autres aventures s’en est tout de même trouvé freiné. Une petite intervention à Nantes lors de la journée préparatoire aux journées que nous venons de vivre m’a fait renouer avec le désir de transmettre en nouant les textes la clinique et ma propre expérience d’analysante. La proposition m’en avait été faite bien avant que nous connaissions la tournure que prendraient les journées de novembre, et j’ai trouvé cela assez vivifiant.. même si dans l’après-coup de nos journées je dirais les choses autrement.
Hormis cela, tout ce qui a été investi dans la passe se referme, tombe, se trouve annulé dans un silence de l’Ecole qui bien évidemment ne peut pas susciter beaucoup d’enthousiasme chez de nouveaux impétrants éventuels…
Il y a là un point concernant le pas de rapport entre l’Ecole et ses membres entre l’Ecole et ses passants, ce qui est en consonance avec l’objet même de la passe où se traite la solitude du rapport à la cause. A chacun donc d’assumer son désir de passe, avant et après la passe, seul avec sa cause. Nous avons affaire à un point de structure que chacun doit traiter à sa façon, certes.
Mais, tout de même, comment l’Ecole, elle, traite t-elle la chose ? Si elle laisse se perdre, dans le silence, le désir qui s’est animé pour la passe, en attendant de pouvoir faire briller « la pierre précieuse » dont parlait Hugo Freda, ne risque t’elle pas de perdre son âme d’Ecole…
C’est formidable d’hystériser tous nos jeunes collègues autour de leur analyse et des moments de franchissement… mais qu’adviendra t-il de leur enthousiasme, de leur énergie, de leur pertinence, si, eux qui constituent le vivier de l’ECF, faisant ce pari de la passe se retrouvent ensuite seuls dans leur rapport, leur désir d’Ecole, sous prétexte du rapport solitaire à la cause…
La passe est un dispositif très bien structuré, mais il semble fonctionner comme un isolat dans l’Ecole, et les membres de l’Ecole, comme les membres des satellites de l’Ecole, renvoient à leur Ecole le silence qu’elle-même entretient sur ce qui la préoccupe.
On se lamente sur le fait qu’il n’y a pas de demandes de passe… Il y en a eu quelques-unes tout de même, et sans doute plus que les deux des AE. Dire que la boîte recueillant les demandes était « vide » oublie, voire annule les quelques passes qui ont eu lieu, hormis celles qui ont donné lieu à nomination.
Mais n’en restons pas là. Pourrions nous déjà savoir parmi les membres actuels de l’ECF combien se sont un jour présentés à la passe ? J’ose penser qu’il y en a certainement beaucoup, mais peu se sont risqués à en parler dès lors qu’il n’y a pas eu nomination. Quelques rares textes seulement… Pourquoi donc ? Serait-ce un péché au regard du culte de l’excellence, que de n’avoir pas répondu à ce que Catherine Lazarus Matet appelait samedi « le profil de l’AE » ?
Qu’est-il advenu du désir mis en jeu par chacun dans la passe, comment s’est-il déplacé dans le lien à l’Ecole, à la faveur de quelles rencontres, de quelles contingences, de quelles sollicitations, et dans quel travail pour la psychanalyse, pour que vive la psychanalyse lacanienne ? Comment chacun(e) a t-il négocié son désir de transmettre, d’enseigner ? Et comment l’analyse s’en est ou non trouvée relancée ?…
On peut toujours renvoyer le passant retoqué à son analyse, à ce qui de l’inconscient ne cesse de travailler le sujet, cela a certainement sa pertinence, à chacun d’en faire son profit le moment venu. Mais pour autant l’Ecole est-elle dispensée de s’interroger quant au sort qu’elle réserve à ce qui lui est adressé en réponse au désir qu’elle a suscité… Elle intéresse, cette Ecole de psychanalyse, les journées de novembre en témoignent… Dégeler le secret n’exclut pas la discrétion, trouver la juste mesure serait salutaire. Évidemment, le seul désir ne suffit pas à donner un contenu qui fasse enseignement de psychanalyse. Mais faut-il croire que des passes entendues qui n’ont pas donné lieu à nomination rien ne puisse faire enseignement pour l’Ecole ? Il y a l’enseignement des cartels (plutôt discrets pour l’instant), peut-il y avoir une autre voie qui vivifie le lien à la passe dans l’ECF ? « La passe a son rythme », disait Hugo Freda. Pour que cette petite phrase ne résonne pas comme une langue de bois, peut-être pourrions-nous nous demander qui lui donne son rythme et comment…
Une réponse sur « Anne Marie Le Mercier : Ce qui ne passe pas »
Eh bien, violent la passe. On lit le désarroi de l’auteure de ce post. Et on ne peut qu’être en colère contre l’ECF qui finalement laisse les gens avec leur désir violemment interrompu et laissé sans réponse. C’est sadique en fait. Et puis qui sont ces gens, ces passeurs. Passeurs de quoi on se demande ! Qui sont t-ils pour ce permettre d’écrire qu’il resterait un point non élucidé à la fin de l’analyse. L’auteure fait peine à lire car on voit qu’à cause de cette décision du cartel, elle reste là sans réponse. En fait là dedans, aucune humanité. Faut-il être tordu ! Rien que le message en dit long, du plus pur style administratif. Et la parole du gars croisé entre deux portes « mais si votre analyse est finie » Alors il est où le problème ? Si son analyse est finie ? C’est des tordus ces gens-là. Son analyse est finie et la passe ne fonctionne pas. ne prenez pas pour parole d’évangile ce que vous disent quelques passeurs. Ne les considérez pas comme des sujets supposés savoir mieux que vous….