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Varia sur la Passe #69

CECI EST UNE RÉPONSE

par Esthela Solano-Suarez

« Lapsus semel fit culpa, si iterum cecideris » Publilius Syrus

Je ne suis pas la seule à trouver dans le JJ mon « plus de jouir ». Quand il arrive sur mon écran, je le dévore goulûment. Il me permet de m´entretenir avec mes collègues, de les fréquenter, de suivre le fil de leurs questions, de savoir ce qui les touche, et d´entrevoir leurs intimes circonvolutions dans leur rapport à la cause analytique. J´y trouve ici un écho, une sympathie, plus loin une divergence, ou plus tard une expression qui me frappe par sa justesse. Les belles plumes m´enchantent, le bien dire me comble. Le JJ est comme un tricot à plusieurs et, au fil du temps, il devient tissu, ou plutôt dentelle. Il tisse un lien autour du fil d´un débat sur la psychanalyse pure, et par voie de conséquence un débat sur la politique de la psychanalyse. Ce fil fait exister l´École et dessine la trame du discours analytique de demain, parce qu´il aura été aujourd´hui.

Il est alors crucial de bien entrecroiser les fils. Il est un devoir de ne pas les laisser s´embrouiller. Et dans ce dessein, j´écris ici une réponse afin qu´un premier faux-pas ne devienne pas faute quand on y trébuche encore une seconde fois. Je fais référence ici aux échos qu´un texte a pu susciter.

Quid ?

Philippe Chanjou a écrit une contribution au débat sur la passe intitulée « La nécessité de la réponse ou le menteur généralisé », parue dans le JJ n° 64. Je veux apporter quelques précisions concernant ses propos. En premier lieu, la réponse que le cartel a transmise au Secrétariat de la passe n´était pas « Vous êtes vivement recommandé à l´École par le cartel », comme il l´a écrit dans son texte, mais : « Le cartel B9 de la passe a décidé de recommander au Conseil de l´ECF l´admission de Philippe Chanjou au titre de membre de l´École ».

Plus loin, il écrit avoir été reçu par « un des membres du cartel, ex AE ». C´est exact, c´est moi qui l´ai reçu à sa demande. Alors, il poursuit: « Un des membres du cartel, ex AE m´a confirmé le fait que la charge de l´enseignement d´AE était beaucoup trop lourde pour que l´on puisse la confier sans un minimum de garantie concernant la capacité de la personne à pouvoir l´assumer (c´est moi qui parle de garantie – ajoute-t-il – le mot n´a pas été prononcé)  ». C´est sa version, tell qu´il l´écrit.

Maintenant je rectifie, et vous donne une autre version.

Je le reçois chez moi, comme convenu. Il entre, s´assied, et me dit être satisfait de la réponse du cartel. Se dit allégé de ne pas avoir été nommé AE, puisque faire un enseignement aurait été une charge trop lourde. J´ai confirmé ses dits, sans plus. Il m´a aussi annoncé qu´il avait pris rendez-vous chez le meilleur d´entre nous pour poursuivre son analyse. Ensuite, répondant à sa demande, j´ai dit quelques mots à propos de son témoignage. Je lui ai dit que son parcours était extraordinaire, ce qui n´est pas faux, et que son témoignage nous avait bien occupés, que nous y avions trouvé l´occasion d´un travail et d´un enseignement, notamment sur deux points, les plus saillants , que je lui ai détaillés.

Quod ?

Voilà ma rectification. Je m´arrête là. Je ne vais pas plus loin, il y a ici une barrière qui ne doit pas être transgressée. Nous pouvons constater encore une fois qu´il est question de malentendu, parce que nous naissons malentendus, comme Lacan le signale. Mais une chose est certaine : en aucun cas un membre du cartel aurait dit à Chanjou : « Nous n´avons pas pu vous nommer AE car nous ne vous connaissions pas ».

Les raisons qui ont conduit le cartel à prendre sa décision concernant cette passe relèvent d´un jugement qui n´est pas de l´ordre du mépris, ni de la sauvagerie de salon réunissant des infatués qui s´érigent en caste. Non, le cartel a pris sa décision depuis le rapport le plus intime avec une exigence éthique. Et ses raisons-là, je me garde ici de les exposer.