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Varia sur la Passe #73

L’IDENTIFICATION AU PASSANT

par Martine Comandi

 

À la suite de la lecture des textes de Pierre Naveau et Patrick Monribot du JJ numéro 63, voici mes réflexions à partir de mon expérience de passeur qui date de 12 ans.

J’avais pris la «tâche» très au sérieux pour me laisser imprégner par la rencontre du réel de chaque passant, j’en ai entendu trois.

Deux étaient encombrés par leur effort de construction logique, cherchaient à retrouver à partir de leur témoignage, un fil chronologique de leur analyse mais aussi, attendaient que la passe fasse coupure dans leur trajet d’analysant. Pour chacun d’eux, l’analyse, disaient-ils, était finie. Mais ils restaient en attente d’un effet de l’acte du passage par la procédure de la passe. Ils n’attendaient pas cependant d’être nommés AE.

Par contre, la troisième passante était dans cette attente. Son témoignage était soutenu par l’effort de dire, dire l’épreuve qu’avait été son analyse et témoigner de la jouissance qu’elle avait lâchée malgré elle.

Interrogée en tant que passeur par le cartel de la passe à propos de sa nomination, je « soutenais » avec ardeur et conviction son témoignage alors que certains membres du cartel étaient partagés.

Mais plus tard repensant à mon enthousiasme pendant le cartel, et au moment où j’appris sa nomination d’AE, j’ai reconnu dans cet enthousiasme, des effets imaginaires d’identification à cette passante.

Cette dimension de la passe «ayant la structure du mot d’esprit » corrélative au « rire de soi »comme le rappelle Pierre Naveau, n’était pas présente. Elle suppose en effet un lâchage des identifications imaginaires. Le passeur ne peut la transmettre au cartel de la passe que si, il y a accès pour lui-même.