23 juin 2005

l’a-pensée

J’essaie de repenser à ce que j’ai écrit ici.

A propos de ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire, de ce qui ne cesse pas de s’écrire et de ce qui cesse de ne pas s’écrire, respectivement
l’impossible, la nécessité,  la contingence.

Dans ce que j’ai décrit ici, je les ai prises au pied de la lettre, ces formules : « Dans ma tête, ai-je écit, ça ne cesse pas de s’écrire », c’est-à-dire, voulais-je dire, que je ne cesse pas, mentalement, de chercher à écrire. Tandis qu’écrivant, et écrivant ici, je sortirais justement de la nécessité, paradoxalement, je sortirais de ce qui ne cesse pas de s’écrire, irais vers ce qui cesse de ne pas s’écrire, vers l’accident, vers la rencontre.

L’idée, c’est que ce qui ne cesse pas de s’écrire, ce qui ne cesse pas de chercher à s’écrire, c’est ce qui rêve que tout puisse s’écrire, qu’à toute chose un signifiant corresponde, qu’il n’y ait rien qui ne puisse être établi. C’est l’idéal scientifique. C’est le fantasme, dont l’entretien fait jouir. La pensée jouit. Sa constance, son entêtement, sa force, son caractère « malgré soi », mais aussi sa solitude et son silence, pointant sa prise dans un processus pulsionnel. Processus qu’on peut-être qualifier de «sublimatoire », ai-je ajouté, parce que la pensée ne me semblait sourdre d’aucun de ces organes sources de la pulsion, l’œil, la bouche, l’oreille, l’anus. C’est dans la tête que ça se passe.

On sent bien qu’il y a une différence entre mâcher un chewing gum et ressasser, remâcher des idées. Dans les deux cas, cependant, l’épreuve se fait d’un « pour rien », d’un « dans le vide » (où je situe « l’a-chose », l’objet, l’objet-cause). Dans les deux cas, quelque chose fonctionne tout seul, donnant à penser qu’il jouit de son seul fonctionnement. La pensée fonctionne comme une bouche qui mâchonne et ça jouit, ça « j’ouis ». Par dérivation, dirait-on, ça jouit dans la tête comme ça jouit dans la bouche.

J’ai pensé, en son temps, c’est-à-dire il y a plusieurs années, ou j’ai voulu croire, que la sublimation se distinguait de ce qu’un objet s’y produit. Un livre, une œuvre, quelque chose qui puisse se donner à lire, à voir, à entendre à d’autres qu’à soi. Est-ce que la sublimation se situe là ? C’est à vérifier, je ne me souviens plus des textes. Et, est-ce que, dès lors, il n’est incorrect de dire que la pensée fonctionne sur un mode sublimatoire, tant qu’elle ne s’est pas séparée de l’objet qu’elle cerne. Il n’y aurait sublimation qu’une fois ce processus de séparation de l’objet entamé. Mais peut-être suis-je occupée à réinventer la sublimation, n’est-ce pas du tout de ça qu’il s’agit. Il faut que je le vérifie dans les textes.

(2 questions donc. y a-t-il sublimation du moment qu’une satisfaction pulsionnelle s’obtient, sans directement passer par un organe corporel? ou bien faut-il qu’un sujet s’y sépare de son objet? )

Publié dans psychanalyse |