avril 2nd, 2005

le goût de la castration

Comment donnerai-je à  mon enfant le « goût de la castration». Si la castration se situe du côté de l’histoire, du tranchant de la date,
de la coupure dans le temps. Du côté de la parole, du renoncement à  une vérité toute, à  une identification ultime dernière définitive. Comment la rendre suffisamment séduisante qu’il ait le goût la force de sortir du tout à la consommation immédiate, du tout à  l’immédiateté, l’instant ? Il faudrait pour cela que j’aie pour moi-même mieux pu jouir de ces choses que je voudrais lui donner à  mon tour, après qu’elles m’aient été donné par mes parents – l’art, la culture, le goût de la lecture, de la science, du savoir. Que j’apprenne à en jouir plus surtout qu’elles se dégagent de leur vêture d’idéal, à  moins qu’il ne s’agisse de ne plus les prendre comme les moyens du maître, l’instrument qui l’installe, l’établit. Que je puisse apprendre à  me réjouir de la relativité propre à n’importe quel savoir et que mon désir de certitude s’en tienne à  celle-là . Que ce ne soit plus mon être que j’aie à  défendre quand la parole je veux prendre, que j’apprenne le courage de défendre ce dont je veux parler. Que je n’aille plus à  vouloir me confondre avec ce dont je voudrais parler. Que j’ose séparer ces choses de moi pour apprendre à elles les défendre et à  en apprendre le partage. Comment sortir du silence ? De mon silence et pourquoi m’y contiens-je ? Silence mien depuis l’enfance. Silence de ma mère. Pour partie, silence d’hystérique gardé sur l’inestimable valeur de ce que je vaux comme petit a, comme innommable, comme femme. Et pourquoi faut-il que ça soit si difficile de faire exister ça et malgré tout prendre part au commerce des hommes. Comment cette chose peut-elle être si forte qu’elle me tienne absolument à  l’écart de la culture, si je considère que la culture commence du moment où un discours s’organise et s’adresse. C’est que je m’y veux toute à  cet endroit, toute à cet objet, par où d’ailleurs je le trahis, parce qu’il n’existe qu’en reste, nulle part incarné, d’une division que ma parole, la mienne, seule peut opérer.

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juillet 5th, 2005

d’hier

– la fiction, j’en rêve…
– vous en REVEZ?
– ben oui, pour me débarrasser de la psychanalyse. me débarrasser de moi.

au sortir: je n’ai pas du tout envie qu’on pense que je veux voudrais devrais pourrais écrire de la fiction. qu’on pense que mon désir soit là . et qu’à  nouveau on veuille m’en embarrasser.

le jour après: mais souligner que je « rêve » de la fiction, n’implique pas nécessairement qu’on pense que mon désir soit là .

je veux me débarrasser de l’écriture. je veux me débarrasser de mon lien malade à  l’écriture. je veux justement cesser de « rêver » d’écrire. ça en passe par écrire. ça en passe par écrire, ça en passe par le faire. ce blog pourrait me le permettre.

je ne pense pas que je puisse retourner à  la fiction. et il est vrai que la psychanalyse, la pratique de la psychanalyse, a entraîné que je me suis passionnée pour la fiction que j’y découvrais, que j’y construisais, de ma vie.

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juillet 14th, 2005

se faire honte

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la
note de miller sur la honte

(je ne dis pas que ce n’est pas pénible d’écrire tout ça, ça l’est)

à l’analyste mardi je dis :
« le problème, ça a toujours été de signer. comme si…»
là, j’hésite presque longuement.
je crois que je lui ai dit « …comme si rien n’était à la hauteur, ne pourrait être à la hauteur de ce nom».

surprise, pas convaincue, j’ajoute que non, ce n’est pas ça.

je parle de la note de miller, sur la honte. je n’en dis pas vraiment grand chose. mais ça me mène tout de même à dire que je crois que maintenant je pourrais signer de mon nom.
il se lève, se dirige vers la porte, me demande comment va mon fils. je lui dis qu’il dit « maman. mam… maman».

c’est comme ça.


souvenir de la note de miller

un jour lacan dit: « je veux vous faire honte» (certains s’en seraient scandalisés).

lisant, je me dis, est-ce que c’est ça que je me fais, quand j’écris, quand je me fais lire :
est-ce que je me fais honte ? est-ce que c’est ça ? et pourquoi ça serait bien, ça serait mieux, vaudrait mieux ? se faire honte, plutôt que pas.

lacan dit (moi, je dis toujours ce que dit lacan), ça ne sont pas ses mots, exacts, il dit
« … ça n’est pas si courant que ça mourir de honte ».

il lacan dit, « ça s’est perdu, la honte». est-ce qu’il dit que ça s’est perdu avec le capitalisme, je ne sais plus – pour le coup j’ai peur d’avoir mal retenu : passons.

la honte, l’honneur – ça s’est perdu.

tout cela qui vous vient de ce que vous êtes liés à un S1, explique miller. je lis un « S1 », je pense « nom du père ». je pense « nom de mon père ». je pense « mon nom».
le S1, le nom propre. c’est une lecture, il y en a d’autres. (un S1, pas un autre, d’aucun autre.)

s’est perdu. la honte, l’honneur. ce qui fait qu’il y a quelque chose dans le nom, votre nom, le nom propre, qui serait au-delà de vous. dont il faille se montrer digne. pour quoi, à l’occasion, on doive mourir. miller dit, dans le S1, c’est l’être-pour-la-mort.

pour tout vous dire, jusqu’à là, jusqu’à cette lecture, je pensais que le S1, il fallait le laisser tomber. que du S1 identificatoire, s’agissait de se désidentifier.

je crois que ce à quoi j’ai pensé, en séance, et que je n’ai pas dit, c’est « le nom, mon nom, ça n’existe pas. »

« ça n’existe pas », ça n’ex-siste pas, ça indique bien, jusqu’à quel point j’ai maintenu ça comme un réel : ça n’ex-siste pas au symbolique. c’est un nom, c’est un signifiant, mais mon « ça n’existe pas » indique bien qu’il n’est pas pour moi un signifiant comme les autres. il ne rentre pas dans la danse, le  commerce, je l’ai installé en position d’exception, dont aucune signification n’est digne – ce qui pourrait même valoir comme définition du phallus. « je le suis », ou plutôt « il m’est ». il me « m’êtrise ». et se faire « m’êtriser » par « l’être-pour-la-mort », ça explique peut-être certaines de mes tendances. la honte, encore, dit lacan quelque part, c’est affaire d’« hontologie ».

le nom, il ne s’agit pas de l’être. et pourtant de le porter.

ça me rappelle un texte de cet allemand, écrivain allemand, dont j’oublie le nom (toujours j’oublie les noms propres, les nom d’auteurs) qui disait « faites gaffe à porter la croix si vous ne voulez finir porté par elle ». je crois, en ce moment, que c’est de ça dont il s’agit, le nom, aussi pénible que ça soit, il faut le porter, tout en faisant gaffe à ne pas finir mourir en croix sur lui.

il n’est pas allemand, l’écrivain, c’est tournier, michel, et le bouquin c’est « le roi des aulnes ». (toute une histoire d’ailleurs où il n’est question que de porter. de la passion du portage.)

il faut le porter et il faut s’en montrer digne. mon nom, ça a toujours été le nom de mon père. je n’ai jamais pu le faire mien.

l’« hontologie », comme toute affaire d’être, c’est affaire de jouissance. donc miller dit, le S1, il faut s’en séparer bien sûr, le « désêtre », mais il ne faut pas ignorer qu’il est là, faire comme s’il n’y était pas. le S1, c’est le signifiant de ce qui vous est le plus intime, de la jouissance la plus inconnue.

et puis, pour les autres, pris parmi les autres, il redevient un signifiant quelconque (même si, à coup de savoir-faire, il leur imprime sa signature). donc, si je signe… un texte, il parlera de ce que je suis, de mes limites, erreurs, errements, etcetera. à mes yeux, il tombe de son piédestal, la statue bascule. ce que je n’ai pas dit non plus, en séance, je ne sais pas pourquoi ce n’est pas sorti, mais c’était l’idée que si je signais, on saurait, on allait savoir qq chose de mon désir. comme si le désir, à tout prix, devait rester le plus secret. et moi aussi.

j’ai fait ces recherches sur la honte, à cause de celle qui m’envahit quand j’écris. plus précisément, quand je signe. quand j’écris mon nom. quand j’assume la paternité d’un texte.

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janvier 27th, 2006

angélisme

je pourrais le savoir, là  maintenant tout de suite, à  quoi ça sert une victime; mais je ne le veux pas. ce que je veux, c’est ne pas savoir, non surtout, ce que je veux, voudrais, c’est dormir.

mercredi matin, en allant chez mon psychanalyste, je pense: tiens, à  ça, je n’y avais jamais pensé, que si j’ai tant de pensées la nuit, c’est que ces pensées veulent me réveiller. qu’elles ne veulent pas que je dorme. (et je ne leur obéis pas, je me bats contre elles, et elles redoublent d’intensité).

~

lui, il dit: tout de même, ça tourne autour de l’écriture, ces pensées. moi, je dis : oui, oui. non, je dis : non, en fait non, n’importe quoi, ça tourne autour de n’importe quoi. enfin, c’est surtout le travail. mais vraiment n’importe quel travail. ou la colère, la colère contre quelqu’un. peut-être, s’il n’y a pas le travail, ou si le travail est empêché, la colère. (il ne soulève pas, je l’ai dit très bas, la colère. ce qui l’intéresse, c’est l’écriture. ça ne me déplaît pas, qu’on prenne ça au sérieux – enfin, pas trop, quand même).

cette nuit, je me dis : alors, le mot d’ordre ce serait : travaille. travail de nuit.

maitenant, je voudrais dormir.

mots-clés: S1, travail, victime, victimisation ; colère. dormir.