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#83 LNA

Benoît Delarue, Les Cleaners de la mort

Ouvrons le second rapport de l’Inserm consacré à la mise en œuvre de l’autopsie psychologique des personnes décédées par suicide. À la demande de la Direction générale de la santé, des experts se sont réunis en se fixant comme objectif de « comprendre ce qui […] a pu conduire au geste suicidaire, sans prétendre expliquer la décision unique d’un sujet face à un phénomène aussi complexe ». Le caractère réactionnel du passage à l’acte suicidaire est d’emblée écarté ; la visée de l’autopsie psychologique est au contraire de quantifier le comportement suicidaire et d’en identifier la « vulnérabilité génétique ». Mais par quels procédés ?

Pour mener la recherche à bien, il est préférable que le sujet soit mort car sinon il serait susceptible de biaiser les données. Une fois désencombrés de l’obstacle qu’il constituait de son vivant, les experts proposent une investigation de la psyché du mort. Elle consiste à enquêter auprès de l’entourage du suicidé pour établir par la méthode statistique, les facteurs de risque « psychosociaux » du suicide. Ce recueil d’informations est complété par l’exploration de la trajectoire de soins et des services reçus par l’usager, afin d’aboutir à un diagnostic de personnalité avec le DSM-IV. Parallèlement, un « calendrier de vie » retrace les étapes du développement de l’individu. Les données sont rassemblées pour établir une cote de risque suicidaire et une cote de prévention. Le panel d’experts qui s’en charge produit ensuite une évaluation schématisée repérant les troubles éventuels et l’intervention à engager, en chiffrant de 1 à 5 la chance de prévenir le suicide. Cette cote sert ensuite à engager des campagnes de prévention, notamment contre la dépression.